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Dans cet ouvrage, Illich s'attache à démontrer que l'école obligatoire, institution internationalement répandue, constitue l'un des plus gros piliers du capitalisme. Cette critique radicale promeut donc la disparition de l'institution scolaire, la "déscolarisation de la société" et propose d'autres modalités éducatives, fondées notamment sur l'accès par toutes et tous, à tout moment de la vie, aux ressources éducatives via des "centres de documentation".


L'auteur propose une critique extrêmement pertinente du système de diplôme, qui ne permet en effet que de classer les individus face à l'emploi, garant de la reproduction sociale et du monopole bourgeois sur de nombreuses professions. Il met en avant la nécessité d'un examen pratique, spécifique à chaque emploi, permettant de juger objectivement l'individu qui souhaite intégrer un métier (donc disparition du diplôme et du CV). Cette mesure, totalement d'actualité, apparaît nécessaire à la fois pour la lutte contre la discrimination à l'embauche et globalement pour un meilleur fonctionnement social.


Si le propos de l’auteur est intéressant, il relève cependant d’une conception bien spécifique de l’individu, auquel la société pourrait faire confiance pour être intéressé et se former selon sa propre volonté. Si ce propos est pertinent sur la condamnation des programmes scolaires rigides, on peut néanmoins en pointer les limites sociologiques : que fait-on des savoirs nécessaires à une vie sociale moins oppressive, liés aux dominations autres que capitalistes ? Je pense à l’éducation à la sexualité, aux théories critiques de la race, aux pensées écologiques et anti-validistes entre autres, qui ne seront, malheureusement, pas forcément au centre de l’intérêt spontané des individus et notamment des dominant·es dans chacun de ces domaines.

Par ailleurs, la condamnation radicale de l’institution scolaire ne peut fonctionner, en pratique, sans une remise en question similaire de la famille, ayant toutes deux pour conséquences un changement total du fonctionnement de la société : organisation du temps, droits parentaux etc.

D’autre part, la valorisation de l’emploi des jeunes par réduction fiscale des employeurs, qui repose sur la désignation de l'enfance comme un concept bourgeois, ressemble dans notre société contemporaine au système d’alternance dont on sait la violence pour les jeunes concerné·es, traité·es comme des variables d’ajustement par les sociétés privées.


Ainsi, ce texte s’inscrit dans un contexte de pensée spécifique, celui des années 70, où la remise en question totale des institutions en place semblait plus entendable qu’aujourd’hui et où l’intersectionnalité n’était pas ou bien moins intégrée dans la réflexion critique. La pensée d’Illich nous permet de polariser de façon pertinente nos institutions contemporaines, mais il nous faut la dépasser et l’adapter au monde contemporain, modifié par l'évolution du capitalisme et l’impact du néolibéralisme notamment. Pour poursuivre la réflexion sur le système éducatif, le texte La Pédagogie des opprimés de Paulo Freire, contemporain d’Illich, peut enrichir la conception du rôle de l’éducateur et celle de sa praxis.

le_pou_jaloux
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le 31 déc. 2024

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