Ceci n'est pas une critique à proprement parlé mais plutôt une des multiples interprétations et thématiques que l'on peut puiser de cette magistrale série.
"Bonjour chez vous"
C'est sans aucun doute la réplique culte de la série Le Prisonnier, réalisée, écrite (en partie), jouée par feu Patrick McGoohan alias Numéro 6. Cette réplique est la libre interprétation de l'équivalente anglaise « Be seeing you », intraduisible littéralement, les interprètes ont pourtant réussi à trouver un sens encore plus profond à l'originale malgré eux.
Dans quelle mesure, par conséquence, une expression aussi insignifiante, peut-elle jouir d'une telle valeur intrinsèque au sein de la série ?
Cette réplique si bénigne tire en effet toute sa force du contexte dans laquelle elle est utilisée à si bon escient au cours des pérégrinations de numéro 6 ; ce contexte est Le Village.
Le Village est une prison où chaque habitant peut vivre et pratiquer les mêmes activités que n'importe quelle personne de notre monde connu, à la différence qu'il n'est pas identifié par son nom mais par un numéro. Il travaille, fait ses courses, entretien sa demeure etc... et fréquente ses concitoyens dans le but de s'épanouir au sein d'une communauté heureuse. Pour cela il doit néanmoins se conformer aux lois, aux valeurs et aux idéaux que leurs élus ont décrétés. Cela vous rappellera sûrement le concept de démocratie. Tout semble donc parfaitement harmonieux au sein de ce microcosme et rejoint donc la pensée de la recherche du bonheur individuel par celui de tous.
Par conséquent, il est d'autant plus étrange que la réplique s'adresse précisément à la personne en tant que telle. Comment ce paradoxe peut-il demeurer au sein d'une société macro sociale comme celle-ci ?
La réponse est malheureusement d'une logique implacable. Au sein de cette société et par extension la nôtre, « Bonjour chez vous » est en effet destiné au citoyen « X », mais cet individu conformé à œuvrer dans l'intérêt du bien commun, respectant les règles qu'on lui dicte, en a donc perdu son individualité. L'autre citoyen en saluant « X » par son interjection transmet au final ses amitiés à la communauté dans sa globalité, c'est par elle que son foyer est dorénavant caractérisé. L'individu est mort, il ne reste plus que Le Village. Il est maintenant aisé de faire l'analogie avec notre société de consommation et soit-disante "démocratique".
Je ne dirai rien de plus de peur de vous gâcher l'incommensurable plaisir que vous aurez à profiter ce chef d'œuvre.
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