Lviv, Lvov, Lwow
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Va comprendre, Charles, ce besoin de s’approprier les choses et les lieux… Il parait que Lviv s'appelait Lwów lorsqu’elle était polonaise puis Lemberg sous domination autrichienne puis à nouveau Lwów, et Lvov sous l'occupation soviétique, Leopoli avec les italiens, Ilyvó pour les hongrois et pour faire bonne mesure… Léopol en français ! Ses habitants seraient appelés « Léopolitains » …
Elle se situe à l’Ouest de l’Ukraine à 70 km de la frontière polonaise. Lviv c’est tout bêtement ukrainien ! C’est une des plus belles villes d'Ukraine (un peu plus de 700 000 habitants) que l'on se plaît à comparer à Florence. Et c’est certainement le personnage central du roman qui nous intéresse.
Żanna Słoniowska, son auteure, y est née en 1978, dans une famille d'origine polonaise. Elle fait des études à l'Académie ukrainienne de presse, avant de travailler comme journaliste polonophone mais également traductrice ukrainien-russe-polonais. Elle vit actuellement à Cracovie.
A l’image du nom fluctuant de la ville en fonction du flux et du reflux de l’Histoire ses habitants sont tiraillés entre les nationalités, les origines et les identités. Qu’il s’agisse du nom de la ville ou de la nationalité de la romancière, la question de l’appartenance est bien celle qui se pose sur son sens (le lieu nous appartient-il ou appartenons-nous aux lieux ?), sur ces questions, mobiles et complexes, de la frontière et des identités. Et si le roman de Żanna Słoniowska est politique, c’est bien parce qu’il affronte ces questions en les intégrant dans le récit, à travers une dynastie de quatre générations de femmes et d’une ville qui est la photographie de l’Histoire sur plus d’un siècle.
Quatre générations de femmes vont parcourir les artères de Lviv, sous le regard attentif de la narratrice, la fille, dont on ne connaîtra jamais le nom. Il y a la mère, Marianna, cantatrice à l’Opéra de Lviv, fauchée par une balle alors qu’elle manifestait pour l’indépendance de l’Ukraine, en juillet 1988. La narratrice avait alors 11 ans. Entre elles, une relation difficile : « Pour moi, le mot “maman” n’évoque pas une image, mais un son. Il commence dans le ventre, passe par les poumons et la trachée vers le larynx, et se coince vers la gorge. “Tu es vraiment nulle en musique ! ” me répétait-elle sans arrêt. Alors je ne chante jamais. Pourtant la voix qui sort de mes entrailles est la sienne, un mezzo-soprano. Il faut dire que quand j’étais dans son ventre, j’avais l’impression que cette voix m’appartenait, mais une fois dehors j’ai compris qu’elle n’appartenait qu’à elle, rien qu’à elle… » Elle se souvient de ses rares confidences « J’ai consacré ma vie entière à l’art. Seule la musique m’émeut réellement, je lui ai tout donné, et je ne fais rien à moitié. Les hommes ? J’ai eu quelques liaisons, toutes pitoyables. La maternité ? Je n’ai jamais assez de temps pour ça, je fais de mon mieux pour réussir une chose : t’inculquer des principes. Pour que tu saches distinguer le bien du mal. […] Quand j’ai compris la vérité sur le régime soviétique, mon monde s’est effondré. J’ai su qu’il fallait que je combatte ce système, et longtemps je n’ai pas su comment m’y prendre. À présent, je sais. Les gens ont besoin de moi. Pas au théâtre, mais dans la rue. »
Par bribes et par fragments le récit se construit. Après la mort de sa mère, la narratrice est élevée par sa grand-mère Aba, à la vocation contrariée de peintre, et son arrière-grand-mère Stasia qui vivait à Leningrad, a vu son mari disparaître dans les grandes purges staliniennes. Elle tente de comprendre sa mère disparue trop tôt, son histoire avec Mikołaj, ses passions (le chant, la politique) qui l’ont toujours animée, au risque de sa propre vie, son engagement farouche pour toute forme d’indépendance, politique, linguistique et féministe. Elle grandira tandis que Mikołaj lui apprendra « l’alphabet » de la ville.
Il y a là matière à entendre la voix d’une jeune femme qui s’éveille, sexuellement, politiquement, artistiquement, à la vie, dans un roman intimiste et clairement politique, malheureusement aucune ligne chronologique n’est suivie, tantôt la narratrice a huit ans, tantôt vingt, chaque chapitre fait des sauts d’une décennie à l’autre sans grande justification et donne à l’ensemble un flou qui participe à l’inconsistance générale. C’est très dommageable. Cette fresque historico-familiale aurait mérité une structuration plus solide avec une montée en puissance dans les sentiments et prises de conscience de la jeune femme… et dans la construction d’une Ukraine enfin adulte.
Créée
le 12 févr. 2019
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