Bakemonogatari, porte d'entrée selon la vision de l'auteur des LN, n'est pas le genre d'anime qu'on pense.
Volatile, en perpétuel mutation, il ne nous tend jamais la main pour aider à le comprendre : rien n'est acquis, rien n'est montré, tout est suggéré.
L'histoire semble prendre pied dans un univers où le surnaturel côtoie notre existence par à-coup, dans nos moments de faiblesse et de douleur. Ici, la frontière entre ce qui est réel ou non est très mince et nuancée, nous laissant aller à une interprétation libre. On suit l'histoire d'un lycéen nommé Araragari, qui fut vampire pendant un temps. Au côté de son ami Oshino, il tente de venir en aide à certaines personnes en conflit avec des abbérations. Et par "tenter", j'appuie ici sur ce mot pour une raison : durant ces tentatives est appuyé le fait que les relations entre entités et sentiments sont fusionnelles. Ses interventions ne pourront donc jamais être des succès, car toucher aux sentiments n'est pas chose aisée.
Chaque plan en amène un autre totalement différent, dans son cadrage, dans sa focale, dans sa colorimétrie, dans son dessin.... Du texte apparaît pendant 0.5 secondes, puis on passe à autre chose, on alterne des photos, du collage, le tout soutenu par une direction artistique minimaliste et nuancée.
On se perd alors, on avance à tâtons en ramassant les bribes d'informations mise à notre disposition pour espérer savoir où veut nous emmener Bakemonogatari. Pourtant, au fur et à mesure, les pièces s'emboîtent et on se rend compte que l'effort en valait la peine.
Oui, Bakemonogatari n'est pas tendre avec son spectateur et si, aux premier abords, il paraît hostile voire même étrange, c'est en réalité car il défend un trésor particulier : son iconographie.
À vouloir nous abandonner en cours de route, on se retrouve à devoir effectuer un véritable effort d'analyse si l'on veut appréhender toute la saveur de cette madeleine au goût doux amer. Des références pop culture aux indices disséminées partout dans chaque plan... À cela s'ajoute le point de vue interne du MC assez particulier :
Fasciné par le sexe, Araragari ne perd jamais l'occasion d'observer un corps féminin. Ses yeux deviennent alors des entités divines, capables d'arrêter le temps ou de l'étirer, de prendre des photos... Pour autant, cela n'a aucunement freiné mon visionnage, tant la mise en scène dilue ce fanservice interne.
L'anime est donc bel et bien un trésor iconographique.
Visuellement riche et fourni, avec une mise en scène sublime, laissant se lover des contrastes et jeux de lumière doux entre les bâtiments... L'anime est une ode à l'urbanisme, à cette fascination fétichiste des formes géométriques et la symétrie.
Il n'hésite pas à s'affranchir des codes pour poser son regard ça et là, même dans des espaces physiques inatteignables. Se jouant de la physique et des conventions de visionnage basiques, il étire jusqu'à sa temporalité pour nous égarer.
Pris tout seul, on peut effectivement trouver que Bakemonogatari ne possède pas une histoire transcendante, mais je suis sûr qu'une fois visionné dans son grand ensemble de films et d'épisodes aux appellations diverses... J'y trouverai un trésor plus grand encore.