Une des meilleures découvertes en termes de séries récentes en ce qui me concerne. Facile. Les noms de David Fincher et Kevin Spacey parlent d'eux-mêmes, House Of Cards se targue d'un cachet cinématographique de première classe.
Si Fincher ne réalise que les deux premiers épisodes, on reconnaîtra sur l'ensemble de la saison sa charte visuelle: une mise en scène efficace au service des acteurs et de leurs performances, une photographie somptueuse, un soin maniaque pour le moindre détail.
Mais avant tout, House Of Cards, c'est l'ogre Kevin Spacey, tétanisant dans son incarnation d'un Richard III moderne, qui aurait cette fois pris le Congrès américain comme théâtre. Il y a une dimension Shakespearienne assumée dans le personnage de Frank Underwood, rongé jusqu'à la moelle par la rancœur, le pouvoir, la vengeance. Prêt à tout pour arriver à ses fins, l'homme devrait être détestable, il est irrésistible.
Grâce au jeu de Kevin Spacey. Grâce à l'écriture éblouissante. Grâce aux apartés théâtrales confiés à un spectateur interloqué mais conquis. Briser le quatrième mur ainsi est osé mais fonctionne redoutablement et découle d'une logique simple: renforcer le lien avec le spectateur, tester jusqu'au bout sa capacité d'attraction/répulsion.
Impossible de ne pas se régaler devant ce machiavel surdoué qui nous explique comment contrôler les rouages de la machine politique. Impossible de ne pas trembler devant l'ampleur abyssale de son cynisme.
Car voyez-vous, Frank Underwood n'a pas grand chose à envier au Walter White de Breaking Bad.
Si l'intrigue se concentre également sur Claire, la femme de Frank, la journaliste Zoe Barnes, l'homme politique en manque de redemption Peter Russo, les enjeux restent les mêmes: la conquête du pouvoir, apprendre les rêgles du jeu pour mieux les contourner, la corruption inexorable des idéaux et de l'innocence. Et quand un cancer sur pattes aussi coriace que Frank Underwood est dans la partie, difficile de tirer son épingle du jeu. Gare à la chute.
Après un début qui dépote sévère, la série sait maintenir son cap, le rythme est peut-être moins éblouissant mais l'histoire se révèle complexe, bien addictive et creuse plus que jamais des personnages fascinants et denses.
Les personnages féminins sont, c'est appréciable, plus étoffés que la moyenne.
Claire Underwood (magnifique Robin Wright) tient ainsi les rênes d'un couple détonnant, elle n'est pas effacée dans l'ombre de son mari mais son égale. Underwood l'aime, "comme les requins aiment le sang". Ensembles ils s'avouent tout, peu importe les infidélités du moment, seul compte le trône à conquérir. La fin justifie les moyens.
L'écriture impressionne constamment par sa précision, son efficacité et sa subtilité. Si les arcs narratifs sont globalement traités et résolus, la fin en pointillés ne nous fait que plus attendre une deuxième saison qu'on espère fracassante.