http://youtu.be/W94gx2L12ng
Un anniversaire-surprise, c'est fêter l'anniversaire de quelqu'un en le surprenant. Le mieux, c'est de faire ça un jour où c'est pas son anniversaire et ça tombe bien, il y en a plein. C'est même pour ça que Dieu a créé plein de jours. Pour l'anniversaire-surprise potentiel d'un connard que tu connais.
Il est trop fort ce Dieu.
Tu sais... Cette impression de me jeter dans la gueule du loup. Sciemment.
Son anniversaire-surprise. Je ne vais pas te mentir (tic de l'épaule), Barnabé je l'aime bien. Mais des invitations comme ça, ça peut ressembler à de vilains traquenards.
Peut-être ne le sais-tu pas, peut-être l'as-tu déjà oublié mais Barnabé c'est mon meilleur pote. Mais c'est aussi un flic.
Et on trouve quoi à l'anniversaire d'un mec de la police ? Des flics mon pote, des flics. Comme s'il en pleuvait. Et même si c'est un anniversaire-surprise! C'est juste dingue. Ils savent tout.
(Surtout s'il y a moyen de se faire rincer la gueule pour pas un rond).
Sa moitié m'avait envoyé un message la semaine précédente, m'enjoignant de me mêler aux volailles. Y avait même un pote, un policier devine, d'Agen, qui venait. Alors ! Je ne pouvais pas me défiler.
Ils avaient préparé un plan au poil de cul pour l'éloigner de sa ferme. Ouais Le mec vit dans une ferme. Comme une poule.
Loin du tumulte de Babylone, où les lions vivent en liberté, mon pote. En liberté.
J'avais évidemment répondu que sans moi je ne voyais pas comment ça pourrait être surprenant, dès lors oui oui, je serais là.
C'est en y allant que j'ai eu le temps de réfléchir plus posément. Au traquenard, à la gueule du loup, tout ça. Parce que c'est loin, les fermes, surtout quand tu viens de Babylone.
J'en aurais chialé.
J'arrive. C'est ouvert. Ouais, c'est une ferme mais y a quand même une porte. Qui pourrait être fermée mais là, c'est ouvert.
Il y a son clébard à 5 pattes. Super sympa le chien. Il bave, il a un grognement de mort-vivant et te laboure les mollets avec ses putain de griffes.
Non, ce n'est pas un lion.
Déjà, il ne vit pas en liberté, il est enchaîné le con. Il fait trop chier tout le monde.
Ensuite, il bave trop. Et c'est bien connu, les lions ne bavent pas. C'est pas dans leur délire. Un lion, c'est un félin, pas un putain de clébard ! Ça a une putain de fierté.
Pas comme ce putain de chien.
Et puis ils n'ont pas les mêmes cheveux.
Donc je rentre. Le chien et sa béquille me reconnaissent,. Il remue furieusement sa cinquième patte en glougloutant comme dans un Romero. Je flippe. Normal. J'adore les morts-vivant mais je déteste les chiens.
Moins que les poulets mais pas loin.
Donc malin comme je suis, je place ma fille entre le baveux et moi. On a le droit à 5 % de pertes.
J'arrive tant bien que mal là où ça se passe. Il y a de la lumière, deux mecs qui grillent une clope. Chacun la sienne.
Eux : « Salut ! » me disent-ils de concert.
Moi : « Salut les gars qu'est qu'on branle ?! »
Ma naine : « 'Alut »
Machin : « Mais tu saignes, petite ! » s'inquiète, visiblement effrayé, l'un des lascars.
Moi : « Oui ! Ce connard de chien l'a attaquée ! J'ai combattu comme j'ai pu mais c'est un squale en chien ce con. Faut le faire piquer ce bâtard ! »
Ma naine : « Ouille ! »
Pendant que l'inquiet emmène ma mini-moi se faire amputer en me jetant un regard plein d'incompréhension, j'en profite pour taxer une blonde à celui qui se fout que des enfants saignent tout en caressant affectueusement les boucles de ma princesse qui s'éloigne, protégée par l'homme aux yeux mitraillette.
Le sans-coeur me dit «Moi, c'est Machin (je ne me souviens plus de son prénom et comme j'ai envie d'être précis, pour changer, de ne pas partir dans les inventions et tout le tralalala, ça sera Machin ), je suis d'Agen»
«Moi c'est Djee, je suis de Paris»
Machin d'Agen : «Ah ! T'es Djee ! J'ai entendu parler de toi. T'es le pote d'enfance de Barnabé.T'es pas collègue !»
Moi : «Tu me croiras si tu veux mais tout ce que tu as entendu sur moi c'est que des conneries sauf que, effectivement, je ne suis pas une pourriture de condé. »
Un ange passe.
