Cette critique porte sur l'entièreté de la série

Si nous décidons de mettre à part la dernière moitié de l'ultime saison, L'Attaque des Titans se classe aisément aux côtés des plus grands.

Une claque monumentale, un vrai sans faute ! Qu'est-ce qui fait que le Shônen d'Hajime Isayama frôle à plusieurs reprises la perfection ? La création d'un récit empreint de mysticisme et aux personnages au destin incertain. Ajoutez à cela une animation somptueuse et vous tenez là un petit bijou télévisuel.

SNK commence par une première saison plutôt "sobre", tout du moins en ce qui concerne sa narration, que l'on pourrait facilement résumer en une seule phrase : une cité entourée de murs gigantesques est attaquée subitement par une horde de titans, entraînant la perte de la mère du protagoniste principal, poussant par conséquent celui-ci a se lancer dans une quête de vengeance en s'engageant dans l'armée. Malgré cette sobriété et ce classicisme apparents du récit, cette première mise en bouche d'une vingtaine d'épisodes marche en réalité divinement bien et tire son épingle du jeu par rapport aux autres productions analogues. D'abord il y a la découverte terrifiante des titans, sorte de bêtes humanoïdes totalement déshumanisées, suivie de la mort de personnages clés. Tout cela est ponctué par une atmosphère sombre et une DA pesante. Rarement un anime n'a paru aussi violent et mature à l'écran. Puis, vient la découverte de l'armée et du bataillon d'exploration dirigé par des figures ô combien charismatiques et atypiques que sont le caporal Livaï Ackerman et le major Erwin Smith. Tout s'enchaîne limpidement, fluidement. Les musiques accompagnent aussi bien les moments de drames que d'actions, elles sont purement magistrales. Que dire de plus, si ce n'est que cette première saison constitue le pilote parfait, duquel tout animé ou série devraient prendre exemple.

La seconde saison, composée seulement d'une dizaine d'épisodes, a, quant à elle, la tâche essentielle de complexifier l'intrigue générale de l'œuvre, tout en se plaçant dans sa continuité. Le spectateur commence progressivement, à ce moment-là, à spéculer et à se poser un certain nombre de questions. Quelque chose ne tourne pas rond dans cette intrigue. Certains personnages disent des choses pour le moins énigmatiques et se meuvent de manière peu vraisemblable. Ces interrogations dont il est question s'accompagnent finalement d'un "on verra bien", signe que les clés du récit ne sont pas encore en sa possession. Les épisodes s'enchaînent jusqu'à ce fameux épisode 7. Rapidement, les craintes du spectateur se confirment, lors d'un twist emblématique de la saga.

Arrive alors cette troisième saison, celle qui alla tout chambouler. La première partie reste assez anecdotique bien qu'assez plaisante à visionner. Mais tout l'intérêt de celle-ci résulte, sans l'ombre d'un doute, dans sa seconde partie riche en actions et en révélations. D'abord, il y a cet assaut du mur de Shiganshina de cinq épisodes, qui n'a qu'un unique but, celui d'en mettre plein les mirettes. Tous les éléments du blockbuster d'action bien aseptisé y sont réunis afin de flatter l'égo du spectateur et de faire plaisir à ses sens. Je dois l'admettre, je me suis pris au jeu comme tout le monde, ça ma fait mal, j'ai fermé mon clape-merde de cinéphile chiant et j'ai contemplé le spectacle qui défilait sous mes yeux. Je n'en suis pas déçu. J'ai rarement vu une telle intensité. Ensuite, il y a ce retournement de situation, ce fameux twist qui change toute la série, celui du "non-retour" :

la découverte d'une civilisation en dehors des murs, mais une civilisation hostile à celle présente au sein de l'île de Paradis.

La série se concentrera désormais non pas sur l'extérieur des murs comme dans la saison 2 et 3, mais bien sur ce qu'il y a après la mer. Vient finalement cet échange de regards glaçant et déshumanisé entre Eren et Armin lors de la brève altercation avec Frock Vorster, venant symboliser la perte de tout optimisme et de tout idéaux, malgré la victoire face au titan Bestial. La saison se termine sur la mer, un état de flot qui vient parfaitement refléter l'état mental d'Eren, complètement déboussolé et déçu par ce qu'il a appris à Shiganshina. Le spectateur se trouve finalement dans la même situation que le personnage principal : que va devenir la série après cette découverte ?

Avec ce triptyque mené d'une main de maître, on avait tout pour faire un chef-d'œuvre, il manquait plus qu'une seule chose, peut être la plus importante en fin de compte : le dénouement. Des œuvres quasiment parfaite qui se finissent sur des fins de merde, le cinéma et la télé en comptent des dizaines. Lost et GOT en sont des exemples plus que probants. Heureusement pour SNK ce n'est pas vraiment le cas. La fin n'est pas merdique en soi, mais elle est tout juste satisfaisante, ce qui est assez regrettable compte tenu de l'aura que dégagent les trois premières saisons de l'œuvre d'Hajime Isayama.

