Long Live the Clone Club

Le hasard du calendrier fait que la saison des récompenses approche, pour les films autant que pour les séries, et que les nominées pour les Golden Globes 2016 sont désormais connues : Caitriona Balfe, Viola Davis, Eva Green, Robin Wright et Taraji P. Henson. Toutes sont des actrices particulièrement talentueuses et méritent leur place dans la liste, mais tout comme l'Oscar de la Meilleure Actrice a parfois été sous-titré "...qui ne s'appelle pas Meryl Streep", les awards pour les séries TV depuis maintenant 3 ans ne peuvent espérer autre chose que la seconde place après Tatiana Maslany.

/!\ Spoilers des 2 premiers épisodes./!\

Tatiana Maslany, c'est l'héroïne d'Orphan Black, cette petite série télé canadienne, où elle interprète Sarah Manning, une junkie/arnaqueuse orpheline à la recherche du gros coup qui lui permettra de mettre main basse sur suffisamment d'argent pour refaire sa vie ailleurs avec son frère adoptif Felix et sa fille Kira. Un soir, elle assiste au suicide d'une jeune femme lui ressemblant étrangement, Beth Childs (Maslany également), dont elle décide de voler l'identité afin de vider ses comptes en banque. Mais le plan se complexifie considérablement quand Sarah découvre que Beth était flic, et lorsqu'un de ses contacts, une Allemande nommée Katja Obinger (Maslany) partageant la même ressemblance physique est abattue sous ses yeux. Cela amène Sarah à rencontrer Alison Hendrix et Cosima Niehaus (Maslany x2), qui lui révèlent qu'elles sont toutes des clones que quelqu'un cherche à éliminer.

Orphan Black est une série imparfaite, que ce soit clair. Le rythme est parfois inégal, certains arcs narratifs tiennent moins bien la route que d'autres, et le puzzle romantique tend à êtreun poil trop présent par séquences. Néanmoins, c'est loin d'être suffisant pour occulter ses très nombreuses qualités, en premier lieu l'interprétation proprement époustouflante de Tatiana Maslany, qui à ce jour (après trois saisons) a interprété pas moins de dix clones allant de la gamine de la rue débrouillarde à la geek baba cool, de la mère au foyer stressée à la tueuse instable, ou de la PDG froide à la styliste enthousiaste. Mais l'intérêt d'une série mettant en scène des clones est bien évidemment la possibilité pour les personnages de se faire passer les uns pour les autres, et les performances de Maslany dans le rôle d'"un clone qui joue un clone" sont encore plus magistrales et incroyables à regarder, et d'autant moins lassantes que le contexte alterne avec maestria entre le drame d'anticipation sérieux sur fond de conspiration et le vaudeville.

Mais au-delà de cette performance qui mérite tous les superlatifs, Orphan Black est une série redoutablement intelligente et intensément progressiste. Les thèmes abordés sont résolument féministes - le triptyque Orphan Black, Orange is the new Black, Jessica Jones est incidemment disponible sur le Netflix français - allant de l'indépendance à la maternité en passant par le genre et le droit à disposer de son propre corps. Alors certes, rayon anticipation, ce n'est pas aussi solide que Person of Interest ou aussi léché que Jessica Jones, mais l'intelligence de l'écriture et la qualité de l'interprétation sont largement suffisantes pour faire d'Orphan Black une des meilleures séries du moment, et de Tatiana Maslany de très loin la plus grande actrice du petit écran.

Long live the Clone Club.