Pour être franc, j'ai commencé le visionnage de cette série sans grand enthousiasme me disant : "Tiens, encore une série humoristique jouant sur le ressort de l'anachronisme historique ou légendaire. Une de plus... Mouais, pourquoi pas, voyons voir...".
J’étais plutôt dubitatif, donc, car il est vrai que ce ressort fictionnel, que ce soit en format film comme en série peut donner matière à de l'excellentissime, voire du carrément génial (Cf. "Astérix Mission Cléopâtre", "Kaamelott") mais aussi a du très mauvais, voire du totalement pitoyable (Cf. "La petite Histoire de France" ou "Brutus Vs César" et la liste est loin d’être limitative...).
J'étais donc dans l’expectative.
Pour continuer d'être franc... les tout premiers épisodes de cette série m'ont un temps fait craindre que Norsemen fasse plutôt partie de la seconde catégorie précitée que de la première. La série a un peu de mal à « s’installer », il faut bien le reconnaître…
Je ne devais pas avoir grand-chose d’autre à faire à ce moment-là car j'ai, malgré tout, continué de regarder.
Et pour être franc une dernière fois... mon obstination a été payante car, arrivé au bout de la dernière saison, je peux m’autoriser à affirmer haut et fort, "Urbi et Orbi" que Norsemen est au final une excellente série ! Peut-être pas du même niveau d’excellence que Kaamelott, mais quand même…
À voir absolument, donc !! Et Ô combien !!!
Alors, qu’est-ce qui a bien pu faire évoluer, dans ce sens aussi dithyrambique, mon état d’esprit initial me demanderez-vous ?
Hé bien… toute une série de bricoles.
Je ne les listerai pas toutes car quand on est totalement conquis par une œuvre de fiction on a facilement tendance à perdre son esprit critique et à tout trouver « génial ! ». Même ce qui ne l’est pas forcément !
Donc, pour ce qui me concerne, si je devais retirer les deux choses les plus saillantes et les plus positives, je citerais :
1 – La galerie des personnages :
Il est certain que tous les membres de cette Team Viking sont plutôt hauts en couleurs. C’est rien de le dire… Pour faire bref : Une belle brochette d'abrutis sanguinaires.
Mais dans cette bande de joyeux et aimables lurons toujours prompts à se foutre allègrement sur la gueule d’abord et à discuter après, il y en a quand même trois qui, à mes yeux, se détachent du lot.
Á commencer par « Örm ».
Lui, c’est le fourbe et le sournois par excellence.
C’est la veulerie personnifiée.
Sa forfanterie, ses mensonges, ses traîtrises, ses compromissions, le tout mâtiné d’une couardise à l’égale de celle du « Bohort » de Kaamelott le rendent incontournable.
Ce dont il est capable, en dépit de sa lâcheté congénitale, pour devenir coûte que coûte le chef de la tribu, ça vaut le détour…
Si vous voulez avoir une première idée concrète du personnage avant même d’avoir vu la série, imaginez deux secondes un Gérald DARMANIN, un Gabriel ATTAL ou un Bruno LE MAIRE au sein du Conseil des Sages d’une tribu Viking du VIIIème siècle et vous situerez parfaitement le quidam !
Ce personnage est tellement pitoyable qu'il en devient jouissif à regarder.
Rien que ça, ça donne envie de voir… non ??!
Et puis aussi, il y a « FrØya ».
Aaaaaaah…FrØya.
Elle, c’est « LA » femme de la tribu. Et quelle femme nom de diou !
C’est un monument. Non pas un buffet normand mais un impressionnant bahut nordique bien plus robuste que ceux de l’ère IKEA…
Un physique à faire passer la Brienne de Torth de Game of Thrones pour une rachitique anémique…
Elle est plus grande, plus baraquée, plus forte (et, subsidiairement, plus intelligente aussi…) que tous les hommes du clan.
L’image emblématique et prédictive de ce que deviendra la "Femme moderne du XXIème siècle » en somme.
Et puis les traits de son visage aussi… comment dire ?
Ils sont aussi sympathiques, avenants, aimables, agréables à contempler que ceux de la délicieuse et ô combien féminine Alice COFFIN. Vous voyez le genre ?!!!
Rien qu’à voir son physique apparaître à l’écran, donc… on a les genoux qui tremblent.
Il est certain qu’avec une telle nana, même un Damien ABAD ne s’adonnerait à aucune privauté répréhensible. C’est dire…
De plus, côté violence, cruauté et bestialité, elle se pose là.
Et elle t’assène des coups de hache en pleine tronche, et elle te transperce de part en part à l’épée, et elle t’éviscère à mains nues pour te bouffer les tripes, et elle t‘éclate le crâne à coup de masse, et tout ça avec une allégresse, une motivation et un enthousiasme jamais démentis qui font plaisir à voir !