Je reluque l'air de rien le verre du malpoli.
« Sinon on doit s'ouvrir les veines pour boire quelque chose dans le coin ? Tu bois quoi toi, Machin ? »
« Un Perrier-citron, t'en veux un ? »
« Jamais d'eau. T'es con ? Ça rend transparent. Tu sais quoi ? Je vais y aller moi-même comme ça, en plus, je vais claquer des bises parce que je sens qu'il y a des femmes ! »
Je traverse la grange cherchant à me rapprocher de ce bruit qu'on dirait des poulettes. J'étais plus loin de la lumière que je le croyais. Et ça piaille ! Ça veut dire que j'approche.
Dans la cuisine laquée rouge, super conviviale, autour de cet îlot central très classe qui fait «cuisine pour l'homme qui aime se faire de bon petits plats sans oublier de vivre dans le confort, on va pas se faire chier quand même, on n'est pas des Maliens» : des bonnes femmes !
« Yo les péquenots ! C'est Djee ! Ça biche les coupines !? »
« Doux Jésus ! Un homme enfin » lâchent-elles dans un canon à l'harmonie douteuse.
Je ne suis pas fan des canons. Je préfère les fleurs.
« Du calme les filles, vos hommes sont armés, je suis Pater Familias, faudrait pas que je prenne une balle perdue ! Mais, je viens de voir deux spécimens en arrivant et je vous comprends. Mais faut trop garder votre calme ! Sinon j'ai une soif de mangeur de poussière. Dois-je mordre ma langue et étancher cette pépie avec mon propre sang ou il y aurait une bonne âme, une de gentille, qui va me fournir une chopine remplie au raz bord d'un liquide qui me la piquera à défaut de la fendre ? La langue.»
Madame Brune d'Agen : «On prépare un Mojito »
Moi « Dans la bassine là ? »
Madame Brune d'Agen : « Oui, on nous a dit que tu venais. »
La hyène.
Moi « Ça me touche mais je pensais plus à un Perrier avec une chouette rondelle de citron. »
Ouais je sais, je suis une merde.
Moi : « Sinon, ça se passe comment ? »
Machin d'Agen : « La tite tia (c'est Madame Barnabé) a attiré Barnabé à la ville sous un fallacieux prétexte. Porter des sacs. »
Moi : « Sérieux ? Y a une ville dans le coin ? »
Moi : « Sérieux ? Elle compte lui faire porter des sacs ? »
La blonde : « Oui, c'est un prétexte matelassé mais on a mis des pierres pour qu'il ne voit pas andouille sous cloche »
Un deuxième ange passe.
Moi à la blonde : « Dis, toi qui n'a rien à faire, tu veux bien rhabiller le petit ? Ça évitera que tu l'ouvres trop »
Moi : « Et donc la ville, si elle existe vraiment, est assez proche pour qu'ils rentrent dîner. Et sinon on fait comment pour le surprise ? »
Machin aux yeux mitraillette tout en maintenant le point de compression (quelle dextérité) sur l'artère fémorale de la pauvre ma fille : « On se cache dans le salon, ils vont entrer par là. On sera dans le noir et quand ils allument, on crie « surprise » ! Normalement c'est surprise mais pour ça, faudrait que le connard immatriculé dans le 93 et qui est garé devant, bouge sa bagnole... »
Moi : « Mais je t'emmerde saleté ! »
Tac tac je fais le tour du pâté de ferme et je me gare dans le champs de maïs d'à côté. Pas de lion à l'horizon, j'éclate mon fumigène de secours en tenant d'une main ma chopine pleine de ce merveilleux mélange qu'est la Vodka et la bière. Au loin des phares ! C'est la merde ! Ça peut être qu'eux ! Je fonce.
J'arrive. Personne. J'allume. « SURPRISE !!!!! »
Déception. C'est pas lui. Putain qu'il est con.
« Oh crotte ! C'est toi ! Éteins, ils vont arriver »
Machin-mitraillette caché comme moi derrière le canapé me glisse à l'oreille : « Tu as le même groupe sanguin que ta fille ? »
Moi : « J'en sais rien ! Mais j'ai du sang ça c'est sûr. »
Une clé dans la serrure. Ça sent le Barnabé à plein nez. Ça s'ouvre. On reconnaît son corps de lâche dans l'embrasure de la porte. Il allume.
Machin d'Agen en sortant de sa cachette : « Surprise !!! »
Bang !!! Machin d'Agen avec un pruneau au milieu du front.
Il est trop con ce Barnabé.
Ma môme et moi, on profite du troisième ange qui passe pour lui sauter sur le dos et se tirer ailleurs.
Voir si on y est.