Coppelion par Ninesisters
Coppelion est un anime à la genèse compliquée. Initialement prévu pour 2011, des similitudes entre le manga d’origine et les événements qui ont bouleversé le pays, ont poussé les producteurs à repousser cette adaptation.
Jugez plutôt : suite à un accident, la centrale nucléaire bâtie en plein Tokyo – ce qui est, en soi, une idée à la con – explose, et contamine la capitale japonaise, obligeant la population à fuir. Bien des années plus tard, le gouvernement a mis au point les Coppelion, des humains génétiquement modifiés pour résister aux radiations. Trois d’entre eux sont envoyés à Tokyo pour tenter de retrouver les quelques survivants qui y habitent encore.
Il n’est pas très difficile d’imaginer pourquoi, suite à la catastrophe de Fukushima, un tel scénario faisait un peu tâche.
La première chose qui surprend dans Coppelion – en bien – c’est la direction artistique. Les décors sont sublimes, fourmillant de détails, et incroyablement travaillés. L’idée pour le studio semble vraiment de nous offrir un panorama de cette Tokyo désertique, en ruine, où la nature reprend progressivement ses droits. Chaque environnement s’avère aussi mémorable que le précédent, et cette visite de l’ancienne capitale nippone ne peut que marquer durablement les esprits.
Par rapport aux arrière-plans, les personnages paraissent beaucoup plus grossiers, avec des contours appuyés, comme si deux techniques antagonistes avaient été employées par représenter l’un et l’autre, ou – plus certainement – comme pour montrer que les êtres humains n’ont plus rien à faire dans cet univers devenu hostile.
Le souci, c’est que nous ne sommes pas dans Iblard Jikan, il faut un scénario pour aller au-delà de la simple visite touristique ou de l’exercice de style. C’est là où le bât blesse. Les raisons pour lesquelles les différents personnages sont demeurés à Tokyo paraissent crédibles – d’anciens prisonniers qui seraient renvoyés en prison s’ils quittaient la zone interdite, des personnes âgées laissées sur place par leurs familles, des employés de la centrale qui considèrent ainsi payer pour leurs fautes – même si nous pouvons décemment nous interroger sur comment ils ont réussi à survivre sur place les premiers temps, mais ils servent surtout à l’auteur à proposer des histoires larmoyantes au possible, indigestes, et qui ont même tendance à manquer de cohérence.
Et ce ne sont pas les Coppelion qui vont y changer quoi que ce soit : humains artificiels, ce sont surtout leurs personnalités qui en font des caricatures, voire des parodies. Entre délires existentiels insipides et passivité qui donne franchement envie de donner quelques baffes, ce ne sont pas de bons personnages. D’où, sans doute, l’utilité de se focaliser plus sur l’environnement que sur les protagonistes, et sur ce qui peut bien leur arriver.
Car les enjeux paraissent très artificiels, eux-aussi. Les méchants sont généralement méchants juste parce qu’ils sont fous à lier, et avant de comprendre qu’en fait ce n’est pas gentil d’être méchant. Pour ne rien arranger, les pires difficultés sont avant tout d’ordre administratif… Impossible, dans ces conditions, de se prendre d’intérêt pour ce qui se déroule à l’écran.
Malgré tout, Coppelion propose quelques scènes d’action agréables. Mais ce qui fait tout l’attrait de cet anime, c’est l’aspect purement théorique. Comprenez l’évolution de la Tokyo contaminée (et ses magnifiques vues d’une cité moderne en décrépitude), son exploitation actuelle, la façon dont le monde la perçoit désormais, les moyens de survivre dans ces conditions et les problèmes inédits que cela soulève, ou encore, comme indiqué tantôt, les raisons qui peuvent pousser certains individus à rester sur place (phénomène bien réel aux abords de la centrale Lenine de Tchernobyl). Par rapport à ça, le scénario apparait souvent comme un prétexte pour aborder tous ces thèmes.
Sauf que nous parlons d’une série TV de 13 épisodes : un prétexte, cela ne suffit pas.