A la fois manifeste contre le système financier qui met en échec la modernité au détriment de l'environnement et profession de foi d'un homme qui a voué son existence à la terre nourricière, "Vers la sobriété heureuse" est un très beau texte aux allures combinées de conte philosophique, d'essai philosophique et de doctrine philosophique.
Pierre Rabhi s'est imposé au fil des décennies comme la voix et la voie vers une économie basée sur la décroissance. Mettant l'écologie au cœur de son discours, ayant lui-même fait avec sa famille l'expérience d'une vie de sobriété heureuse, cet enfant du désert né en Algérie a à cœur l'analyse des différentes cultures et des économies qui y sont reliées. Prônant un retour à la terre engendrant le respect universel et la satiété du confort, Pierre Rabhi dénonce les faits, explique et démontre ses théories avec des mots simples, des arguments percutants, un bon sens à toute épreuve et un style accessible à tous.
"Quelle planète laisserons-nous à nos enfants ? Quels enfants laisserons-nous à la planète?"
"Travaillons-nous pour vivre, ou vivons-nous pour travailler ?"
"En choisissant le modèle de développement responsable du désastre, les pays émergents contribuent à accélérer un processus qui ne peut qu'être fatal à l'espèce humaine. Faut-il encore et encore le redire ? on ne peut appliquer à une planète naturellement limitée un principe artificiel illimité."
"La terre ne nous appartient pas, nous appartenons à la terre."
"La vie n'est une belle aventure que lorsqu'elle est jalonnée de petits ou grands défis à surmonter, qui entretiennent la vigilance, suscitent la créativité, stimulent l'imagination et, pour tout dire, déclenchent l'enthousiasme, à savoir le divin en nous. La joie de vivre est une valeur suprême à laquelle nous aspirons tous, mais que des milliards de dollars ne peuvent offrir."
Cri d'alarme résonnant plus haut et plus fort qu'une morale de bonne conscience, "Vers la sobriété heureuse" pose le dogme du respect de l'homme concomitant au respect de la terre et de ses ressources. Fermement érigé contre la société de consommation et ses dangers de tous ordres, Pierre Rabhi appelle à la prise de conscience et, à l’instar de l'économiste Nicholas Roegen, à une "décroissance soutenable".
Réduire l'idéologie de Pierre Rabhi a une simple problématique écolo serait réducteur car il s'agit d'une réaction en chaîne partant de la préservation de la terre et du bon usage de ses ressources jusqu'à la dignité sociale de chaque individu. Pierre Rabhi n'a rien de l'activiste agressif, il dégage au contraire la sagesse paisible et ancestrale du sage et ses analyses sont pétries non seulement d'expériences concrètes mais encore de sociologie, d'économie, de philosophie, d'une forme de spiritualité et d'anthropologie. Et s'il n'a aucune confiance en les Etats dit "développés" pour apporter les solutions qui s'imposent, il garde foi en l'homme qui rejette l'aveuglement ; son appel à la sobriété heureuse peut ainsi résonner dans le cœur de chaque humain ayant des yeux et des oreilles pour voir et entendre.
Clamons-le haut et fort : il est urgent de ralentir !