Breaking Bad par Philippe Quevillart
Chef D'œuvre ni plus, ni moins
S'il est une série TV qui se doit d'être visionnée, c'est bien de cette création de l'excellent Vince Gilligan qu'il s'agit.
Rarement une œuvre aura réussi un mixe aussi parfait de plusieurs genres, sans jamais s'égarer, en ayant une incroyable capacité à remettre d'aplomb les moments de flottement, à intégrer autant de préceptes fondamentaux de l'art cinématographique avec une incroyable réussite. Ce miracle filmique, car on est dans le domaine cinématographique tant cette œuvre au gré de ses quatre premières saisons, au fil de ses épisodes parvient à réaliser une véritable prouesse tant technique, que scénaristique, réussit ce que peux de films parviennent à faire sur grand écran. Chaque genre abordé, qu'il s'agisse du polar, du drame existentielle, de la comédie situationnelle, du film de maffia, y est intégré avec une sorte d'excellence, comme si le meilleur du cinéma des frères Coen, de Scorsese et de Quentin Tarantino croisait celui d'un John Cassavetes dans sa démonstration des rapports humains.
Du point de vue de la mise en scène c'est très soigné, les intros comportent quelques morceaux de bravoure rarement vu sur un écran et chaque réalisateur apporte son style tout en gardant cette sorte de ligne directrice qui fait la spécificité de cette excellente œuvre.
Les interprètes ne sont pas en reste, Bryan Cranston se dévoile remarquable dans ce rôle de victime qui se mue en prédateur, un homme frappé par la fatalité, une sorte d'icône du salary man américain ayant toujours marché droit à qui la maladie fait prendre un virage totalement bouleversant dans sa vie jusqu'alors rangé des voitures. L'image du héros américain, bon père de famille, travailleur émérite et mari exemplaire est remise en question. Les auteurs n'oublient jamais de poser un regard lucide sur le modèle sociétal américain, voir occidental, en n'omettant pas de mettre en exergue les vrais maux de nos société fatiguée, les modèles sociaux qui s'écroulent, les employés qui ne peuvent plus se suffire de leur emploi pour subvenir à leurs besoins, etc... C'est donc d'abord dans ce domaine que cette série est exceptionnelle. Rarement un regard aussi lucide aura été posé sur la société contemporaine sans tomber dans des clichés de sociopathes moralistes à deux balles comme il en pleut dans le paysage audiovisuel actuelle.
Le reste de la distribution n'est pas en reste , l'excellente Anna Gunn (Deadwood), le très convaincant Aaron Paul, dans le rôle de Jesse Pinkman, le jovial Aaron Norris, en flic dur à cuire avec un cœur gros comme ça, l'excellentissime Giancarlo Esposito, aperçu chez Coppola ou Spike Lee dans le rôle du maffieux Gustavo 'Gus' Fring, ainsi de suite jusqu'au moindre figurant.
Il est facile de s'emballer et de ce fait manquer d'une certaine objectivité lorsqu'il s'agit de parler d'une œuvre qui nous fait vibrer, difficile cependant de trouver des défauts à ce diamant brut dont la 5ème saison que les producteurs promettent détonante est plus qu'attendue... désirée.
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