Je n'ai pas pour habitude d'étaler les lignes lorsqu'il s'agit de donner un avis sur un anime ou un manga. Il faut dire qu'il y en a énormément et pour certains tellement à dire qu'il est difficile d'y apporter un avis clair sans faire trop long ou spoiler. Mais il y a des œuvres qui sortent du lot, des œuvres qui nous font fondre littéralement et qui nous extirpent automatiquement les mots de la bouche, Sangatsu no Lion en fait partie. C'est pourtant typiquement le genre d'anime où j'aurais tendance à dire "ferme ta gueule et regarde!".
Fan du genre "slice of life" (Inio Asano, Jiro Taniguchi, Fumiyo Kono…), je ne pouvais de toute façon pas passer à côté de celui-ci après les premiers visuels aperçus sur la toile à l'époque, ses dessins atypiques et tons pastel me rappelant le merveilleux Usagi Drop. Rei Kiriyama est un jeune lycéen solitaire et introverti. Joueur pro de Shogi, ses journées sont divisées en deux, jonglant entre le lycée et les compétitions rémunérées qui lui permettent de vivre correctement. Le Shogi est une passion commune qu'il partageait avec son père lorsqu'il était enfant mais le destin a subitement arraché la vie de ses parents et de sa petite sœur après un terrible accident. Il est rapidement adopté par un ami proche de son père et également joueur de Shogi, mais le don de Rei pour les échecs japonais et son comportement irréprochable sèment doucement le désordre parmi sa nouvelle famille et attisent la jalousie de sa belle sœur. Il quitte très jeune ce foyer devenu étouffant et vit aujourd'hui seul dans un appartement vide qui semble représenter concrètement ce qu'il a sur le cœur, près d'une rivière qui le sépare de la maison de ses seuls amis: les sœurs Kawamoto. Des filles pétillantes, elles aussi orphelines, qui l'ont accueilli chaleureusement dans leur foyer après une rencontre fortuite avec l'aînée Akari.
Sangatsu no Lion est une œuvre fraiche, douce, réaliste et touchante. Après une introduction sublime accompagnée d'une jolie chanson française (hormis les œuvres de Ghibli en version française, il me semble que c'est la première fois que je vois/entends ça dans un anime Japonais), nous sommes directement plongés dans le quotidien difficile de Rei. Tête baissée, regard vide, cheveux dans le vent, il longe la rivière et prend le train qui l'amène là où il passe la plupart de son temps: le centre de Shogi. Entouré de gens, il semble pourtant être invisible et avoir érigé une certaine barrière avec le monde qui l'entoure, Rei est un garçon très renfermé toujours en plein doute et en train de se questionner sur son existence. La première saison de l'anime se concentre essentiellement sur son personnage, son passé et sa rencontre étonnante avec les sœurs Kawamoto. Akari est une jeune et jolie jeune femme, hôtesse dans un bar qui travaille dur pour subvenir aux besoins de ses deux petites sœurs, Hinata qui est toujours au collège et la petite Momo, avec l'aide de son grand-père. On a l'occasion d'y découvrir d'autres personnages hauts en couleur comme le professeur principal de Rei, toujours énergique et prêt à tout pour accompagner et aider ce dernier,les autres membres du centre de Shogi et également la belle sœur de Rei avec qui il entretient une relation tendue. La seconde saison est plus dure et traite principalement du harcèlement scolaire (Ijime) qui sévit régulièrement dans les établissements Japonais; où un groupe d'étudiants peut semer le désordre, isoler complètement une personne et paralyser une classe entière et les profs qui ont peur d'être confrontés à ce genre d’événement et aux parents déchaînés.
Je voulais faire plus court mais ce n'est apparemment pas si simple… Sangatsu No Lion est une œuvre majeure à voir d'urgence pour les fans du genre "slice of life". C'est lent, ça nous ramène peut-être souvent à nos propres questions et difficultés du quotidien, mais c'est ce qui rend cette histoire si riche et puissante, ses personnages si abordables et attachants. Je ne connais pas le manga, mais je pense que Chika Umino peut être fière du traitement apporté à la version animée par le studio Shaft. Les couleurs chaudes et pastel, les onomatopées qui fleurissent sur les différents plans et le chara design flattent la rétine. Les compositions musicales accompagnent parfaitement l'ambiance des différentes scènes, amenant de la gaieté ou semant le doute. Et même si vous ne comprenez pas le déroulement des parties de Shogi, vous n'êtes pas perdus pour autant, le plus important étant ce qu'il se passe autour du plateau et dans la tête des personnages.