Occupied
7.3
Occupied

Série TV 2 Sumo (2015)

Voir la série

Politique-fiction (LOL) [Critique saison par saison de la série "Occupied"]

Saison 1 :
On peut facilement se gausser des prémisses de "Occupied", justifiant (?) la mise sous tutelle russe des installations pétrolières norvégiennes, et le début du bras de fer entre le Premier Ministre norvégien et les autorités russes de plus en plus "envahissantes", prémisses dont les incohérences et invraisemblances sont nombreuses. Si l'on fait l'impasse sur ces réserves qui n'ont finalement que peu d'importance, alors il faut bien reconnaître que "Occupied" est une jolie petite réussite : empruntant au meilleur du polar scandinave (Jo Nesbo est à l'origine du projet), soit ses personnages complexes, son manque de manichéisme simpliste et de sentimentalisme, et une sorte de noirceur atone qui en fait souvent le sel, "Occupied" dépasse le niveau du thriller habituel pour générer de passionnantes interrogations. Il n'est pas si difficile que cela en effet de repenser au comportement de la France de Vichy collaborant ardemment - ou au niveau des individus, de manière totalement intéressée financièrement - avec l'envahisseur, et aux balbutiement de la Résistance française, bien évidemment qualifiée de "terroriste" (n'oublions jamais alors que nous avons ce mot à la bouche 24 heures sur 24 heures, que les opposants aux régimes installés sont toujours qualifiés de terroristes...). Plus près de nous, les tactiques et manipulations diverses mises en place par la Russie pour gagner le contrôle de la Norvège sont tout-à-fait comparables à ce que nous avons vu - dans la "vraie vie" comme on dit - déployé en Crimée et en Ukraine en général : cette politique-fiction-là, aussi fragile soit-elle, s'avère quand même un formidable écho à notre réalité et nos angoisses contemporaines. Bref, "Occupied" divertit grâce à son rythme implacable, aux surprises de son scénario bien troussé qui ne ménage pas ses personnages, mais fait surtout beaucoup réfléchir pourvu qu'on accepte de jouer ce jeu fascinant du "et si..., et si...". Du coup on attend la seconde saison avec impatience.
[Critique écrite en 2017]


Saison 2 :
Le visionnage - tardif il est vrai - de la seconde saison de la série franco-norvégienne "Occupied" m'a fait pour une fois changer complètement d'avis, et réaliser que ses "défauts" pointés par la majorité des téléspectateurs, et que j'avais "relativisés" en 2017, constituent un problème majeur, qui empêchent bel et bien la série de fonctionner. Car je me suis assez horriblement ennuyé devant les huit épisodes aussi frénétiques que littéralement interminables de cette seconde saison, qui échoue tristement à provoquer la moindre émulation.


Bien entendu, c'est le sujet même de "Occupied" qui est au cœur du problème. L'idée de départ, due à notre très cher Jo Nesbo, d'une prise de contrôle d'une Norvège riche en énergie par la Russie, et ce à la demande de l'Union Européenne inquiète du chantage exercé par un gouvernement norvégien "vert", était amusante... Encore aurait-il fallu que ses répercussions et son évolution soient construites avec un minimum de rigueur "politique", sans même parler de pure et simple "logique" : or, le "scénario" (et ça écorche la bouche d'utiliser ce terme pour parler de ce que l'équipe de Erik Skjoldbjaerg et Karianne Lund nous a pondu ici) échoue à tous les niveaux !


Si les Français accepteront sans doute l'idée d'un commissaire européen corrompu faisant passer ses intérêt financiers avant son poste (Hippolyte Girardot, qui rame en vain pour donner à son rôle un peu de consistance...), il sera plus difficile d'admettre ces images ridicules de jeunes manifestants dans les rues de Paris, bien loin de la réalité de nos "gilets jaunes"... ce qui fait qu'on n'ose songer à ce qu'un Norvégien ira penser de l'extrapolation proposée ici de la situation de son pays ! Incapable donc d'adhérer, et donc de s'intéresser à l'histoire, le téléspectateur en est réduit à se contenter d'un vague thriller mal rythmé - avec un enchaînement absurdement rapide de situations qui naissent et se résolvent sans que l'on se sente aucunement impliqué, et de rebondissements absurdes (pensez seulement à la mort de l'oligarche russe, hilarante !) -, filmé comme un téléfilm moyen des années 90, et surtout terriblement mal interprété. On imagine bien d'ailleurs la souffrance que le tournage de "Occupied" a dû être pour ses acteurs, laissés à l'abandon avec une seule directive : réciter des textes sans intérêt en arborant EXACTEMENT la même expression durant l'intégralité des huit épisodes !


