Mindhunter : the linguistic edition

Dans le genre reconstitution d'une enquête hors norme, cette série s'avère parfaite. Pas seulement par le sujet abordé, car vous pourriez très bien rien savoir sur le petit gars Unabomber ou alors être carrément le biographe attitré de Ted Kaczynski que l'histoire resterait passionnante.

En effet, au fil des épisodes, il devient frappant que la narration parvient à mettre en relief le moindre indice, la moindre avancée de l'enquête. C'était pas gagné à la base, car des enquêtes au long cours il en existe pléthores comme le ressent Mindhunter, ou le génial Zodiac, etc. Sans compter les documentaires, les docus-fictions, etc.
Pourtant Manhunt parvient donc à se distinguer en embrassant les poncifs des grands bureaux froids du FBI, les salles d'interrogatoires, etc. afin de les aborder différemment, du moins sombrement, sans s'appesantir dans des monologues explicatifs confus, supprimant des dialogues trop édifiant avec des gros clin d’œil appuyés pour permettre aux personnes en manque d'attention de suivre, mais au contraire en choisissant de montrer (le fameux show don't tell) par des astuces visuelles le travail de ses agents ou l'oeuvre terroriste d'Unabomber. Les scènes annexes de vie de famille, de relation entre membres du FBI ou même les flash-back restent sobres, permettant de mieux saisir les personnages, les rendre réels.

Car chaque personnage, même tertiaire, possède une véritable identité, une profondeur rare. Chacun demeure complexe, même dans ses aspects les plus sombres, leurs pires défauts apparaissent comme évidents et compréhensibles. La hiérarchie récalcitrante à l'approche linguistique du héro justifie toujours son point de vue, même le borné Stan Cole (Jeremy Bobb) trouve le moyen d'être logique. L’obsession compulsive du héro, Jim 'Fitz' Fitzgerald (Sam Worthington) a déjà été traité un bon million de fois, mais là l'intrigue puissante incite le public à prendre son parti d'envoyer chier femme et enfants pour savoir, pour finir.
Même Unabomber, Ted Kaczynski (Paul Bettany) devient sinon touchant, au moins humain à la mesure d'un Hannibal Lecter, mais pour de vrai.

Enfin, l'histoire dépasse le cadre de la simple enquête en montrant l'adhésion ou l'interpellation des thèses de la "philosophie" d'Unabomber par certains personnages. Thèses qui résonnent encore aujourd'hui.