Le scandale de l'escroquerie sur la taxe carbone, qui a coûté à l'Etat français (donc aux contribuables) des centaines de millions d'Euros, est un sujet désormais bien documenté, et on peut se demander ce qu'une série, a fortiori quand elle fictionne sur des faits aussi forts, peut apporter de plus. Si D'argent et de sang s'avère très vite une belle découverte, une série excitante, c'est grâce au talent de Xavier Giannoli qui livre une série d'épisodes aussi trépidants que riches à tous les niveaux : il y a ici du thriller, de la politique, de la satire sociale, de la comédie de mœurs, du drame, de la réflexion sur le judéité et sur la foi, et encore d'autres choses, qui dépassent le cadre initial de l'enquête. Tout ça est passionnant, superbement mis en scène et filmé, porté par des acteurs épatants : Lindon fait du Lindon, ce qui est toujours bien, Ramzy est formidable et en fait des tonnes sans tomber dans la caricature, et Niels Schneider tient ici le rôle de sa vie, ni plus ni moins.
Alors pourquoi passe-t-on près de l'excellence sérielle sans l'atteindre ? D'abord, mais ce n'est pas illogique dans la mesure où l'enquête - dans la réalité - n'est pas bouclée, parce que la série refuse elle-même de se conclure réellement, ce qui est inévitablement frustrant. Ensuite parce que toute la partie tournant autour de la vie privée de Simon Weynachter, de sa fille droguée, de sa culpabilité vis à vis de sa femme décédée, qu'il a négligée au profit de son job, est aussi banale que contreproductive dans la dynamique de la série. Et enfin, et c'est le problème le plus grave, parce que après une première salve de 6 épisodes pas loin d'être parfaits, Giannoli enchaîne 6 autres épisodes qui semblent redondants, voire répétitifs, et ne conduisent pas à une montée en puissance de l'histoire, telle que le téléspectateur ne peut s'empêcher d'attendre. Nul doute que réduite de 12 à 8 épisodes, D'argent et de sang aurait été encore bien meilleure...
[Critique écrite en 2024]