La montée du coût de la vie et des inégalités sociales, l’arrivée d’une culture décomplexée de l’enrichissement à tout prix, les ghettos avec la drogue comme seul horizon, tout ce que décrit Dirty Boulevard sur la Grosse Pomme de l’ère Reagan se trouve aussi chez Ferrara, Spike Lee, Tom Wolfe et Brett Easton Ellis. Ce qui ne s’y trouve pas c’est que sous-entend le détournement de la devise de la Statue de la Liberté par Lou Reed : cette période, vendue par les Républicains comme un retour aux fondamentaux du pays (John Wayne, la ruée vers l’or…) serait selon Lou une trahison des idéaux d’origine de la Bannière Etoilée. De l’eau a coulé sous le Pont de Brooklyn depuis le NYC interlope de Walk on the wild side. Les couplets chroniquent le New York des années 80 avec un détachement froid (de la voix de Lou) et des accords minimalistes avant que tout ne soit rompu par les guitares et l’énergie du refrain, comme une caméra qui commencerait par regarder son sujet à distance avant de propulser d’un coup dans le feu de l’action. Et il y a le final gospelisé dans lequel le personnage principal rêve de s'envoler pour quitter le Boulevard. Comme Lou n’a jamais été un joyeux, on peut supposer que ce dernier va plus probablement voler vers le ciel après s’être pris une balle.