Cette série a réussi quelque chose d'impensable : faire d'un mercenaire amoral, amateur d'alcool et de femmes peu farouches, réglant ses problèmes dans une mare de sang, un sympathique héros modèle pour les tous petits. Je frémis en attendant les adaptations équivalentes du Punisher ou d'Emmanuelle...
C'est marrant de voir comment les scénaristes ont réussi à atténuer la violence des histoires et des films en s'inspirant justement des oeuvres de ou autour de Robert Howard. Par exemple alors que dans le film de John Milius Conan vengeait la mort de ses parents, dans ce dessin animé il doit rompre le sortilège qui les a changés en pierre. Mais le gros stratagème pour rendre inoffensives les nombreuses scènes de combat a été trouvé dans une aventure de Kull le roi Atlante : les méchants sont des hommes serpents infiltrés dans les sociétés humaines, que le moindre contact avec un mystérieux "métal étoile" envoie sur une autre planète. Ainsi ne vous attendez pas à voir la moindre goutte d'hémoglobine. Aussi aucun gentil, même figurant, ne mourra : au pire ils seront ensorcelés comme les parents de Conan.
Conan était un combattant seul, ou parfois accompagné d'une jeune femme dénudée. Ici il se retrouve accompagner de différents faire-valoir : un quota ethnique, une jeune femme habillée (d'où la relation la plus platonique de l'histoire), un viking, un magicien (alors que le vrai Conan se méfiait d'eux mais bon...), un homme faucon, un phénix...
C'est d'autant plus étrange de voir une telle profusion de comparses que ceux-ci sont des intermittents : mis à part le phénix aucun ne participe à chaque aventure, et cela souvent sans explication. Je ne peux expliquer cela par la géographie puisque cela n'empêche pas le Noir d'aller dans les montagnes de l'Himalaya, les Occidentaux d'aller en Extrême Orient, etc.
Cette intermittence des sidekicks fait partie de la grosse nonchalance de la trame scénaristique. En effet on voit à chaque début d'épisode Conan avec quelques de ses alliés errer à travers le monde hyborien et découvrir dans les 2/3 des histoires une connexion avec le grand méchant Iramon ou un autre magicien maléfique. Puisque l'action se passe dans les équivalents proto historiques de l'Europe, l'Afrique et l'Asie (soit au moins 20 millions de km²) ce Conan est un grand voyageur, doublé d'un sacré veinard pour tomber toujours sur Iramon...
Ainsi peu d'épisodes sont vraiment importants puisqu'en général :
- Conan tombe sur un nouveau péril qu'il découvre et vainc le temps d'un épisode, ce qui permet d'arriver à 65 au final...
- Conan pense pouvoir rompre la malédiction de ses parents mais à la dernière seconde le scénariste se rappelle que ce n'est pas encore la fin de la série et donc trouve un moyen de revenir à la case départ...
- Conan réussit à détruire une machination d'Iramon dans le but d'accroître son pouvoir, sans que cela ne change le rapport de forces entre eux deux...
Donc les histoires sont vaines, les personnages n'ont aucune épaisseur, les scènes "d'humour" pour tous petits ne fonctionnent jamais, les scènes d'action ne sont pas spectaculaires, les dessins sont médiocres et datés, la réalisation souffre de faux raccords monstrueux, la chanson de Bernard Minet passe lors des 2 génériques... Au second degré cette série est donc un vrai régal.