Days of our laughs
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Ils parlent d’amour, de sexe et de boulot (où ils semblent rarement aller), affalés pendant des heures sur le canapé du café d’en bas ou ceux de leurs appartements ; vivent quasi en autarcie, famille recomposée qui ne dit pas son nom aux allures de communauté nouveau genre ; partagent le frigo, se balancent des vannes, se font des blagues, se chamaillent, s’adorent et s’amourachent. Ils sont un peu «attardés», souvent immatures, grands adolescents en quête d’engagement tout en ayant peur de celui-ci, pas spécialement affranchis de la vie, plus vraiment jeunes mais pas tout à fait adultes non plus, en pleine application pratique de la règle d’or du célibataire moderne qui, époque et mœurs aidant, prend davantage son temps pour trouver le partenaire idéal que pour vouloir se marier et fonder une famille.
Friends peut, à la limite, se concevoir (et surtout se déguster) comme du bon théâtre de boulevard ultra-contemporain, ironique et très en verve : entre bons mots savoureux et répliques cultes, les portes claquent, les rires fusent et les intrigues farfelues s’enchaînent à un rythme soutenu (l’arc narratif, lors de la saison 5, où Chandler et Monica tentent de garder secrète leur relation est un petit bijou de mécanique comique). Au-delà de l’humour et de la légèreté qui ont fait son succès et sa renommée (mais revue, depuis, à l’aune des sensibilités d’aujourd’hui), Friends évoque également quelques thèmes plus délicats (divorce, stérilité, chômage…) avec, toujours, une sorte de détachement qui fait qu’il vaut mieux essayer d’en rire plutôt que d’être obligé d’en pleurer. Quitte à choisir, Friends préfère jouer sur les deux tableaux en nous faisant pleurer de rire.
Et parce que le rire est bien le ressort principal de la série (oui, bon, et l’amitié aussi, bien sûr), son âme, son essence. Un rire réglé au millimètre près et que l’on retrouve partout, des innombrables situations burlesques jusqu’aux mimiques et expressions des personnage (et acteurs) à l’alchimie imparable. Car comment, comment ne pas oublier l’inénarrable Janice et son horripilant phrasé nasal, l’ironie constante de Chandler et ses piques sarcastiques, la folie de Phoebe et son tube interplanétaire Smelly cat, les «How you doin’?» de Joey, les «I know!» de Monica, le «PIVOT!» de Ross (dans la scène mémorable du canapé à monter dans l’escalier) ou sa pitoyable technique de l’unagi, ou le désormais célèbre «Oh my God!», réplique du siècle s’il en est qui aura été prononcée entre 1 031 et 1 069 fois (il y a débat) en 236 épisodes.
Et s’il y a un épisode à voir et à revoir (et à revoir encore), c’est bien le 14e de la saison 5 où la liaison de Chandler et Monica est enfin révélée au grand jour. Entre une Phoebe et une Rachel déchaînées, un Joey subissant leurs manigances et un Ross cherchant à amadouer the ugly naked guy pour récupérer son appartement, nos deux tourtereaux ont fort à faire pour préserver leur secret. Cet épisode regorge de séquences d’anthologie : Phoebe découvrant le pot aux roses et hurlant à la mort («My eyes! My eyes!») ou draguant Chandler au Central Perk dans un irrésistible numéro de séduction, Ross et ses mini-muffins, Joey perdu dans les affres de la rhétorique («Ils ne savent pas qu’on sait qu’ils savent qu’on sait») et Chandler tout aussi perdu face au décolleté de Phoebe. L’inventaire, si inventaire il y avait à faire, des moments les plus drôles et les plus fous au fil des dix saisons est interminable, mais ce qui, finalement, compte le plus, c’est que les six amis New Yorkais sont devenus, avec le temps, un peu (beaucoup) les nôtres. Et leur intimité un refuge. Presque un miroir.
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Créée
le 1 nov. 2023
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