Des fois je fais de mauvais choix concernant les séries qui m'intéressent. Des fois je me fais des films sur une future nouvelle série, au point où j'en récolte la moindre information afin d'étancher ma soif et réprimer mon attente. Et le problème c'est que souvent, quand j'attends énormément une série, il s'avère qu'elle n'est que très moyenne. Au final si je regarde bien, mes séries préférées sont celles que j'ai découvertes un peu "comme ça", dont j'ai pris connaissance de son existance maximum un mois avant sa sortie. Et cette année, dans ce flot juste indigeste des nouvelles séries de 2011, il y a un nom qui a retenu mon attention il y a quelques temps, une série qui m'a fait me dire "Ah, j'en avais pas entendu parler, ça a l'air cool"... Et ça s'appelle Homeland.
Carrie Mathison est un agent de la CIA qui n'a qu'une obsession, empêcher par tous les moyens qui lui sont alloués un nouveau 11 septembre 2001. Dans la poussière de l'Irak, elle arrive à obtenir une information cruciale sur une hypothétique attaque terroriste sur le sol américain : Un soldat américain aurait changé de camp. 10 mois plus tard, elle apprend la libération miraculeuse en Afghanistan d'un soldat américain, retenu prisonnier et présumé mort depuis 8 ans. Ce soldat, Nicholas Brody, a été retenu prisonnier par des membres d'Abu Nazir, le même terroriste soupçonné par Mathison de planifier un futur attentat. Pour la belle agent de la C.I.A, la relation est claire : Nicholas Brody pourrait être le fameux traître...
Lorsqu'on suit Homeland, il ne faut surtout pas s'attendre à voir une enquête anti-terroriste du calibre d'un 24 heures Chrono. Non, là on parle sérieusement les gars, on reste ancré dans un sujet hyperréaliste, avec une procédure lente et complexe, des limitations techniques frustrantes, des agents qui ont des vies privées... Homeland c'est ça, c'est un sujet puissant, nous plongeant en plein complot terroriste, thriller paranoïaque dans les arcanes de la sécurité nationale, mais qui privilégie une vision intimiste de son sujet. D'un côté vous avez Brody, héros de la Nation qui retrouve sa famille après huit années de captivité, qui doit réapprendre à dormir dans un lit, à faire l'amour à sa femme, à retourner à son ancien mode de vie donc; et de l'autre vous avez Carrie, l'agent de la CIA nevrosée, vivant dans un appart qui lui sert plus de deuxième bureau, qui n'a jamais le temps de prendre une douche, au point qu'entre deux réunions elle se passe un gant de toilette sur le sexe (j'ai halluciné sur cette scène). Mais derrière cette silhouette de tarée de son boulot, il reste néanmoins une jeune femme talentueuse mais profondément asociale, qui reste malgré tout attachée à sa petite famille (soeurs, père, nièces..). Et ce qu'on reprochait à des séries comme 24, à savoir que Jack Bauer n'a pris qu'un petit déjeuner en huit saisons, n'est jamais allé faire caca... s'envole devant le réalisme et la crédibilité de Homeland, et si j'en parle c'est que les deux séries ont le même producteur/scénariste: Howard Gordon. Intéressant de voir que Gordon nous propose un autre visage d'un même sujet, et même si on retrouve de temps à autres certaines similitudes entre les deux shows, le simple fait de nous plonger dans l'intimité des deux parties, fait qu'on assiste à une histoire totalement différente.
Ce qui ressort lorsqu'on regarde Homeland, c'est le doute. On doute des intentions de chacun, des théories de Carrie comme des propos de Brody. Et lorsque ces deux personnages se rencontrent et parlent, on reste scotché à leurs mots, ne voulant rien rater tant on ne sait pas à qui faire confiance. Un sentiment génial, puisqu'on veut à tout prix avoir une nouvelle piste, quelque chose qui alimenterait notre suspicion, ou qui nous plonge encore plus dans le doute. De plus, grâce aux différents personnages secondaires, on reste sans arrêt dans une profonde nuance de gris, où finalement on nous fait suivre un homme qui pourrait être un dangereux terroriste, et une femme qui pourrait dépasser de loin les limites de son obsession. C'est dingue de se dire qu'on se raccroche aux personnages secondaires pour essayer de ne pas perdre notre propre santé mentale si j'ose dire; puisque grâce à la famille de Brody, et aux collègues de Carrie, on nous propose une vision extérieure qui nous permet de ne pas se retrouver à croire deux choses totalement opposées pour un mindfuck impossible à digérer.
