Making a Murderer
7.7
Making a Murderer

Série Netflix (2015)

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Pitié pas de saison 2 ni dans 10 ans ni jamais !!

Assez déçu par cette série ; je m'attendais à ce que le système judiciaire soit vraiment entâché, mais pas vraiment en fait.


Pour tout dire, arrivé à la fin du premier épisode, je me suis dit que c'était déjà bouclé et que donc les prochains épisodes seraient consacrés à d'autres affaires de ce genre. Pourquoi pas? Ce premier épisode n'est pas une pépite en soi, mais ça reste honorable. Au lieu de ça, je constate que les épisodes qui suivent sont consacrés au même bonhomme, accusé d'un meurtre cette fois et que cette affaire est ponctuée de nombreux retournements de situation. Enfin ce ne sont pas vraiment des retournements de situations, mais juste des témoins, des indices qu'on nous amène au compte goutte et que la défense devra mettre à mal.


C'est super redondant. Et puis c'est un peu tiré par les cheveux par moment. Le fait que ce soit tiré du réel ne peut pas tout excuser. À partir du moment où on propose une narration il est bon de la simplifier, même si dans la réalité c'était un peu autrement. Non pas forcément en mentant ou en cachant la vérité, mais en jouant sur le rythme des révélations, la manière de les placer. En tous cas, cette structure m'a franchement ennuyé.


Notons que, comme dans toute émission du genre enquête policière, on a droit aux instants émouvants. Y a vraiment de longues séquences totalement inutiles où on montre juste les personnages se lamenter. C'est d'autant plus mal dosé qu'à d'autres moments on fait trop longtemps sans voir la réaction du principal intéressé, à tel point que, si on ne nous montrait pas des images de l'accusé à son procès, on pourrait croire qu'il n'y participe pas. Ce fait contraste fortement avec la fin où on nous le montre tentant de résoudre son affaire seul, sans l'aide de qui que ce soit (non pas par volonté, mais parce qu'il n'a plus droit à un avocat commis d'office).


Cette série est quand même une sacrée propagande. Je suis d'avis que tout film est la propagande d'une idée, d'une conviction, qu'on ne peut y échapper. Ce à quoi je m'attends, c'est que ce soit présenté avec subtilité, avec un bon dosage. Ici, ce n'est jamais le cas. Quand on regarde cette série, deux choses viennent irrémédiablement à l'esprit : 1) le suspect est innocent et 2) le système judiciaire est pourri. Et à aucun moment les auteures ne remettent en question ces deux convictions, au contraire, tout va toujours dans ce sens. C'est donc un manque flagrant de distanciation que je reproche aux deux réalisatrices.


J'avais donc cru comprendre que cette série documentaire met en avant le fait qu'il y a corruption dans le service juridique, que rien n'est fiable, que les gens trichent, mentent. En fait pas du tout. Les deux auteures ne font que suivre la défense. Et il se trouve que la défense met en avant des vices de procédure devant lesquels on a fermé les yeux. Les vices de procédures ne sont pas nouveaux. Des tas de gens sont relaxés pour ces mêmes raisons. Si les deux auteures avaient réellement voulu traiter de ce thème, il aurait été bon de le dénoncer dans le camp des gentils aussi et voir comment c'est perçu. Peut-être qu'ils n'ont pas triché, mais certainement ont-ils eux aussi pensé à cela. Ce qui est bien normal, c'est un bon moyen d'obtenir gain de cause. Au lieu de ça on nous montre que les gentils sont vraiment intègres. Ou bien on est un salaud ou bien on ne l'est pas. C'est peut-être là qu'il aurait été intéressant d'avoir une affaire différente à chaque épisode : on aurait pu avoir des cas de corruption différents. Et puis surtout ça aurait justifié le sentiment que le système est pourri. Ici, on ressort avec cette impression alors que nous n'avons eu assisté qu'à un seul cas. Et en plus on ne sait pas à quel point s'étend cette soi-disant conspiration (deux personnes ou le gouvernement entier), c'est donc un peu réducteur de résumer tout un système à un cas étrange. Surtout que d'autres cas de ce genre doivent être facilement trouvables.


