N'espérez rien lui cacher: il sait déjà tout de vous...
Créée et produite par Michael Seitzman (Here on Earth, North Country…), Intelligence est une série canadienne d’action et de science fiction au léger parfum de l’Homme qui valait 3 milliards, de Jake 2.0 et de Chuck. La série a débuté le 7 janvier sur CBS et quatre épisodes ont déjà été diffusés.
Intelligence, c’est un peu la série hybride entre l’Homme qui valait 3 milliards, Jake 2.0 et Chuck… mais ça se prend vraiment trop au sérieux là où les trois autres étaient bourrées d’humour et mettaient l’accent sur le côté humain – et donc faillible – du personnage principal.
Josh Holloway (Lost, Mission Impossible: Ghost Protocol…) fait son retour à la télévision dans la peu d’un agent vraiment très spécial, dans la tête duquel une agence gouvernementale a fait implanter un petit bijou de haute technologie qui lui permet de se connecter à peu près à tout, pour la gloire des Etats-Unis et le plus grand bonheur de ses patrons. Mais une telle merveille technologique n’est pas sans danger, principalement parce que cette puce est unique et que d’autres gouvernements aimeraient bien mettre la main dessus ou la copier pour eux aussi posséder aussi un agent surpuissant et omniscient…
Dans le rôle de la patronne de Gabriel, on retrouve l’immuable Marg Helgenberger (les Experts, M. Brooks…), chargée de prendre les bonnes décisions concernant les membres de son agence et plus particulièrement concernant Gabriel. Pour le protéger, elle engage Riley Neal (Meghan Ory), ancien agent ayant assuré la sécurité du Président, connue pour avoir réglé leur compte à cinq hommes à mains nues après avoir pris plusieurs coups de couteau… Et voilà pour les jalons de l’histoire !
S’il a plutôt une tête sympathique et qui peut inciter à lui faire confiance, Gabriel est tout sauf rassurant. Il sait tout sur vous parce qu’il peut accéder à tous les réseaux, à vos mails, à votre téléphone… bref, vous ne pouvez rien lui cacher. Cette impression d’être mis à nu en permanence, Riley en fait très rapidement l’expérience lorsqu’elle rencontre pour la première fois son partenaire, et cette scène a quelque chose de réellement glauque puisqu’au lieu d’une scène de présentation et d’échange « normal », Gabriel se contente de débiter presque mécaniquement tout ce qu’il a trouvé sur la jeune femme… Pour construire une relation durable basée sur la confiance, le viol de la vie privée est à éviter.
Ajoutez à cela le fait que Gabriel n’en fasse très souvent qu’à sa tête, n’ait rien à carrer des ordres ou perde toute notion du danger ou sens critique dès qu’il est question de sa femme disparue, ex-agent secret soupçonné d’être passé à l’ennemi… et le ton est donné ! Dans chaque épisode, son supercalculateur est mis à contribution, et l’agent technologiquement amélioré dévoile trop peu de faiblesses pour que l’on croit vraiment cette histoire plausible à 100%. Parce que clairemet, avoir accès à autant de données en permenanence et ne jamais se sentir submergé, ne jamais perdre le contrôle, ne jamais se tromper ou mal interpréter quelque chose… non. Gabriel sait tout, sait tout faire (il se bat bien, tire bien, a des abdos mieux que les miens…) mais perd – de mon point de vue – en crédibilité à chaque nouvelle action accomplie.
J’aime beaucoup Meghan Ory (Supernatural, Once Upon a Time…), notamment parce qu’elle peut tantôt jouer la fragilité et la force de caractère avec un talent égal et sans tomber dans le gros cliché. Le rôle de Riley aurait pu lui permettre de jouer ces deux cartes à la fois, mais les scénaristes en ont décidé autrement et ont fait d’elle une potiche destinée à mettre en valeur le personnage de Gabriel.
Vous avez retenu plus haut que la jeune femme bottait régulièrement des culs entre le lever et le petit déjeuner ? C’était vrai. Seulement, Gabriel est meilleur qu’elle. Pour absolument tout, et notamment pour se protéger lui-même. Attention, je parle toujours de Riley, cet agent exemplaire qui a assuré avec brio la sécurité du Président des Etats-Unis… mais oubliez-là, Gabriel est 100 fois meilleur qu’elle (et c’est un euphémisme).
J’ai trouvé le traitement du personnage de Riley – l’un des seuls personnages féminins de la série, d’ailleurs – absolument déplorable. C’est un peu comme si elle ne servait que pour une question de quota en plus de n’être qu’une future conquête potentielle pour Gabriel, comme c’est le cas dans tant de mauvaises séries où l’élément féminin ne sert que de faire-valoir. Riley, c’est l’élément féminin brillant qui est tellement brillant qu’on l’intègre à une équipe essentiellement masculine, un peu comme s’il était véritablement rare qu’une femme puisse être brillante, ou même – je vais pousser le raisonnement jusqu’au bout – soit aussi brillante qu’un homme.
Parce que c’est bien ça, le problème d’Intelligence: Riley est censée être brillante et assurer la protection de Gabriel, c’est quand même assez souvent Gabriel qui lui sauve les miches avec nonchalance et sans aucune aide extérieure. Et Riley passe du statut d’agent d’élite super efficace à celui de potiche en quelques secondes; statut qui semble universellement réservé aux femmes dans les séries et films d’action, comme si c’était devenu l’élément obligatoire pour faire recette. Et clairement: j’en ai marre de voir ça à la télé. Alors pour se disculper et éviter d’être taxés de sexisme, il y a bien sûr le personnage de Lilian qui représente l’autorité et la droiture à l’état pur, et qui mène son équipe à la baguette ET d’une poigne de fer. Une femme est donc soit un personnage faible duquel il faut sauver la vie, soit une dominatrice. On n’arrête pas le progrès…
Le verdict ? Malgré la montée de bile des paragraphes précédents, j’apprécie tout de même Intelligence. Ce n’est sans doute pas une série qui bénéficiera d’une longévité incroyable, mais elle fera son bout de chemin. J’espère juste que la série bénéficiera d’un bon coup de dépoussiérage et nous épargnera les clichés classiques des séries d’action – femme en détresse, héros parfait… – pour vraiment exploiter le matériel mis à disposition par les créateurs de la série.
J’avais décidé de laisser Intelligence de côté après son troisième épisode, préférant me pencher sur des séries peut-être un peu moins poussives et un peu plus originales. Mais en fait… sans vraiment me passionner, Intelligence m’intrigue un peu parce que j’ai vraiment envie de savoir où les scénaristes veulent en venir. J’espère réussir à passer au-delà de ce que le tandem bancal de protagonistes de la série m’inspire…