"Mad Men", ou les années 60 comme si vous y étiez vraiment. Du moins, on a l'impression de les vivre avec les personnages de la série. Cette dernière est le portrait sociologiquement juste d'une décennie essentielle, dont l'importance a pourtant souvent été considérablement sous-évaluée, par le biais d'un élément très sociologique de notre société à savoir la publicité. Non "Mad Men", ce n'est pas juste des costumes, des décors et une BO judicieusement choisis, très loin de là...
Et puis, il y a les personnages dont la psychologie est subtilement creusée. Je vais pas les présenter tous mais pour moi les plus mémorables sont :
- Betty Draper, allure à la Grace Kelly, jouée par la très blonde glacée hitchcockienne January Jones, ancien mannequin frustrée par sa vie de femme de foyer mère de famille
- Sally Draper, la fille aînée de Betty et de Don Draper, fifille à papa bien sage au début comme devait l'être tous les membres de son sexe lors de la décennie précédente mais qui va évoluer avec son époque en devenant de plus en plus rebelle tout en gardant une grande maturité pour son âge. Je suis loin d'être souvent élogieux avec les comédiens enfants, à juste titre car leur jeu est généralement faible, mais là l'actrice Kiernan Shipka est absolument bluffante dans le rôle.
- Pete Campbell, responsable aux dents très longues un peu tête à claques mais qui va finir par attirer la sympathie du spectateur, notamment en étant le personnage qui, bien avant les autres, voit arriver les évolutions de la Société particulièrement en ce qui concerne les Droits civiques.
- Joan Holloway, secrétaire en chef, incarnée par la très plantureuse et canon Christina Hendricks, intelligente et ayant la tête sur les épaules.
- Roger Sterling, codirigeant de la boîte, vieux coureur de jupons peu avare en répliques cinglantes.
- Peggy Olson, incarnée par l'excellente Elisabeth Moss, jeune secrétaire au début qui arrive à gravir peu à peu les échelons et à s'imposer dans un milieu machiste en devenant une publicitaire très talentueuse. Mon personnage féminin préféré avec celui de Sally, le plus proche psychologiquement de Don Draper, dont les relations donnent une grande partie des meilleures moments de la série à l'instar de l'épisode ""The Suitcase", un des deux-trois plus réussis de tous.
- Et puis bien sûr, il y a Don Draper. Un nom qui est parvenu à être aussi mythique dans le monde des séries que celui de Walter White ou de Tony Soprano. Le mâle alpha absolu, le type que tous les femmes aimeraient avoir et que tous les hommes aimeraient être. "Don Draper" pourrait, et d'ailleurs devrait, être mis dans le dictionnaire comme étant synonyme d"'aimant à femmes". Il n'a même pas besoin de séduire, ce sont les femmes qui viennent à lui, le veinard... Oui, mais derrière ce Don Draper, ce mâle alpha absolu, se cache en fait Dick Whitman (oui, il a piqué l'identité d'un autre !!!), homme dépressif et alcoolique entre le connard cynique et le gamin solitaire qui croit qu'on l'aime pas mais qui en fait n'accepte pas de se faire aimer, et qui a du mal à faire face au type qu'il veut paraître être. Pour paraphraser un peu Cary Grant, tout le monde aimerait être Don Draper même Dick Whitman. Un personnage inoubliable qu'on a l'impression de connaître depuis toujours, auquel le brillant (et sexy !!!) Jon Hamm apporte son incroyable charisme de gros malade.
L'ensemble n'est pas parfait. Je pense surtout aux scènes avec Megan et sa famille dans la langue de Molière qui sonnent faux, à cause du français plus qu'approximatif des comédiennes, et au fait que Sally Draper soit un peu sous-exploitée lors des trois dernières saison. Mais les personnages, les comédiens qui les jouent, de nombreux véritables moments de grâce éparpillés tout du long de l'ensemble, la reconstitution parfaite, auxquels on peut ajouter un générique de début culte de chez culte ainsi qu'une toute fin qui n'aurait pas pu être plus magistrale parviennent à le faire oublier.
En conclusion, Matthew Weiner, le "père" de "Mad Men", peut se vanter d'avoir créé une des plus grandes séries de tous les temps.