Even if not pushing means I'll be pushed myself... I will never push !!!
Kaiji, un anime qui à l’instar de Death Note aborde certaines questions fondamentales, psychologiques peut-être, mais pas que. Là où Death Note s’interrogeait sur la propension des hommes à prendre la place de Dieu, Kaiji se questionne quant à lui sur l’essence même de ce qui définit un être humain. Les deux œuvres, étrangement, affichent ainsi une parfaite complémentarité qui de surcroît permettent avec cohérence et logique d’être visionnées l’une à la suite de l’autre (Kaiji puis Death Note donc).
Je ne perdrai pas mon temps sur la partie technique, qui trouvera ses détracteurs et ses adeptes. Soyons francs, c’est loin d’être le plus important dans le cas présent. Toutefois, il est intéressant de dénoter tout au long des deux saisons l’antinomisme entre la dureté du récit et le chara-design (le dessin des personnages) singulier.
La première chose qui vous surprendra c’est l’omniprésence du monde du jeu, plus particulièrement du jeu de hasard qui pullule dans cet univers perverti par la mafia et la pauvreté. Il serait pourtant idiot de penser que ce contexte fait toute l’originalité de cet anime et qu’il en devient déterminant. Ça n’a pour ainsi dire aucune importance par rapport au propos même de l’auteur. Le « hasard » n’étant là que pour surligner son absence dans ces instants où les gens, lorsque la tension est à son paroxysme, montrent leurs vrais visages. Malheureusement, on s’aperçoit que dans les situations de crise ce sont généralement leurs pires facettes qu’ils révèlent. Personne n’est épargné, aussi bien les hommes d’influence avides de pouvoir et de sensations fortes que les petites gens attirées par l’argent « facile » nécessaire à leurs survies…
Toutes ses situations sont montrées avec un tel réalisme que leurs côtés malsains et écœurants s’en voient décuplés. Regarder Kaiji n’est pas divertissant, encore moins amusant. Il n’a ni cette prétention, ni cette intention. Regarder Kaiji, c’est avant tout avoir un regard neutre, sans faux-semblant, sur notre monde corrompu où les gens n’ont plus de scrupules et sont prêts à tout pour satisfaire leurs besoins inassouvis, allant même jusqu’à renoncer à leur humanité.
Je me dois donc de vous mettre en garde si vous vous décidez à commencer le visionnage de cet anime. Certains passages exhibent une telle violence morale et émotionnelle qu'ils en deviennent intenables. A moins que vous soyez insensible, il n'est pas exclu que le malaise qui transpire de toute part s’insinue en vous pour qu’à votre tour vous en soyez ébranlé, comme s’il vous mettait devant vos propres faiblesses. Regarder Kaiji, c’est aussi se tenir face à un miroir qui reflète toutes nos imperfections. Et que dire, si ce n’est que le spectacle n’est guère reluisant…
Et c’est à ce moment que la véritable nature d'Itou Kaiji jaillit de cette obscurité étouffante !
Kaiji, glandeur endurci et loser invétéré duquel tout avenir radieux est proscrit, consterné par l’horreur de ses congénères, touché en plein cœur par la misère ambiante, réagit.
Réagir est une chose, mais avoir une réaction ardemment motivée par l’espoir qu’au fond tous les hommes ont en eux cette part de bonté et de bienveillance qui méritent qu’on se batte pour elle fait toute la différence.
Kaiji est le personnage de l’animation japonaise le plus touchant qu’il m’ait été donné de rencontrer. Comme beaucoup le disent, il est vrai qu’il symbolise l’archétype même de l’anti héro, mais il ne faut pas se méprendre, ce n’est pas un héros malgré lui. Tous les miracles qu’il accomplit alors que tout semble être joué d’avance, toute la ferveur qui succède aux pleurs et aux lamentations chez ses camarades de galère grâce à son abnégation sans faille et à ses plans si phénoménaux qu’aucun n’aurait pu imaginer qu’il en soit capable, tout ceci, j'en suis convaincu, n’est pas le fruit du hasard. En s’oubliant pour le salut de ses semblables, en faisant tout pour préserver son humanité, il parvient à puisé du plus profond de lui-même cette capacité à surpasser toutes les difficultés, tous les obstacles se dressant devant lui.
Merci Kaiji, merci de m’avoir confirmé que dans l’homme perdu et le sempiternel perdant que je voyais en moi sommeillait quelqu'un de meilleur, un combattant qui n’attendait que de lutter contre ses propres démons; pour déjà expier les fautes de sa vie galvaudée et ensuite…ensuite on verra. Cette œuvre s’adresse principalement aux laissés pour compte, à ceux qui pensent que la vie ne leurs a jamais fait de cadeaux, à ceux qui se sentent exclus.
Elle nous dit que nous sommes responsables de ce que nous sommes devenus, de chacune de nos mésaventures. Elles ne sont pas obligatoirement un coup du mauvais sort, loin s’en faut, mais souvent la conséquence de nos négligences. Devant ces vérités que nous avons bien du mal à admettre, il est fort probable qu'aucun ne soit épargné, tôt ou tard... le plus tôt sera le mieux.
Le constat n’est pas tendre avec nous autres, éternelles victimes condamnées à s’apitoyer sur leurs propres sorts, mais pouvait-il en être autrement ?
Encore si la fatalité de nos conditions était avérée, je comprendrais, mais il n’en est rien. En effet, dans l'absolu Kaiji n'est pas une exception en soit et rien ne saurait nous empêcher de faire de même en fonction de nos problématiques respectives. Comme dit le célèbre proverbe : "Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir" !
Alors soit, d’un autre côté certains hommes, qui n’ont d’être humain que le nom, sont sans moral et sans état d’âme. Cependant, est-ce une raison devant l’ignominie de quelques-uns de se contenter de la médiocrité qui nous fait souffrir et paradoxalement dans laquelle nous nous complaisons ?
Qui que nous soyons, quoi que nous fassions, par toutes les leçons d’humanité que dispense Kaiji, on en vient à comprendre que si les choses autours de nous s’enfoncent inexorablement vers un merdier sans nom, c’est aussi notre responsabilité et donc notre devoir d’au moins nettoyer le nôtre qui surabonde par sa pestiférence, à tel point qu’il risque de déborder chez le voisin, si ce n’est déjà le cas...
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