Ce sentiment de désarroi que ressent Eren à la fin de la troisième saison va rapidement se traduire en haine viscérale dans la quatrième. Cette haine, elle va devenir son moteur, jusqu'à le consumer entièrement pour devenir à la fin ce qu'il a pourtant toujours voulu combattre : un monstre. Certes, ce n'était pas une surprise, c'était même attendu dès la saison 2, mais le traitement du personnage est d'une telle maîtrise que ça force le respect envers les Showrunners. Contrairement à ce dernier, Mikasa sera guidé par l'amour qu'elle éprouve à l'égard d'Eren, un amour pur et magnifique qui n'a d'égal que sa bravoure. Il s'agit sans conteste, et je pèse mes mots, de l'un personnages féminins les mieux écrits de l'histoire du manga à la télévision. Armin, quant à lui sera guidé par sa quête justice ainsi que son amour pour l'humanité. On a donc dans cette saison 4, trois pôles bien distinctes qui s'affrontent : haine, amour, justice.

Si la quête de la vengeance est un thème mille fois abordé dans l'art, le début de la saison quatre opte pour un parti pris assez innovant :

Celui de nous mettre du point de vue des "vrais" antagonistes de l'histoire, à savoir l'Empire Mahr.

Et cela, celui-ci le fait avec grand brio. C'est complètement déroutant et déstabilisant pour le spectateur.

On arrive plus ou moins à comprendre les motivations des Mahrs, malgré leur haine viscérale pour le peuple Eldien (ces derniers frôlent parfois le nazisme d'ailleurs, l'allégorie est plus que visible ici), et même à s'attacher à certains (cf. Gaby).

Malheureusement, la seconde moitié de la saison prend une autre tournure qui, à titre purement personnel, me déplaît fortement.

Les twists deviennent tellement récurrents qu'on frôle rapidement le "trop" en fait. Ils arrivent carrément à s'imposer comme la norme du récit, si bien que même les révélations les plus extraordinaire ...

Ex : Eren qui a le pouvoir de voir passé, présent, futur

.. bah ça passe très vite à la trappe, parce qu'on a pas eu le temps d'assimiler les précédentes. En résulte une surenchère de retournements de situation, plus ou moins anecdotiques, qui nuisent terriblement à la compréhension générale du récit. A la manière du Mythe d'Icare, a force de vouloir trop en faire auprès du spectateur, la série s'est brûlée les ailes et a fini par retomber.

L'autre problème que j'ai eu vient des personnages. Il y en a trop. On finit par ne plus savoir où donner de la tête, ce qui nuit terriblement à l'attachement et l'identification du spectateur à leur égard. C'est toujours mauvais signe car certains personnages finissent par être délaissés au profit d'autres (coucou The Walking Dead). Il n'y a pas assez de prise de risque de ce côté-ci, ils sont tout simplement increvables durant les combats, même dans les situations les plus désespérés. Ce n'est pas sans rappeler l'épisode 3 de la dernière saison de GOT d'ailleurs. Je me vois au regret de dire mais Livai aurait dû mourir bien avant, malgré toute l'affection que j'éprouve à l'égard du meilleur caporal de la bridage d'exploration. Il en va de même pour Reiner. Certes, on les adore. Certes, ils sont puissants et charismatiques, mais leur histoire était achevée depuis belle lurette ! J'veux dire, la motivation de Livai, dans cette fin de la saison 4, celle-ci ne se résume qu'à une seule et unique chose :

Mettre un terme au titan bestial

Certes, cela est cohérent avec le personnage, celui-ci ayant fait une promesse à Erwin, mais ce n'est pas suffisant compte tenu de la complexité de l'écriture du personnage entamée jusque-là.

Quant aux autres, cela aurait été appréciable que les motivations de chacun soient un tant soi peu limpides et cohérentes. Pendant plus d'une dizaine d'épisodes, les personnages oscillent d'un comportement à un autre, sans réelle cohérence, et s'accordent le pardon bien trop facilement. Certes, le message d'Isayama est intelligible : "les ennemis d'hier sont les alliés de demain". Certes, SNK est un animé Grand public, par conséquent, au diable la subtilité et la finesse et bonjour le sentimentalisme facile ! Mais je suis désolé de le dire, c'est trop facile, trop expéditif.

On parle quand même d'une guerre qui dure depuis des centaines d'années avec des génocides en prime. Un peu de bon sens, voyons !

Se dégage de cette fin de saison 4 un sentiment de rapidité, voire, parfois, de négligence.

En restera donc une œuvre semblable à son personnage principal. Voulant bien faire au début en proposant du grand spectacle, elle est devenue au final un objet informe, plutôt monstrueux, bien loin de ce qu'elle était au départ.

7/10

Cast17
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleures séries de 2024

Créée

le 31 août 2024

Critique lue 30 fois

2 j'aime

Théo Cast

Écrit par

Critique lue 30 fois

2

D'autres avis sur L'Attaque des Titans 4 : Saison finale - Partie 3

Du même critique

Ceux qui rougissent
Cast17
8

Ceux qui rugissent

S'il y a bien quelque chose que l'on peut aisément reconnaître à Arte, c'est bien la qualité de ses mini-séries actuelles, des œuvres télévisuelles qui, il faut le rappeler, sont par delà le marché,...

le 15 oct. 2024

4 j'aime

Sans jamais nous connaître
Cast17
8

Profonde tristesse, terrible émotion

Il est de ces films qui laissent en nous, spectateur, une marque indélébile, terrible émotion que l'on nomme tristesse. Il y a de cela quelques mois, je rédigeais une critique sur le film Amanda du...

le 26 févr. 2024

4 j'aime

Amanda
Cast17
8

Justesse de l'émotion

Amanda est le second long-métrage du réalisateur contemporain Mikhael Hers, dont la courte filmographie témoigne déjà d'un cinéma prometteur, hautement qualitatif. Ce film pourrait faire office de...

le 13 déc. 2023

4 j'aime