Si l'on attend de pied ferme le retour d'Alfonso Cuarón dans les salles obscurs, on peut toujours patienter avec cette nouvelle incursion sérielle, plus concluante que son précédent essai sur le medium (Believe). Officiant à la scénarisation ainsi que derrière la caméra, le cinéaste s'entoure d'un casting de renom pour porter à l'écran cette adaptation d'un roman de Renée Knight, sur 7 épisodes. Kevin Kline joue ainsi un senior veuf - pas mal caustique - qui découvre un manuscrit dans les affaires de sa femme décédée des années plut tôt. Cela le mène à rencontrer une auteure (Cate Blanchett) en voie de crise existentielle et conflit perpétuel avec son fils adolescent (Kodi Smit-McPhee). On a également le plaisir de voir Sacha Baron Cohen, à contre emploi, avec ce rôle dramatique de CEO père de famille.
Plusieurs récits et époques s'entrelacent dans cette intrigue où la vérité mue selon le point de vue du protagoniste choisi ; des interventions extradiégétiques appuient alors le moment présent, ou bien se remémorent celui passé, dans l'optique d'élucider les évènements qui provoquent la tragédie familiale orchestrée par Cuarón. Il faut aussi avouer que le réalisateur sait parfaitement capturer les prestations brillantes de ses acteurs, notamment via ses incontournables plans séquence qui traduisent toute la frénésie d'une scène, et en transmettent aussi bien l'intimité que la dramaturgie naturelles. Le Mexicain captive par la beauté de sa mise en scène et son adresse pour s'adapter aux différentes ambiances, de la douceur d'une plage ensoleillée au réconfort d'une maison automnale, à l'oppression des personnages dans leurs verrières urbaines. Le montage - exemplaire - profite d'un excellent sound design et de l'emploi des silences, et convainc en enchevêtrant les compositions Classique dramatiques en une symbiose qui élève les climax.
Cuarón a toujours basé son cinéma sur la puissance des émotions humaines, et elles s'opposent avec brio au gré d'épisodes passionnés et imprévisibles ; notamment ce cinquième chapitre d'une noirceur innommable et d'une maîtrise irréprochable. Le cinéaste mexicain joue ainsi merveilleusement avec les préconceptions du spectateur et met en scène la fragilité des psychés et des liens qui nous unissent d'une façon qui déchire le cœur.