Servi par l'excellente interprétation de Paul Dano et l'interprétation bonne mais sans surprise de Benicio Del Toro, Escape at Danemora est une série d'évasion qui a la qualité de proposer dans le genre une vision véritablement originale.
Sans spoiler précis, cette critique peut vous révéler certains fils du rythme de la série.
Construite d'une bien étrange façon, la série souffre d'un rythme très lent durant les 4 premiers épisodes, ce qui est à la fois dommage et décourageant pour une série de 7 épisodes. Les deux premiers m'ont fait stopper la série pendant un moment. Mais ma curiosité et mon instinct qui me disait que la série avait un véritable potentiel m'ont fait continuer un peu plus loin. Je regrette les longueurs interminables d'évènements n'ayant que peu d'intérêt et un véritable manque sur certains aspects : le plan de l'évasion, leur relation avec les autres détenus, leur vécu au quotidien dans la prison ... Des aspects qui sont abordés, oui, mais survolés, au bénéfice de scènes répétitives sans véritable saveur.
Au cours de l'épisode 3, on commence à voir émerger des fils narratifs intéressants, et à distinguer la direction dans laquelle s'oriente la série. Mais on est pas encore dans le décollage.
C'est lors de l'épisode 4 que l'adrénaline commence à monter. L'épisode propose une vision originale du plan de l'évasion, résumé par une course du personnage de Paul Dano à travers le passage qu'il a crée entre les murs de la prison. Peu de détails, mais une scène très intéressante et originale.
Épisode 5, la tension interne monte, et là, c'est l'évasion. Ne nous le cachons pas, nous sommes loin du stress provoqué par celle de Prison Break. Mais la série veut montrer autre chose, une vision moins spectaculaire au bénéfice d'un réalisme au final bien plus provocateur. Le spectateur est interpellé, s'interroge. Nous attendons la suite, la cavale, mais non ...
A ce moment là, la série trahie l'attente spectatorielle pour prendre un parti pris très intéressant : nous détailler le temps d'un épisode entier les crimes pour lesquels nos deux personnages ont été enfermés, crimes d'une extrême violence et égoïsme. Après avoir appris à connaitre nos gentils prisonniers durant 5 épisodes, c'est une claque qui mettra brutalement fin à toute empathie à leur égard. Mention spéciale pour la longue scène de la nuit de travail du flic, magistrale.
Nous retrouverons nos chers évadés pour un seul épisode de cavale. Un épisode sans fioriture, un parti pris original d'accorder si peu de temps à nos prisonniers pour jouir de leur liberté gagnée (1 épisode sur 7). Un parti pris qui n'est pas sans sens : ils ont passé une éternité en prison, à peaufiner un plan parfait mais qui reposait sur un élément peu fiable et perturbé : Tilly Michell. Dès lors, ils passent dans l'imprévu, pour une cavale avec deux personnages au caractère très différents, qui formeront tout sauf une synergie gagnante. On comprend que leur cavale aura beau être longue, ils n'avanceront que peu, pour arriver à une cinglante conclusion : à quelque détails près, cette évasion aurait pu avoir une conclusion tout à fait différente.
En conclusion, Escape at Danemora est une plongée dans l'Amérique profonde, proposant une vision et une construction originale pouvant décevoir et décourager certains spectateurs habitués aux séries plus conventionnelles et spectaculaires. Mais c'est aussi une série qui propose une plongée psychologique subtile qui ne bascule jamais dans le grossier et le bâclé. Tout du long maitrisée et cohérente, Escape at Danemora a l'énorme qualité d'avoir fait des choix difficiles, mais adaptée à une série inspirée d'une triste histoire réelle.