Masada
7.9
Masada

Série ABC (1981)

Lutte pour la liberté à Massada

C'est probablement aux alentours de 1983 que j'avais découvert à la télé française cette mini-série de la télé américaine (quatre épisodes de 90 minutes) qui m'avait alors captivé. La mini-série est tirée d'un roman de Ernest K. Gann ("The Antagonists" traduit en français en "Massada" publié dans les années 70 que je me suis procuré dans la foulée.

Pour situer l'action, on est sous Vespasien, aidé par son fils et successeur Titus. La chute de Jérusalem et la destruction du Temple ont eu lieu en 70 entrainant la fuite de zélotes et d'esséniens commandés par Eleazar Ben Yaïr vers la forteresse Massada située dans le désert de Judée. Le siège de Massada, dirigé par le General Silva et sa dixième légion a duré de 72 à 73 et a nécessité la construction d'une énorme rampe pour accéder à la citadelle. Quand les romains en net surnombre puisque 8000 contre un millier de personnes retranchées avec leur famille, parvinrent à investir la forteresse, ils ne trouvèrent que des morts les privant d'une vraie victoire et d'un triomphe.

Les données historiques ont pour base les écrits de l'historien juif Flavius Josèphe qui sont, semble-t-il assez laconiques. Ces écrits constituent scrupuleusement la charpente des roman et mini-série.

Par contre, les personnages, leurs actions et états d'âme sont complètement imaginaires.

Si le roman s'inspire des faits réels et brode allègrement autour des personnages historiques, alors on peut dire aussi que le film s'inspire tout aussi librement du roman, en simplifiant le nombre des personnages et surtout en dramatisant l'action et en la rendant plus spectaculaire. L'avantage en est une mise en scène très dynamique avec des personnages qui deviennent bien plus emblématiques et passionnants à suivre que dans le livre où ils sont plus nuancés et complexes. On est, ainsi, bien plus dans une logique de péplum.

Je ne connais pas les écrits de Flavius Joseph, qui était citoyen romain au service de Vespasien et Titus donc certainement plutôt dépendant du pouvoir, mais j'ai cru comprendre qu'il était très critique sur le personnage d'Eleazar Ben Yaïr qu'il décrivait comme un fanatique, expliquant ainsi la logique du suicide collectif.

Ce qui ressort principalement de ces deux œuvres, c'est la dignité des deux personnages, le général romain Silva et le chef des insurgés Ben Yaïr, que romancier et cinéaste ont voulu parfaitement équilibrés. D'ailleurs, c'est bien ce qui est passionnant, c'est cette confrontation entre deux logiques, l'une colonialiste (ou expansionniste) et l'autre indépendantiste qui trouvent évidemment écho dans la plupart des conflits entre un peuple qui cherche à asservir et un peuple qui cherche à se libérer.

La distribution couvre des personnages que le scénario a voulu hors du commun.

Le général Silva est interprété par un excellent Peter O'Toole comme toujours très investi dans un personnage complexe qui allie la rigueur du militaire et le respect de l'ennemi à combattre à un humanisme intérieur qu'il refoule mais qui revient sans cesse.

Le personnage de Ben Yaïr est interprété par Peter Strauss, plutôt homme de télévision que je ne connais pas. Là, le rôle est celui d'un homme révolté, doté d'un romantisme exalté, qui recherche désespérément et inlassablement la bonne méthode pour infliger des coups à l'ennemi. Peter Strauss est très convaincant.

Anthony Quayle joue le rôle du technicien architecte, romain, chargé de mettre au point les ouvrages destinés à la destruction du mur d'enceinte.

Deux rôles féminins sont mis en avant dans le scénario ; l'épouse de Ben Yaïr, le principal et indéfectible soutien de son mari. Mais celui du beau personnage de Sheba, prostituée et esclave juive par la force des choses, qui se trouve dans l'entourage immédiat du général et vit dans sa chair la destruction de son peuple, force l'admiration. C'est Barbara Carreras, très investie, qui tient le rôle (on reverra cette actrice dans "Jamais plus jamais").

Pour conclure, la mise en scène m'a paru tout-à-fait digne des grands péplums hollywoodiens. Je pense que la chaine de télé américaine a mis les petits plats dans les grands en se donnant les moyens d'un bon spectacle. Même si, comme d'habitude dans les péplums, on n'hésite pas à s'arranger avec les détails, les décors ou les costumes pourvu qu'ils fassent de l'effet à l'écran. Au fond, ce n'est pas si grave.

Un point intéressant est la valeur de symbole de Massada pour Tsahal qui utilise le bastion aujourd'hui comme lieu de pèlerinage et aussi pour certaines cérémonies militaires. Le film commence et termine sur les images muettes où des militaires, hommes et femmes, investissent avec respect la citadelle.

Ce qui m'a vraiment plu dans cette mini-série, c'est la hauteur des débats entre les différents protagonistes et le sens donné à cette lutte entre la puissance romaine et un peuple quasiment à genoux.

Le jeu des acteurs, tous formidables, rend cette adaptation – d'un évènement historique peu connu - très convaincante.

JeanG55
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le 2 mai 2023

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