On suit, dans ce roman, un nombre assez important de personnages : Étienne et Fauvette, le couple occupant Ker Ael, ; Lucien dit « le Bosco » gérant d’un café et pilier du petit groupe d’amis ; Ivan le communiste ; la douce et sensible Madeleine ; Léo, qui peine à se consoler de la mort accidentelle de sa femme ; Paradis celui qui fait du bruit avec ses clés ; Blancheterre le jeune professeur et l’Andouille, muré dans le silence. Tous les jours, Étienne et Fauvette attendent patiemment la visite d’un de leurs amis dans leur maison de Ker Ael, en Mayenne. Chaque jour, une personne différente vient dans la grande maison de Ker Ael, ouvre les fenêtres, change les fleurs, dresse le couvert, lit des poèmes à voix haute, s’occupe du ménage, change les draps, sonne à la cloche… Une fois ces taches accomplies, chacun se plie au même rituel : aller dans le bar du Bosco pour y boire le verre de promesse. Au fur et à mesure de l’avancée du roman, on revient sur le passé de chacun de ses personnages, et on comprend tout doucement quelle est la promesse qui les unit les uns aux autres.
On retrouve dans Une promesse le style extrêmement sobre de Sorj Chalandon. Il fait en effet partie à mes yeux des ces auteur-e-s qui n’ont pas besoin de faire de grandes phrases compliquées et riches en mot pour véhiculer des émotions fortes et puissantes. C’est le genre de style qui me séduit directement, puisque j’ai l’impression, lors de ma lecture, que les mots viennent directement me percuter le cœur. La simplicité des phrases rend, selon moi, les émotions décrites encore plus puissantes. J’ai été très touchée par cette lecture, et j’ai souvent stoppé ma lecture pour m’imprégner des phrases de Chalandon. Si c’est le genre d’écriture qui vous plaît, je ne saurais que trop vous le conseiller (et même si vous n’êtes pas un-e grand-e fan de ce genre de style, je vous encourage tout de même à tenter l’expérience…).
Une promesse est un roman magnifique, qui parvient à aborder la question du manque, de la perte et de l’absence d’une manière excessivement juste. Je ne suis pas fan d’habitude de ces livres qui tentent d’aborder la question de la perte, je trouve qu’ils ont tendance à être un peu trop « clichés », un peu trop chargés de pathos. Mais Sorj Chalandon ne tombe pas dans ces travers ici, puisque la sobriété de son style rend la lecture extrêmement poignante. C’est un roman sur le deuil qui ne fait pas de la mort quelque chose de menaçant, d’imposant, d’étouffant, mais qui tend au contraire à faire de la mort une présence avec laquelle on doit composer (je dis les choses avec beaucoup de maladresse, mais malheureusement je ne trouve pas de meilleur moyen de communiquer mon ressenti de lecture).
Je pense néanmoins que ce roman ne pourra pas plaire à tou-te-s, puisqu’au fond, il ne s’y passe pas grand chose. On découvre comment sept personnages font face au deuil et à la perte, on apprend quelques choses sur leurs vies respectives, mais il n’y a pas à proprement parler de « progression » dans le roman. Il y a seulement une levée de voile, et un éclaircissement qui se font : la seule intrigue de ce roman, c’est au fond cette fameuse promesse. J’avoue que ce n’est pas quelque chose qui me gêne, du moment qu’un roman est bien écrit, je peux le lire sans avoir besoin de dialogues abondants ou de suspense à chaque page. Cela dit, si ce n’est pas trop votre cas, je ne vous le recommande pas expressément… (sauf si, vous avez envie de tenter l’expérience, dans ce cas : foncez !)