Et puis côté « joyeusetés de troisième mi-temps » elle n’est pas en reste la bougresse ! Pendant que ses compères mâles profitent de plaisirs bien mérités après la bataille en violant allègrement les femmes, les jeunes filles et les toutes p’tites fillettes des vaincus ben… Elle… elle fait de même… mais bien sûr seulement avec les gamins qui n’ont pas encore l’âge de porter épée (de ce point de vue-là elle ne serait pas sans nous rappeler une certaine… « Brigitte M.», non ?).
Mais, malgré tout, on peut être une rude et rustique guerrière Viking… on n’en demeure pas moins femme.
La charmante petite coquetterie qu’elle met à se fabriquer de très choupinets et très seyants colliers de… bites avec les pénis coupés à la serpette de ses adversaires trucidés sur le champ de bataille, lui donne un je-ne-sais-quoi de ce « petit chic norvégien » qui la rend terriblement attachante.
Je ne sais si ma très chère, très préférée et très adorée Alice COFFIN précitée a regardé cette série mais, si tel est le cas, elle a dû à coup sûr ressentir de délicieuses petites vibrations au niveau du bas-ventre en suivant les tribulations de « LA FrØya » ! (sinon… c’est que je ne comprends plus rien aux féministes LGBT du moment… [si tant est que j’ai vraiment compris un jour comment fonctionnait cette engeance. J’avoue…]).
Et… enfin… Jarl Varg !
Jarl Varg, comment dire… ?
Jarl Varg, c’est le summum de la barbarie et de la cruauté gratuites. C’est le nec plus ultra du psychopathe asocial. C’est la quintessence absolue et définitive du « Méchant ».
Pour vous situer le niveau du lascar et pour faire une comparaison que seuls ceux qui ont vu « Breaking Bad » comprendront, disons que Tuco Salamanca à côté de lui s’apparenterait presque à un petit rat de l’Opéra de Paris. Voyez le tableau…
« J’dirais pas que Jarl Varg est toujours très social, non. Il a plutôt l’esprit de droite. Si tu lui parles augmentation de la solde ou permission, il te fracasse la tête avec sa masse d’armes avant que t’aie fini ! »
La composition de ce personnage faite par Jon Øigarden est digne d'éloges toute en outrance, en excès et en postures cabotines, ce qui colle parfaitement au rôle.
Je l’ai tellement apprécié ce méchant Jarl Varg que j’ai retrouvé devant Norsemen le même état d’esprit et le même comportement enfantin que j’avais, jadis, quand mes parents m’emmenaient voir « Guignol » au Jardin public. Vous savez ce moment où, quand le méchant Gnafron surgit subitement derrière Guignol pour lui asséner une volée de coups sur la tête avec son gros bâton et que tous les gamins crient, en même temps, à tue-tête en pointant du doigt le vilain Gnafron : « IL EST LÁ ! IL EST LÁ !! ».
Ben là… c’était exactement la même chose. J’attendais avec une impatience toute enfantine chacune des apparitions de Jarl Varg… Pour un peu, à chaque fois qu’il apparaissait, j'aurais pu taper des pieds sur la moquette de mon salon comme je trépignais sur le sol en gravier, devant Guignol, en me trémoussant sur le banc quand j'avais 10 ans...
2 – Les mises en situation et les dialogues :
Le premier ressort comique de ce genre de fiction consiste à confronter des personnages ancestraux à des situations que l’on a l'occasion de temps à autre de vivre de nos jours (mais évidemment fort improbables à l’époque considérée) et à les faire s’exprimer avec un vocabulaire, une syntaxe et des expressions totalement contemporains.
Ainsi, entendre le Perceval de Kaamelott déblatérer sur les concepts de la relativité restreinte du père Albert… c’est poilant en soi.
Écouter l’Astérix de « Mission Cléopâtre » entonner le refrain d’ « Alexandrie - Alexandra » à l’approche du fameux phare de l’Égypte antique…c’est désopilant !
Hé bien, dans Norsemen, ce ressort est parfaitement exploité. Et sans doute même plus et mieux encore.
La série regorge de pleins de ces confrontations anachroniques et donc drolatiques de situations modernes « flashbackées » au temps des Vikings. Et c’est excellemment fait !
[ATTENTION : dans ce qui suit, je vais carrément spoiler une scène…]
Comme cette séquence dans laquelle les plus proches lieutenants du féroce Jarl Varg sollicitent une entrevue auprès de lui.
C’est que ces lieutenants – qui ne sont pourtant pas des rosières – commencent à être sérieusement lassés de la barbarie « No Limit » de leur chef. Et ils veulent lui dire, donc, qu’ils en ont un peu marre d’égorger fillettes, garçonnets et nourrissons simplement parce que « Chef veut ! ».
