" Chacun a son île, Jean Louise, chacun a sa sentinelle "

Quand j’ai entendu parler de ce roman, j’avais compris je ne sais pourquoi qu’il était en préparation alors que le script avait été retrouvé par hasard et retravaillé. Et puis, en faisant un saut au supermarché du coin, je tombe sur le livre et c’est avec une sorte de frénésie que j’ai acheté le bouquin pressée de retrouver Scout, Atticus Finch et les autres.


C’est d’ailleurs comme retrouver de vieux amis, des membres de la famille qu’on aurait perdu de vue par négligence parce que la vie est passée par là tout simplement. On essaie alors de rattraper le temps perdu, de combler le manque après 50 années d’absence. Qu’est devenu Atticus le juste et Scout l’impétueuse?
C’est presque avec regret qu’on retrouve la petite fille en femme. Parce que justement elle a grandi, qu’elle ne vit plus à Maycomb; et que Atticus souffre de rhumatismes. Et que, et que….mais ça je vous laisse le découvrir. Il n’y a pas de roman de transition entre le moment où on l’a laissé et celui où le lecteur la retrouve; il y a tellement de choses qui n’ont pas été dites, que nous lecteurs nous ne pouvons qu’imaginer et regretter. Malheureusement, il semblerait que les personnages ont continué à vivre leur vie alors que nous, nous les avons quitté.


Malgré tout, c’est addictif parce que Scout reste Scout. Parce que son séjour dans sa ville natale fait renaître en elle des souvenirs d’enfance. Ses bêtises avec Dill et Jem, son frère. Par exemple, à jouer au réveil religieux dans la cour de Tante Rachel et à baptiser Scout dans le bassin aux poissons. Les soirs d’été passés sur la véranda à siroter de la limonade à l’abri des moustiques. Les batailles, les reconstitutions, l’innocence et les premiers amours.


Autant d’événements qui nous ramènent à notre propre enfance. A un âge où on se croit fort, invincible. Où un rien suffit, où on trouve sa place parmi ses amis, sa famille. Mais, la sagesse ou bien la gravité n’est jamais loin. Les enfants ont grandi, certains sont partis et y en a même qui sont morts. Encore une fois, la vie est passé par là avec son lot de leçons, de désillusions et de promesses qu’elle n’a pas honorée.


Et bizarrement tout comme Scout, je me suis sentie trompée, trahie. Comme si Maycomb était ma ville, comme si Atticus était mon propre père. De toute façon, père ou pas, tous les enfants passent par cette étape-là. J’aime bien l’appeler comme ça: » Lorsque les masques tombent ». Pour l’avoir expérimenté moi-même, c’est assez violent; je crois que c’est à partir de ce moment là qu’on cesse d’être une enfant.
Comme on fantasmera plus tard sur l’autre qui partagera notre vie, on fantasme sur nos parents. On les idéalise, on les voit comme des héros. Ce sont nos modèles, nos inspirations et nos guides aussi. Puis vint le fameux jour où les masques tombent. Et là, c’est le réveil; c’est comme ne plus savoir qui on a aimé durant tout ce temps. Et, ne plus savoir qui on est vraiment non plus. C’est finalement découvrir l’autre tel qui est vraiment c’est-à-dire avec ses défauts comme ses qualités. Et forcément, ça blesse car on a le sentiment que nos proches n’ont fait que tenir un rôle soit c’est ça soit c’est nos yeux d’enfants qui n’ont pas voulu voir le pire mais seulement le meilleur.


Il va donc falloir (re)découvrir l’autre, (ré)apprendre de lui. De ce qu’il a à nous offrir et à nous apporter si tenté qu’on accepte. Mais, au delà de ça, c’est un adieu c’est un deuil plus important encore qu’il nous faudra faire: celui de l’enfance. Et rien, n’est plus difficile que de lui dire adieu.


En ce sens, j’ai trouvé cette partie du roman plutôt cruelle et amère mais plutôt réaliste. En même temps, j’ai trouvé aussi que cet opus était moins maitrisé et emblématique que son prédécesseur, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur. Le final me laisse mi-figue mi-raisin dans son traitement. Je l’ai trouvé facile, peu développé; et surtout il ne va pas au bout de ses idées. On fait exploser la dynamite et on s’en va laissant sans doute le choix au lecteur de faire sa propre idée sur la question. Cependant, on reste énormément sur sa faim avec dans la bouche un gout doux-amer.

Missbale974
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le 5 avr. 2016

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Missbale974

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