Après plusieurs coopérations entre Marvel et Netflix, on sentait la machine se ripper; en tant que spectateur, je ne retrouvais jamais la saveur des bastons chorégraphiées du diable de Hells Kitchen. La dernière bonne idée des deux studios étant l'introduction d'un Punisher violent et acharné dans la seconde saison de Daredevil. Son accueil très favorable justifiait une aventure en solo et un rôle au premier plan... jusqu'à supplanter Matt Murdock ?
Vu que les présentations ont déjà été faites, les scénaristes ont la bonne idée de tirer un trait sur les origines du héros, et de poursuivre sur la trame du vétéran revenu du front et désorienté par la vie civile. Le premier épisode de la saison 1 est ainsi incroyable d'une double maitrise : du personnage d'abord, qui ne cèdera à une violence incroyable qu'au tout dernier moment, mais aussi du scénario, qui joue avec le spectateur pendant 45 longues minutes, faisant monter la pression lentement et avec succès.
Cet épisode n'est cependant qu'une parenthèse, un avant-goût, la trame de la saison ne commençant réellement qu'avec l'épisode 2. Mais on semble très bien parti.
Là, encore un joli tour de passe passe : pas de véritable bad guy identifié, de menace pesante, si ce n'est l'oeil de la population, les médias, la police (corrompue), les épisodes s'enchainent et l'histoire se révèle lentement, distillant çà et là de très bonnes scènes de violence justifiées et, visuellement crédibles.
J'entends par là que les chorégraphies sont très bien réalisées. Bien entendu, les personnages se bastonnent pendant des heures sans sourciller, le punisher prend à peu près 15 balles et 10 coups de couteau en 10 épisodes, mais continue de se battre, traverse les vitres sans se blesser, ect. Les codes du film d'action classique sont respectés, avec un degré de violence en plus.
Passé l'épisode 6, la série prend un tournant qui, bien qu'il soit relativement bien amené, nous ramène à un terrain connu. Je ne spolierai pas ici, tout ce que je peux dire c'est que l'amertume que m'a procuré ce virage n'a pas annihilée le besoin de savoir la suite (j'ai binge-watché la série).
Les points forts :
Jon Bernthal n'interprète pas le personnage principal, il le vit, et porte la série sur ses larges épaules. Taiseux par excellence, la violence, la haine émanent principalement de sa gestuelle et de son corps. Malgré son jusqu'au boutisme morbide et l'évolution très linéaire de son personnage l'acteur est capable d'enchainer des crises de rage crédibles mais aussi de longs monologues plus posés. Les acteurs secondaires sont également tous excellent, et voir ce Frank Castle si solitaire s'ouvrir petit à petit à sa nouvelle famille est très touchant.
L'histoire secondaire, surfe sur un ton plus glacial en traitant d'un terrorisme moderne, perpétué par une jeunesse abandonnée et donc perdue, et tente d'exister en parallèle, en se battant pour sa propre liberté. Bien que rappelant aux USA les évènements post Vietnam et la multitude de films traitant le sujet, il est ici bien traité et crédible, en étant actualisé.
La simplification du système policier. Des personnages à leur postes bien identifiés, pas d'agences qui s'entremêlent, on est ici dans de l'action pure et le réalisme de la paperasse n'aurait pas eu sa place. Cela nous permet d'avoir des évasions à répétition, des milices et des opérations non autorisées partout, et une flic badass qui tire avant de réfléchir. C'est un personnage féminin, c'est déjà çà.
La violence. Autant les scènes de daredevil étaient réussies car très bien filmées et extrêmement chorégraphiées, autant ici, la dureté des gestes, les mises à morts et le sang froid de Frank Castle laissent le spectateur bouche bée.
Les points faibles :
Ils sont peu nombreux, et franchement pas si dérangeants.
L'intrigue principale est très classique. Ce n'est pas vraiment un point faible, mais assurément pas le point fort de la série. Avec sobriété, elle nous permet de voir évoluer Castle sans jamais nous arracher les cheveux. Franchement, c'est déjà beaucoup.
La violence dans les derniers épisodes finit par être excessive. Pas tant qu'on soit dans la surenchère de gore, quoi que, mais on atteint le point "sauce tomate" à certain moments.
Le dernier épisode est peut être en trop. On a déjà eu droit à tellement de violence, je ne vois pas trop l'intérêt de continuer, de plus je suis assez déçu du traitement du personnage antagoniste.
Déjà, le coup du meilleur ami, ok. ensuite le coup du beau gosse qui trompe son monde, on le voit venir à 20.000, mais vu la conclusion de l'avant dernier épisode, je ne comprend pas du tout la haine qui se cristallise tout d'un coup entre les deux personnages. Quoi qu'il en soit, elle est le véritable point faible de cette saison, assurément parce qu'on sent qu'il y avait mieux à faire avec le potentiel des deux acteurs et le passé des personnages.
Conclusion :
J'ai adoré regarder la première saison du Punisher, je l'ai trouvé absolument maîtrisée, à quelques exceptions près, mon seul regret étant que le potentiel semblait encore plus grand avec un peu plus d'ambition dans l'écriture des personnages et du scénario de la fin. L'épisode 13 semble lui aussi en trop, d'ailleurs il se termine de façon très étrange, sans rien préparer de la potentielle suite. Il sera d'ailleurs très dur de construire à partir du peu que Frank Castle a laissé agonisant sur son passage...