Voyageant d'une série à l'autre, Orphan Black m'intéressait et m'a surpris dans le bon sens du terme. Je m'attendais simplement à une bonne série, efficace, mais elle s'est montrée meilleure encore que mes expectatives. Peu de séries parviennent à happer l'attention du téléspectateur dès la première scène et la conserver tout du long. Pour ma part, elle a habilement réussi cette étape.
Traiter d'histoire de clones sous fond de complots impliquant les dérives de la science moderne, spécifiquement la génétique, n'est guère aisé. Il s'agit d'un thème maintes fois exploité durant ces dernières années. Mais le traitement ici se révèle particulièrement bon : Orphan Black tient son concept et l'exploite de toutes les manières possibles. Ainsi, les clones ne se content pas d'exister : elles interagissent entre elles, ce qui mène aux quiproquos habituels, mais qui vont ensuite plus loin en construisant véritablement le récit.
Inévitablement, quand on pense à Orphan Black, on sait qu'elle dépend beaucoup de son actrice principale, Tatiana Maslany. Il est plutôt rare maintenant qu'une série soit portée par une seule personne, mais ici, cela va même au-delà. Toutes ses performances sont remarquables. Que ce soit Sarah Manning, tantôt dealeuse et mère de famille, parfois perdue mais souvent déterminée, Cosima, scientifique tiraillée mais brillante, Alison, chrétienne paranoïaque et opportuniste, Helena, psychopathe au grand coeur ou Rachel, chef d'entreprise, elle interprète chacun de ses rôles à merveille. Elle donne du sien par bien des manières : accent, gestuelle, caractère, réactions, elle maîtrise tout à la perfection. Je n'ose pas imaginer l'effort que cela lui demande : Orphan Black mérite d'être regardée rien que pour elle. Même ses rôles plus secondaires, comme Mika et Krystal, nuancent encore son jeu d'actrice bluffant.
Cependant, les autres personnages ne m'ont pas paru fades à côté. Bien souvent, les secondaires ont tendance à disparaître, à l'instar de Victor et Cal, voire même Art, mais les autres se glissent bien dans l'histoire. Le charisme de Leekie, l'ambiguïté de Delphine, l'"humour" de Donnie, l'opiniâtreté de Siobahn. Même des personnages comme Felix, clichés de prime abord, m'ont vraiment plu. Après, peut-être que de saison en saison, les personnages ont tendance à aller et venir, mais le constat demeure identique.
Adoncques, attaché comme je l'étais, j'ai vu défiler les épisodes. Parfois, je dois avouer que la série part loin dans ses complots et intrigues abstrus. Peut-être est-ce ce qui fait son charme. De bout en bout, cela reste du tout bon. En fait, Orphan Black est pour moi une série complète : on sait à quoi elle ressemble et ce qu'elle vaut, mais elle est arrivée à me surprendre à plusieurs reprises face à cet enchaînement cohérent de scènes variées. J'ai bien ri, j'ai été ému, touché, et je ne me suis jamais ennuyé, alors que la quatrième saison montre tout de même que le concept possède des limites.
La forme de l'histoire sied bien au fond, notamment cet esthétique "très propre" qui correspond à cette ambiance ultra-moderne qu'elle instaure dès le début. Cet aspect ne peut pas plaire à tout le monde : l'homosexualité est très présente, les femmes dirigent les entreprises et soumettent souvent les hommes, on voit même un semblant de plan à 3, de BDSM et de transexualité. Heureusement, comme je l'ai dit, ces éléments se glissent naturellement dans l'histoire et ne m'ont pas rebuté.
Par ailleurs, j'ajouterai que cette forme est soignée de bout en bout. La musique est très appuyée, souvent envoûtante et émotive. Quant à la mise en scène, elle me semble indicible : sans être formatée, elle convient elle aussi au récit raconté. Les dérives de la génétique sont accusées au sein d'un enchevêtrement d'intrigues parfois inégales mais néanmoins accrocheuses. Entre la Neolution, Brightborn, Castor, on ne sait pas toujours où donner de la tête. Ce n'est pas sans défaut, par exemple, j'aimerais qu'Alison soit plus présente du côté de ses sœurs, je trouve que certains personnage finissent par se ressembler (comme Evie et Rachel), mais sinon, j'ai souvent été scotché à mon écran.
La fin de la saison 1, La mort de Paul, celle de Kendall en sont des exemples frappants.
Orphan Black constitue donc l'un de mes coups de cœur de cette année, et une de mes séries favorites sans être la meilleure non plus. Immersive, riche en émotions, portée par une actrice talentueuse, je lui pardonne de se perdre parfois dans des intrigues étranges. Une très bonne série.