Zadig, c'est un conte façon j't'embrouille, que Voltaire a écrit sur son époque, mais dont l'acuité perdure tranquillement jusqu'au XXIe siècle.
C'est l'histoire d'un surhomme. Le genre de mec à qui tout est donné. Le genre de personne à jalouser à cause de tous les dons que la nature lui a fait, de toutes les qualités qui sont les siennes, de tout ce qu'il a pour lui-même et que vous n'avez pas.

Zadig, c'est le bouquin de chevet de Frédéric Lefèbvre. Vous allez voir que ce n'est pas complètement par hasard. Déjà parce qu'il faut être bien idiot pour avoir un livre de chevet à lire et relire. Que c'est incompréhensible. Et qu'avec tous les romans, contes, nouvelles, parues depuis des siècles et qui sortent encore tous les jours, se contenter de lire plusieurs fois un livre dont le message s’inscrit finalement moins dans une satire que dans une grosse flamme de l'arrivisme relève au mieux d'une bêtise d'ignare, et au pire d'une tentative de manipulation, ou d’une volonté crasse de s'enfermer dans un schéma de pensée clos où le pire fricote avec le mauvais.

Dans Zadig, on suit les mésaventures, en quelque sorte, de cet homme parfait, en proie avec un monde qu'il a bien du mal à comprendre. Sa droiture, la Justice qu'il incarne, la bonté et l'altruisme qui fondent son être, parfait en tous points, jusqu'au physique et à la virilité, sont confrontés à tout ce qui compose l'humanité dans ce qu'elle a, fatalement, de décadent. Égoïsme, angoisse, vénalité, népotisme, violence et stupidité.

Bien sur, à la fin, le monde reconnaît en Zadig son Sauveur et pour un conte de Voltaire, tout finit bien dans le meilleur des mondes qui a porté au pinacle son protecteur et le meilleur de ses ouailles.

On pourrait se contenter de cela et crier donc à la satire géniale d'un auteur visionnaire. Pour visionnaire qu'il soit, on ne peut s'empêcher de trouver que le monde décrit, et l'ambition si noble du héros sont tournés de manière très prononcée vers le paraître et un matérialisme bon teint.
Zadig est cool, mais il ne cherche que la récompense. Il est généreux, mais il veut être riche. Il est aimé, mais veut être reconnu et adoré.

Dans ce monde juste et bon que la fin du conte semble proclamer, le règne de l'apparence, du pognon et de l'ambition restent les maîtres. Ils triomphent comme ils l’ont toujours fait. L’air de rien, dissimulés, mais toujours plus puissants. Comme une banque.
À moins que Voltaire soit cynique à ce point, Zadig a un goût de mercure, à tout le moins un arrière goût acide, celui d'une écharde plantée dans la peau tendre sous l'orteil, qui s'infecte et dont on ne s'aperçoit qu'une fois la maladie propagée, quand il est trop tard pour réparer, qu'il n'y a plus que la mort à attendre.
hillson
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le 9 août 2013

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