Et là… on a droit à une scène (qui mériterait de devenir « Culte » comme on dit…) que beaucoup d’entre nous, sans doute, ont déjà vécu dans leur vie professionnelle : Ces fameuses réunions de service avec un « N+1 » honni et détesté de tous ses collaborateurs because son incompétence, ses directives de merde et son management tout aussi merdique. Réunions au cours desquelles le plus courageux (ou le plus inconscient… au choix) prend la parole pour tenter, avec moult précautions oratoires, moult circonlocutions de faire passer le message collectif. Et, en règle générale, ça se termine très mal pour le courageux inconscient. Très, très mal. Toujours.
Ce contexte par définition déjà inconfortable dans une société moderne "civilisée et policée" transposé dans le staff moyen-âgeux du très méchant Jarl Varg… je vous laisse imaginer ! Mieux… voir dans l’épisode. Ça vaut le coup. Vraiment !
Quant à la façon dont les dialoguistes de la série font s’exprimer nos barbares Vikings. C’est un « Must » !
Tous les personnages s’y expriment et engagent de très longs dialogues avec un verbe et tout un catalogue de poncifs contemporains qui pourraient laisser penser qu’ils sont tous des lecteurs assidus et avisés du « Monde Diplomatique », de "L'Obs", de « Libération » et de « Télérama »… ce qui, bien sûr… est impossible.
Ainsi lorsqu’ils partent sur de longs échanges et de longues considérations bien oiseuses sur :
• les techniques de management ;
• les relations « Homme / Femme » ;
• la rémunération du travail ;
• la vie de couple ;
• l’homosexualité et l’homophobie ;
• les grands enjeux géopolitiques ;
• l’éducation sexuelle ;
• et plein d’autres thèmes encore…
c’est carrément poilant. A pisser de rire.
Totalement jubilatoire !
Et c’est sans doute sur ce dernier aspect que Norsemen est le plus pertinent et atteint le mieux son objectif.
Car faire parler d’ancestraux, très peu civilisés et très ignares barbares Vikings comme nous nous plaisons tous à le faire aujourd’hui, en nous gargarisant, à tout bout de champ, des beaux concepts du moment et des belles idées « à la mode », si au premier degré c'est totalement poilant, au second degré, cela nous questionne tous.
Nous tous.
Nous, hommes et femmes du 21ème siècle et donc infiniment plus civilisés (et donc forcément beaucoup plus intelligents...) que ces rustres et primaires Vikings du fond des âges.
Nous qui, pourtant, avons accepté sans broncher (et en disant « Merci ! », même…) les injonctions de lointaines autorités plus ou moins légitimes pour nous terrer chez nous de longs mois, tels de misérables cloportes, dès qu’un petit virus grippal à peine plus méchant que ses devanciers est apparu ;
Nous qui, pourtant, avons refusé d’approcher nos aînés et, a fortiori, de ne plus les prendre dans nos bras ni de les embrasser au motif sans doute sincère mais néanmoins fallacieux de les préserver ;
Nous qui, pourtant, n'avons plus serré plus la pogne à nos potes, ni bisouillé nos potesses pour leur dire amicalement « Bonjour ! » en remplaçant ces anciens gestes chaleureux par des coups de coude ( !!) ou, pire, des coups de pieds dans les chevilles ( !!!!), car… car… sait-on jamais !
Nous qui, pourtant, avons fait injecter aux plus jeunes de nos enfants un produit encore « incertain », non pas tant pour les prémunir - car nous savions pertinemment qu’ils ne risquaient vraiment rien de grave pour eux-mêmes - que, soi-disant, pour protéger « les autres » (ce qui, admettons-le, est le comble de l’absurdité et un contresens total quand on parle de ce type de chose…) ;
Nous qui, pourtant, avons masqué à autrui notre visage, et donc l’expression première et immédiate de notre propre humanité, dès qu’un sinistre président d’un « Conseil de défense machin-truc » a éructé : « Delfraissy a dit : Portez un masque ! »
Nous qui, pourtant, ne chaufferons bientôt plus nos maisons en hiver, ne nous déplacerons plus qu’en chars à bœufs "Électriques" (Sic !) pour rallier Paris à Bordeaux et en bateaux à rames "Hybrides" (re-Sic !!) pour aller de Brest à New-York, ne nous éclairerons plus la nuit qu’à la bougie car… la « sobriété » semble être le nouvel impératif collectif à la mode;
Nous qui, pourtant, n’hésitons pas à afficher sur la place publique ce calcul absurde, monstrueux, criminel, eugénique du « …bilan carbone d’un nouveau-né occidental… » !!
Nous qui, pourtant, ne ferons bientôt plus d’enfants car…« Vous comprenez ma pov’dame, il est urgent de sauver la planète ! »
Bon, bref.
Quand on voit tout ça, quand on lit tout ça et que l’on compare l’humanité "civilisée" et prétendûment éclairée et éduquée du XXIème siècle avec ce que pouvaient être nos ignares cousins Vikings dans l'obscurantisme moyen-âgeux du VIIIème siècle, Norsemen nous invite à nous poser honnêtement la question :
« C’est qui les vrais abrutis, au fond ? »