Vous l'avez compris, la série pêche par son manichéisme. Un procédé narratif qui ne me déplaît pas dans les fictions bien au contraire. Mais dans la réalité c'est tout autre. Et dans un documentaire comme celui-ci qui est censé dépeindre la réalité d'un système, c'est un peu gênant. Je ne cherche pas non plus à ce que ce soit anti-manichéen : si on avait contrebalancé chaque image positive de ce type avec une image négative (comme c'était le cas dans le premier épisode), ça m'aurait vite exaspéré aussi. C'est juste que j'aurais aimé un peu plus de nuance, que le dosage se fasse naturellement. Alors qu'ici non, les gentils avocats sont parfaits et le clan Avery s'avère être finalement un groupe de gens un peu en marge de la société et donc incompris.


C'est un documentaire qui n'apporte que très peu de réflexion. Jamais le spectateur n'a l'occasion de réfléchir par lui-même sur la situation. Les séquences sont univoques, les passages importants sont soulignés deux ou trois fois. Jamais le spectateur n'a l'occasion de douter de quoi que ce soit. Dès que l'accusation amène un élément nouveau, on sait qu'il sera retourné par la défense mais que ça n'aura aucun impact sur le jugement (parce que les méchants sont au pouvoir, hinhin). Et les conclusions qui suivent sont logiques dans un tel processus, alors forcément, les spectateurs y adhèrent. Pourtant, je trouve qu'on devrait s'interroger un peu plus sur cette famille. Non pas pour l'accuser, mais simplement éviter de l'innocenter directement. Parce que cette méthode, finalement, n'est pas beaucoup mieux que celle des adversaires. En fait, c'est un peu comme du Michael Moore, un produit rentre-dedans ne laissant place qu'à très peu de réflexion.


Sur la forme il ne se passe pas grand chose. Les réalisatrices ont filmé pendant des années, elles ont réuni beaucoup d'image et la phase de montage a dû être compliquée. Mais il n'y a rien de très intéressant. Pas d'audace, rien. C'est même parfois irritant de voir les gros effets habituels revenir, je pensais au moins échapper à cela : grosse musique, effets sonores faciles, fondus au noir après une déclaration spectaculaire, ... spectaculaire ! c'est le mot ! tout tourne autour de ça. C'est un peu comme les blockbusters actuels où on en fait trop. J'aime le spectaculaire, preuve en est avec ce documentaire "Are all men pedophiles" qui ne fait pas dans la dentelle, sauf que ce dernier, à l'instar des blockbusters d'Hollywood des années 90, dose plus intelligemment ses effets explosifs. Ici non, on est constamment dans l'événement important, dans l'explosif.


Tout n'est pas pour autant à jeter. L'histoire est en soi intéressante. Les lieux sont intéressants. Certains affrontements au tribunal sont plaisants à suivre (vers le milieu de la saison j'ai trouvé les attaques plus intéressantes, les faux témoignages plus efficaces en terme de sensationnalisme). En fait, cette série constituerait un excellent matériau de base pour faire un film sympathique (de 1h40, hein !).


Bref, "Making a murder" n'est pas la claque espérée, c'est même un produit navrant pour plusieurs raisons. Du coup, j'hésite à regarder "Jinx".


PS : je dois dire aussi que je suis plutôt dans le même état d'esprit que Lumet avec son "12 angry men" : je pense qu'on peut accuser n'importe qui tout comme on peut toujours trouver un moyen d'innocenter un homme. En fait, le système est fait de tel sorte que tout se résume à convaincre des gens par la manière de présenter ses preuves. On ne peut donc ni trancher à gauche (il est coupable) ni trancher à droite (il est innocent) mais se contenter du doute. Et ce doute, on ne le trouve jamais de toute la série (10h bon sang!).

Fatpooper
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le 23 juin 2016

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