Frank Tagliano est une grande figure du milieu mafieux italo-américain. Basé à New-York il est contraint d’émigrer sous une fausse identité. Sous le nom de Giovanni Henriksen il trouve refuge à Lillehammer choisi uniquement pour avoir accueilli les J.O d’hiver en 1994. Pour un vieux baron du crime habitué à sa cohorte de flics laxistes, la confrontation avec la société norvégienne risque d’être tendue.
Je vais être directe, Lilyhammer est un immense coup de coeur. Curieusement lorsque j’ai débuté le visionnage il y a de cela un an j’ai rapidement abandonné. Pas par lassitude mais le début un peu lent et le côté contemplatif des splendides paysages de la Norvège sont déroutants. Je m’y suis replongée récemment et par je ne sais quelle magie, je suis rapidement devenue accro. Nous avons probablement des périodes où nos goûts diffèrent et j’ai pu enfin apprécier la singularité de cette oeuvre à un moment où j’avais envie d’une comédie originale.
J’ai écrit comédie mais au fond aucun adjectif ne serait assez exhaustif pour décrire ce qu’est Lilyhammer. Parodie du genre gangster, comédie sociale sur l’intégration ou burlesque du décalage, les définitions se bousculent sans qu’aucune ne viennent définir l’objet dans son ensemble. Lilyhammer ne prétend à rien d’autre que raconter le nouveau départ d’un ancien mafieux dans un environnement inconnu. Le drame ou le comique n’intervient que s’il doit intervenir. Rien n’est jamais forcé ou exagéré. La série peut se permettre d’enchaîner en quelques secondes le tragique et l’absurde avec un naturel déconcertant. Elle définit en fond une société norvégienne où la célébration de sa culture coïncide avec une volonté d’accueillir les immigrés. L’américain est particulièrement arrogant et les mafieux en général se révèlent particulièrement intolérants face à une société qu’ils tentent de façonner.
La force comique réside principalement dans la galerie de personnage. Un déballage de grand guignol où la femme se révèle souvent être la plus censée. Au centre le mafieux Frank, une gueule et un passif en parfaite caricature du mafieux italo-américain. C’est un homme charismatique et particulièrement persuasif. Autour de lui s’agrège une cour de kékés en mal d’action, voulant jouer les gros durs et pourtant si loin de la violence du crime organisé. Une belle bande d’intrépides à l’enthousiasme et l’attachement réels mais un peu cons. Sans aucune connaissance du milieu et sans la finesse d’exécution des attaques la troupe augure de bons moments burlesques en résonance avec le visage désespéré de leur patron. Torgeir, bras droit parfaitement incompétent, est un homme qui prend sûrement les choses trop à coeur rendant le personnage drôle et touchant. Face à la bande de bras cassés se pose le fonctionnaire zélé et complétement perché Jan Johansen. Un personnage au sommet du ridicule qui vous surprendra par une profondeur inattendue.
Lilyhammer saura vous charmer par un casting bilingues. Acteurs américains, anglais et norvégiens échangent dans leurs langues natales. A priori l’idée est déroutante et pourtant ça marche à merveille ! La Norvège nous livre un casting parfait et des acteurs capable de jongler avec le burlesque et le ridicule avec une maîtrise à commencer par l’immense Fridtjov Saheim en fonctionnaire benêt et incroyablement optimiste. Dans le rôle titre le retour de Steven Van Zandt, accessoirement musicien de Bruce Springsteen et ancien interprète de Silvio Dante dans le chef d’oeuvre Les Soprano. La saison 3 contient d’ailleurs un excellent hommage à la série.
Alors laissez-vous emporter par Lilyhammer, ses paysages sublimes, ses nouvelles têtes et une histoire sans fioritures malgré un début en demi-teinte. L’observation de l’intégration et la confrontation entre deux cultures que tout oppose peuvent même se révéler intéressantes.
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