Tracer la route...
A peine la dernière page lue et le bouquin (hélas) refermé, je me replonge mentalement au cœur de la foisonnante aventure proposée par Harrison et ne peux m’empêcher de « subir », d’une façon plutôt...
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le 22 avr. 2016
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Une odyssée américaine est mon deuxième roman préféré de Jim Harrison. Le roman s'appelait à l'origine The english major, mais on peut compter sur nos amis les éditeurs pour foutre le bordel, comme toujours épaulés par les journalistes, qui aiment à faire passer Jim Harrison (et pas que) pour ce qu'il n'est pas. Encore une fois, pari tenu. Surtout que ce titre racoleur est assorti d'une couverture montrant un 4x4 délabré perdu dans un grand espace américain. En réalité, quand Cliff (le narrateur de cette histoire) s'écrie Je suis Jack Kerouac ! à la p. 195, c'est seulement pour rigoler. Il n'est pas plus Beat que toi et même, et s'il parcourt effectivement l'Amérique en voiture, la comparaison s'arrête là. Lui n'est plus tout jeune, et surtout, il ne partage pas les enthousiasmes puériles des jeunes et magré tout sympathiques Hipsters de Sur la route. Lui, c'est un homme plus tout jeune (62 ans) qui doit se réinventer un avenir. En effet, sa femme s'est barrée avec un type qui conduit une voiture de sport, et lui a piqué sa ferme au passage, qu'il cultivait depuis bien 25 ans. Tout au long du roman, son humour pince-sans-rire et son sens de l'aphorisme font des merveilles. Il radote un peu et se montre parfois gentiment réac'. Il adore raconter des anecdotes sur sa vieille chienne Lola, se rappelle avec une (étonnante) tendresse la longue liste des vacheries de sa femme, et parle avec consternation - mais tendresse - de son fils Bobby, gay, plein aux as, prenant l'avion comme on change de chemise et travaillant dans le show-business à San Francisco.
Tout ça ne l'empêche pas de courir la gueuse, notamment en la personne de Marybelle, une jeune femme volcanique qui fut son élève autrefois.
Le grand écrivain Frédéric Beigbeder prétend que ses propres romans sont des recueils d'aphorismes déguisés en romans. C'est aussi un peu le cas ici, et c'est vrai que, pour le souffle romanesque puissant, il faudra repasser. Ces aphorismes peuvent surgir de nulle part,ou être placées en fin de chapitre, pour mieux retentir au fin fond de nos cervelles de volatiles :
Ce qui me tracassait, allongé sur le sac de couchage à écouter Marybelle et le fleuve, c'était qu'à mon corps défendant mon propre scénario, comme celui de presque tous mes semblables, avait été écrit à l'avance.
En tout cas, c'est souvent très marrant :
Je me suis réveillé à trois heures du matin en respirant l'odeur désagréable du bourbon et d'oignon qui venait de ma bouche. J'avais une érection agaçante, alors que je désirais seulement être un moine reclus dans une cellule fraîche lisant un texte latin à la lueur d'une bougie.
Enfin, il y en a plein des comme ça, presque à chaque page.
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le 1 sept. 2016
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