Le risque dans ce genre de série est de laisser planer un doute un peu trop vaporeux, et de nous tenir la jambe pendant des heures en ne nous racontant rien d'intéressant, tout en nous gavant de scènes intimes qui perdraient de leur saveur. Et c'est là qu'on voit qu'Homeland a de beaux arguments, c'est que l'histoire passe les étapes sans fioriture, elle nous abreuve à un rythme parfait d'informations essentielles qui nous rendent de plus en plus gourmands. Quand je vois que pour l'instant la série n'est prévue que pour une seule saison de 12 épisodes, je me dis qu'effectivement, j'aurais du mal à comprendre comment elle pourrait durer, tant les choix sont burnés, irréversibles, et tellement excitants !
Techniquement, la série jouit d'une réal' de qualité dans les choix de cadrages, de mise en scène... Je veux dire ça faisait longtemps que je n'avais pas vu une série qui ne fasse pas "série". Pendant un moment le niveau avait grimpé très haut, proposant des réalisations classes et intenses, et après on était revenu à des plans mal fichus, statiques, mal mis en scène... Là ce n'est pas le cas, pas du tout. Et pour servir ces images, rien de mieux qu'un excellent casting plein de talent. Je ne cesserai de revendiquer mon amour pour Mandy Patinkin, qui incarnait à lui-seul la série Esprits Criminels, et dont le départ avait à mon sens tué la série. Il y tient un second rôle puissant, plein de discrétion et de pouvoir implicite. Le genre de vieux sage qui parle doucement mais qui pourrait détruire le monde sur un claquement de doigts. Avec lui il y a évidemment le duo Claire Danes et Damian Lewis, la première étant l'héroine de Stardust et le deuxième celui de Band of Brothers et Life. Ils sont tous deux connectés à la même histoire, sans jamais se voir, et les rares fois où ça arrive, l'ambiance est électrique tant par le scénario que par la qualité du jeu. Pour finir, mention spéciale à Morena Baccarin, la femme de ma vie qui avait gâté Firefly de sa présence. Ici on va encore plus loin puisqu'elle nous offre sa nudité et sa fragilité, sans doute son plus grand rôle à la télé (non parce que dans V... voilà quoi).
Et c'est là que je me retourne et me fait un rapide état des lieux... Non, il n'y a rien à jeter, c'est juste exemplaire. Homeland est une des meilleures nouvelles séries 2011, pour l'instant dans mon Top3, limite à la première place. Je suis totalement plongé dans la série de Gordon, je suis avec passion le destin de Brody et de Carrie, me demandant si ça pourrait ne pas finir en bain de sang... La série a décidé d'être radicale, de ne pas promettre quelque chose qu'elle ne tiendra pas.. Elle promet un truc badass, et elle le fait avant la fin de l'épisode, cash ! Quand tu regardes Homeland, tu essayes de comprendre la psychologie des personnages, pour ne pas être choqué de voir ce que tu vas voir 20 minutes après. C'est tellement supérieur à ce qu'on nous a proposé depuis un mois, que ce soit en terme d'intensité ou de narration... Bravo Gordon, franchement Bravo.
Regardez cette série ! Je vous en supplie, regardez cette série ! C'est vrai, c'est lent, c'est courageux, c'est bien joué, bien filmé, c'est LA bonne pioche de cette rentrée tv 2011 ! Oubliez le pognon de Terra Nova ou les noms de Person of Interest, S'il ne fallait retenir qu'une seule série parmi tous ces nouveaux lancements, moi je retiens Homeland. Vous allez être littéralement happés par cette histoire, vous allez vouloir faire confiance à vos personnages, vous ne voudrez pas croire ce que vous allez voir, vous allez vous poser deux secondes et vous faire la même reflexion que moi : Depuis quand une série avait eu autant de culot ? Homeland ne va pas vous montrer des scènes gratuites de sexe explicites, ni vous offrir des bains de sang bien glauques.. Homeland ça va vous interpeller, ça va vous captiver, ça vous vous faire peur de ce que vous pourriez découvrir. Homeland, c'est mon coup de coeur.