Quant au coup de théâtre obligé du dernier épisode, il n'a évidemment ni queue ni tête, ce qui nous laisse déprimés quant à la perspective d'une troisième saison...
[Critique écrite en 2020]


Saison 3:
Une fois les méchants Russes partis de Norvège, que peut bien nous raconter "Occupied", série définitivement en roue libre depuis la fin de sa première saison ? Eh bien, encore des méchants Russes, qui, comme on le sait, essaient désormais d'influencer les élections dans une bonne partie du monde, démocratique ou non. Si l'on rajoute à ça les méchants nationalistes toujours prêts à prendre les armes pour défendre les valeurs "nationales" (norvégiennes en l'occurrence, donc) et bouter les immigrés hors des frontières, les méchants collabos qui se sont enrichis sans vergogne pendant l'occupation (on passe assez près de la tonte obligatoire pour les femmes ayant couché avec l'occupant, comme quoi, rien ne change...), les méchants écolos qui ne sourient jamais et sombrent allègrement dans le terrorisme, on va dire que la coupe est bien pleine.


Le problème n'est pas que ces sujets politique - bien d'actualité - ne soient pas pertinents, mais que leur accumulation dans une seule intrigue, qui plus est mal écrite, médiocrement mise en scène et interprétée sans talent, donne en permanence l'impression d'un gloubi-boulga indigeste. Rajoutons pour être dans l'air du temps un couple lesbien en désir d'enfant et une ado rebelle et suicidaire, et on se demande comment Karianne Lund et Erik Skjoldbjærg (Jo Nesbø, rappelons-le, ayant lâché l'affaire depuis longtemps) ont pu penser que "Occupied" pouvait porter tant de sujets en évitant le plus possibles incohérences hilarantes et raccourcis déstabilisants...


Sans aucune empathie pour des personnages flous aux actes régulièrement illogiques, le téléspectateur a très vite l'impression d'être largué, et ne cherche plus ni à comprendre ni même à s'intéresser au destin de nos pantins norvégiens. Lorsque la saison 3 s'achève sur une hécatombe convenue, il ne peut plus que souhaiter en avoir terminé avec cette histoire sans queue ni tête.
[Critique écrite en 2020]
Retrouvez cette critique et bien d'autres sur Benzine Mag : https://www.benzinemag.net/2020/10/03/netflix-occupied-les-aleas-dune-serie-de-politique-fiction-en-roue-libre/

EricDebarnot
4
Écrit par

Créée

le 13 févr. 2017

Critique lue 2.4K fois

7 j'aime

1 commentaire

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 2.4K fois

7
1

D'autres avis sur Occupied

Occupied
tmt
9

fint.

La saison vient tout juste de se terminer sur arte, et on peut dire que les deux derniers épisodes permettent de donner à la série toute sa puissance. La force de cette série, c'est son intelligence...

Par

le 18 déc. 2015

22 j'aime

3

Occupied
RaZom
7

On sait tous d’où ça vient & où ça mène… (S. Høyem)

C’est peut-être l’une des caractéristiques de la sobriété : à la différence de certains concurrents, Arte met en avant ses programmes sans pour autant s’autoproclamer "créateur d’œuvres originales"...

le 23 déc. 2015

15 j'aime

Occupied
olivierclaverie5
1

Invraissemblable bêtise

Occupied est une série géopolitique complètement absurde et par là une immense déception. L'idée était excellente, malheureusement, quand on écrit un scénario basé sur une intrigue politique, un...

le 20 févr. 2018

12 j'aime

9

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

205 j'aime

152

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

191 j'aime

115

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

190 j'aime

25