On se dit qu'il aurait peut-être fallu filmer les pages du livre pour satisfaire les orthodoxes confondant adaptation et photocopiage. Le respect qu'inspire une oeuvre telle que Fondation ne se situe pas dans la transposition visuelle de la moindre virgule, mais dans la capacité à traduire l'écrit à l'écran: une autre langue pour une même histoire. Bien avant le sexe d'un personnage, si tant est qu'on puisse considérer que les robots ont un sexe, voir même un genre, ce qui prime avec une telle épopée, c'est d'en retrouver les contours.
Les contours de l'oeuvre sont tous présents dans cette adaptation et, plus important encore, tracent avec une déconcertante facilité la philosophie qu'Asimov voulait partager avec le lecteur: le libre-arbitre face au destin, l'individu face à la civilisation. Il n'est rien de plus important, car le cycle de Fondation marque beaucoup moins par tel personnage, telle narration, que par le vertige que procurent les enjeux soulevés durant un millénaire, comme un futur résonnant au présent.
De même artistiquement, l'imagination n'avait peut-être pas rêvé de cette manière les vaisseaux spatiaux, les planètes, villes et autres modes vestimentaires. Mais encore une fois, on adhère à l'esprit d'un Empire Galactique aux proportions orgiaques et à la splendeur visuelle rare. On ressent à l'écran le plaisir qui semble avoir présidé au travail des designers et plasticiens, plaisir de partager autant que de créer. Plaisir qui explose dès le générique.
Jusqu'aux acteurs, tels Jared Harris, toujours aussi impeccablement Irlandais, mais surtout Lee Pace, d'une parfaite excellence en Cléon, tout aussi attachant que repoussant, magnanime qu'impitoyable. Le bémol sera plutôt à chercher du côté de Laura Birn, trop en retrait, perdant le côté marionnettiste du Demerzel version écrite. Le bât blesse autant par l'écriture de son personnage que par son jeu un peu trop timoré.
La série en perd à peine de saveur, tant elle est à la hauteur de ce qu'il était autorisé d'espérer. L'ampleur est là, les enjeux gigantesques de la narration également, accompagnés d'une bande originale en forme de cerise et une vision artistique au service de l'écrivain. C'est vrai que cette adaptation ne reprend pas trait pour trait cette bible qu'est le cycle Fondation, il a fallu se l'approprier pour ensuite retrouver l'oeuvre originale dans ce qui caractérise la création audiovisuelle...et c'est une authentique réussite.