Comme beaucoup j'ai été instantanément séduit par l'anime il y a près de 20 ans. Comme beaucoup, j'ai redouté le massacre que tout le monde annonçait. Et comme beaucoup j'ai quand même regardé. Par curiosité.
Soyons clair. Cette série live action ne pouvait être une bonne copie. Le succès de l'anime repose pour moi sur ce savant équilibre entre la désinvolture des personnages, la tristesse de la toile de fond et un humour décalé, le tout lié par une des meilleurs BO toutes catégorie confondues.
La nature easy going de Spike, l'honneur de Jet, l'insolence individualiste de Faye et la dinguerie d'Ed parait impossible à rendre en Anglais par des acteurs humains. Cela aurait été grotesque, on acceptera donc que cela passe à la trappe. La tristesse qui hante les arcs de la toile de fond marche car elle arrive principalement à la fin, ça n'est pas comme ça que marche une série Netflix.
Reste l'humour, ça c'était à leur portée.
En ayant accepté que le live action et l'anime sont deux oeuvres différentes dont les buts divergent fondamentalement, comment est-ce que ce live action s'en sort-il?
La suite comporte évidemment des spoilers.
Le premier épisode part en douceur avec une scène d'ouverture franchement dans l'esprit. Spike et Jet font face à une prise d'otage dans un space casino. L'humour fait mouche et les bastons sont plutôt crédibles, l'histoire est originale, on est pris par surprise.
Le générique qui suit est bien adapté, on se prend à rêver...
Mais la suite nous ramène à la réalité. On va revivre le premier épisode de l'anime avec en bonus une fin nous présentant Vicious et Julia.
Vicious a une tête de cosplayeur et Julia semble vraiment transparente.
Les épisodes 2-5 sont des remix d'épisodes avec de bonnes idées, du fan service, du remplissage et le nouveau fil conducteur : Vicious sait que Spike est vivant et veut le buter. On souffre un peu mais on s'accroche.
Puis arrive le 6e épisode, et la recette qui peinait à marcher ne fonctionne plus du tout, on s'ennuie ferme, c'est censé être basé sur Brain Scratch mais là où l'épisode de l'anime était dérangeant, c'est juste une excuse fade pour développer (à peine) la trame principale. Le 7e épisode est fatal. La série s'éloigne de plus en plus de l'anime en nous proposant une histoire originale bien que basée sur le passé de Faye pour finir sur la vidéo de Speak like a Child. Et je pense que tout le problème est là.
La série tente le grand écart entre plusieurs envies affichées : donner du fan service aux die-hards, affirmer son style décalé, accrocher le spectateur avec une intrigue de fond plus présente et remplir le cahier des charges inclusif de Netflix.
Elle ne réussit que le dernier point. Jet est interprété par un acteur afro-américain, et c'est plutôt réussi. On rebat les cartes de la représentation en créant des rôles féminins issus de la diversité, c'est bien mais ces rôles servent tous le fil conducteur qui les engloutit dans son ennui. On rapatrie Gren de Jupiter pour en faire un faire valoir dans un bar, pour moi c'est juste flinguer un des premiers persos LGBT que j'ai pu voir à l'écran, qui le temps de deux épisodes jouait les premiers rôles. Enfin Faye choisit d'expérimenter son côté lesbien. Ca aurait pu être un beau pied de nez aux incels qui ont hurlé à la mort quand ils ont vu qu'elle serait plus habillée que dans l'anime. Mais c'est juste lourd et mal amené.
Mais bon chez Netflix et dans la plupart des séries actuelles, ce cahier des charges est présent et plus ou moins bien amené, si la série est bien réalisée, on le voit à peine.
Le problème c'est que le budget semble avoir été réparti de manière assez inégale. Le Bebop est bien fait, les scènes dans l'espace aussi, par contre dès qu'on se retrouve de jour sur une planète, on se retrouve dans un fan movie. On n'y croit pas une seconde. La BO qui donnait un style sacrément cool à l'anime est copiée/collée la plupart du temps. Les nouveaux morceaux sont dans l'esprit, mais fonctionnent moins bien car le reste n'est pas au rendez-vous.
Si John Cho et Mustafa Shakir (Jet et Spike) jouent bien leur personnage, le reste du cast est effroyable et peine à égaler le niveau de jeu d'une série TV moyenne. On rit un peu au début, puis rarement, et enfin plus du tout.
La derniere scène qui m'a fait rire c'est Vicious qui hurle "Feaaaaaaarlessss!" (l'ancien nom de Spike) en mode superintendant Chalmers qui hurle "Skiiiiiinneeeeeeer!". Sauf que c'était censé être le climax d'une fin d'épisode annonçant qu'on allait voir ce qu'on allait voir.
Enfin, à quoi ça sert d'avoir des épisodes de 45 minutes si on a l'impression qu'il se passe moins de chose que dans les épisode de l'anime qui font 25 minutes ?
Qu'on soit clair, je ne fustige pas la série car elle n'est pas 100% fidèle à l'anime, je la fustige car elle n'a pas su s'en éloigner assez. J'aurais aimé qu'elle utilise l'univers et les personnages dans de nouvelles aventures loufoques remplies de personnages secondaires barrés. Le fan service sous forme de référence aurait alors pu fonctionner. Mais Netflix a sans doutes trouvé la recette pour attirer le plus de monde avec les moyens qu'elle possède et notamment des nouveaux venus dont certains se prendront surement d'affection pour l'oeuvre originale.
Il faut savoir voir le noodle cup à moitiée plein...