Série adaptant le roman éponyme de Philip K. Dick (connu également pour avoir rédigé Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?), The Man in the High Castle répond à la question qu'une grande partie d'entre nous s'est déjà posée : à quoi le monde aurait-il ressemblé si les forces de l'Axe avaient remporté la victoire finale durant la Seconde Guerre Mondiale ?
Cette uchronie bénéficie donc d'un intérêt certain et une curiosité naturelle du spectateur. La série ayant obtenu un financement conséquent, il est assez aisé pour l'amateur de séries de s'immerger dans cet univers. Les décors sont soignés et les costumes sont vraiment fascinants (surtout certains détails).
La présentation d'une résistance totalement affaiblie (qui ne bénéficie même pas du soutien officieux de la population) mais également la démonstration de la parfaite adaptation de la société américaine au nazisme sont sûrement les points les plus intelligents et les plus intéressants de la série. On s'aperçoit clairement que l'application de l'idéologie nazie n'empêche pas pour autant les américains de continuer de jouir de l'american way of life.
Néanmoins, si les épisodes se laissent regarder sans trop de difficultés, la série dans son ensemble souffre tout de même de (bien trop) sérieux défauts. Le premier et plus flagrant est le format même du récit. Si on comprend aisément la raison pour laquelle Ridley Scott a produit cette série, impossible de ne pas la comparer à son Blade Runner qui adaptait un autre ouvrage du même écrivain. En effet, le récit s'étire bien trop en longueur et là où Blade Runner réussissait en une durée bien plus brève à construire un univers, la nouvelle série d'Amazon manque cruellement de rythme et de charme. Ces longueurs récurrentes sont d'autant plus surprenantes que les grosses sociétés actuelles de production maîtrisent pourtant parfaitement cette gestion du rythme.
D'ailleurs, si on peut comprendre pour des raisons commerciales la décision de diviser la série en dix épisodes, chacun d'entre eux souffre toujours du même défaut : à trois ou quatre minutes de la fin, intervient un climax très poussif... Quant à la révélation finale, celle-ci est tellement prévisible que cela en devient insultant pour l'intelligence et la patience du spectateur. Rajoutons également que la série tombe dans les mêmes travers que les dernières saisons de Game of Thrones : l'élimination brusque et violente de personnages sans que ces scènes aient un véritable intérêt du point de vue du scénario. D'ailleurs, je me demande vraiment ce que cherchent les réalisateurs en intégrant des scènes de ce genre parce qu'au mieux ça me fait sourire, mais le plus souvent cela me fait bailler...
A propos d'ennui, le triangle amoureux qui nous est proposé est fade à tel point que je n'ai eu qu'un seul espoir durant toute cette première saison : qu'ils meurent tous le plus vite possible.
A l'inverse, deux personnages sont plus intéressants : le ministre du commerce japonais (en particulier en raison de son originalité par rapport aux autres protagonistes mais aussi grâce au très bon jeu d'acteur de Cary-Hiroyuki Tagawa) et John Smith (pour la confrontation entre son fanatisme et l'attachement à sa famille, mais aussi le charisme de Rufus Sewell).
Aussi, si The Man in the High Castle est considérée comme la meilleure des six séries présentées par Amazon en 2015, cela demeure clairement une grande déception eu égard aux ambitions du site marchand d'une part ; mais surtout au vu du potentiel énorme (gâché) de la série. Une adaptation filmique aurait sûrement été plus judicieuse, espérons que celle-ci soit un jour réalisée pour nous faire oublier cette amère déception.