À première vue, Jekyll fait un peu brouillon. Le premier épisode est même un peu long à la détente. D'accord, on plante le décor, d'accord on explique l'organisation générale de Tom Hyde, on montre le quotidien de l'un et de l'autre, mais c'est tout de même un peu mou et sans grand intérêt...
Mais voilà, Jekyll est signé Steven Moffat, et rien que cela, ça pousse à un peu plus de curiosité. Curiosité, je dois le dire, on ne peut plus récompensée dans les épisodes suivants, spécialement les trois derniers.
Tout d'abord, l'histoire. Le scénario est relativement bien ficelé malgré un ou deux petits détails qui m'ont dérangés. Faire toute une série, même de 6 épisodes seulement, sur la double vie du héros aurait put être une bonne idée, mais un peu trop prévisible. Ici, on nous embrouille, on nous fait cogiter, réfléchir avec le(s) personnage(s), imaginer ce qui se trame non seulement autour du dédoublement de personnalité, mais aussi autour du duo.
Et cette histoire au dessus de l'histoire permet une réelle progression des personnages de Nesbitt, offrant des stimuli suffisamment forts pour permettre à l'un comme à l'autre d'évoluer et de se dévoiler. Cela permet également de mieux comprendre qui est l'un et ce qu'est l'autre. Le bien d'un côté, le mal de l'autre ? On ne sombre pas ici dans la simplicité et l'analyse va plus loin. Pulsions primaires, ça en plein air, mais aussi bien d'autres choses auxquelles on ne pense pas nécessairement lorsque l'on se trouve face à ce type de clivage.
Passons ensuite à l'acteur principal.
Je le savais en commençant à regarder cette série en VF qu'il s'agissait là d'une mauvaise idée, et qu'il vaudrait mieux attendre. Mais les circonstances étant contre moi, j'ai cédé. Et je le regrette.
Car Nesbitt est absolument éblouissant (et le doublage franchement correct). Passer du gentil médecin au psychopathe était un rôle dangereux, mais l'acteur s'en sort très bien et est à la fois touchant de désarrois et de douceur et effrayant. Les changements de caractères se font en délicatesse et non grossièrement, caricaturalement comme on aurait pu le craindre, donnant l'impression d'avoir deux acteurs pour le prix d'un. Ah, vivement la VO pour savourer la performance dans son entièreté...
Pour ce qui est du rythme et de la mise en scène, il n'y a pas grand chose à redire. Évidemment, les scènes les plus intéressantes restent celles où Tom est confronté au temps et aux transformations inopinées, à ses craintes pour sa famille, à sa détresse. Toutefois, la deuxième partie de la série apporte également son lot de suspens et de secousses lors des confrontations de Tom, Hyde et de leur femme.
Le spectateur n'est pas noyé dans l'action, asphyxié par les révélations coulant en torrent, mais dispose de moments plus calmes pour reprendre son souffle et se préparer à la suite, prévisible ou non.
Le dernier épisode est quant à lui vraiment bien pensé, avec rebondissements et vrais petits plaisirs, sans tomber dans le larmoyant ni dans le houpi-youra. Personnellement, c'est tout ce que j'aime.
Passons maintenant aux points m'ayant chiffonnés.
Déjà, le désordre des deux premiers épisodes. Pourquoi ne pas mettre directement la confrontation de Hyde avec son assistante au début par exemple ?
De plus, comment la vilaine méchante est elle arrivée à la tête de sa super organisation secrète ?
À quoi servent certains personnages ? À brouiller les pistes ?
Idem pour certaines "ignorances" des méchants au sujet de Hyde (notamment sur la nature de sa maladie).
Et surtout, la relation de la famille Jackman avec Jekyll et Hyde. Il est dommage que les différences physiques ne soient pas davantage accentuées (d'une manière ou d'une autre) dans ces cas là... Car le coup du "vous ressemblez à mon mari", c'est un peu gros... C'est qu'elle à l'oeil la poulette, pour voir que son mari n'est pas son mari en deux secondes...
Néanmoins, si l'on passe sur ces petits détails et que l'on s'accorde avec la version donnée par Stevenson (le zapping de certains détails, comme sa force supernaturel), la série vaut vraiment le coup d'oeil et me donne franchement envie de corriger le fait de n'avoir jamais lu le bouquin.
À voir en VO de préférence, même si Nesbitt est bien doublé, pour plus de plaisir ^^