Le nouvel évènement culturel français est donc une nouvelle fois sortie sur des plateformes en ligne avec ici Netflix qui continue d’abreuver son catalogue de contenu en sollicitant l’une des plus grandes stars du pays comme argument, en le nom d’Omar Sy. A l’image des nombreuses autres productions de la plateforme, Lupin se fond dans cette même veine visuelle agréable dès le premier coup d’œil comme pour nous inviter à s’y plonger le plus longtemps possible avec cette fois-ci un fond de revanche, de combat révolutionnaire contre la domination, et une adaptation d’un des roman-feuilleton français les plus célèbre. On voit en effet évoluer Assane, bouleversé par la mort de son père, piégé par une famille de riches bourgeois pour qui il travaillait et dont Assane va tenter de voler leur bijou le plus précieux à une vente aux enchères. Le passé du héros se révèlera au fur et à mesure dans des rebondissements plus ou moins grandioses au travers des multiples références aux nouvelles de Maurice Leblanc, Arsène Lupin, elles de plus en plus lourdes.
On voit bien dans un premier temps que l’objectif de la série soit de faire en sorte que l’on souhaite rester devant, de nous mettre dans un confort visuel qui va nous faire suivre passivement ce qui se passe. Et pour beaucoup elle y arrivera en appuyant sur cette apathie qui peut nous faire du bien car on se doute bien que ce qu’on a là est une œuvre dont on sait qu’on n’en ressortira pas plus intelligent, mais dont les différents éléments sont satisfaisants à observer, que l’univers construit se tient et qu’au final il y fait bon vivre. On se dit qu’après tout cela fait du bien de ne pas réfléchir et que les quelques bonnes trouvailles narratives stimulent suffisamment notre esprit. Notamment dû au fait qu’une fois la série terminée, on a l’impression qu’elle coche un certain nombre de cases déjà vus maintes et maintes fois, gardant un cadre qui rassure mais fait regretter avec du recul un manque terrible d’inventivité.
Chaque image du film correspond à un schéma très précis qui se répète avec toujours des jeux de lumières diffusant trois ou quatre couleurs dans le plan qui illuminent les visages des personnages, mais ne dévoilent en rien quoique ce soit sur l’enjeu dramatique de la scène. Tous les choix ne signifient rien, si ce n’est une envie de transmettre une satisfaction visuelle, quelque chose de beau à l’œil sans ambition autre. La série se voue en feuilleton qu’on pourrait retrouver dix fois dans la journée sur n’importe quelle chaîne de télé à 14 heure, sans idée artistique pour jouer avec la caméra, mais seulement un budget plus important pour y mettre le paquet en lumière, en costume, et tourner quelque séquence dans une reconstitution du Louvre pour y placer une ou deux scènes d’action. Le rythme est par ailleurs assez inégal, les épisodes sont étirés pour faire durer le récit, symptomatique du manque d’un certain nombre d’idées.
Pourtant on ne peu pas nier des bouleversements narratifs qui fonctionnent très bien et dynamisent le récit. L’idée de vaincre les puissants en utilisant les « pouvoirs » du héros pour renverser des oppresseurs pas caricaturaux fonctionnent. D’autant plus que les histoires mises en lumières peuvent faire penser à des injustices courantes d’aujourd’hui. L’insertion du fictif dans le monde d’aujourd’hui est fluide notamment par la technologie qui trouve le juste milieu sans devenir trop gadget tel un James Bond français. Mais voilà, ces idées revendicatrices ne sont pas vraiment appuyées, on reste dans la revanche pure sur un ton divertissant du héros et on en est presque à louer la série seulement par les pièges dans lesquels elle n’est pas tombés.
Les belles trouvailles ne font pas oublier les scènes de tourments intérieurs du personnages terriblement appuyées qui sonnent complètement fausse, totalement artificiels et ne font absolument rien ressentir mise à part de la gêne par moment. Ces idées ne permettent à aucun moment de faire oublier ce manque absolu d’inventivité de mise en scène qui ne consiste qu’à des plans à la caméra portée suivi des incessants flous d’arrière-plan redondants à souhait. Lupin est une série qui se consomme sans pouvoir s’apprécier, une série qui servira de publicité pour un abonnement et fonctionne tant que son public ne recherchera rien d’artistique à l’intérieur, une série comme symbole d’un refus de toute créativité au contraire d’une production rapide et efficace, qui se remarque dans le vide culturel actuel par son beau visuel, mais dont la consistance se digère dans les dix minutes après le dernier épisode.