Généralement, je m'abstiens.
Je m'abstiens d'écrire une critique après avoir vu un seul et unique épisode.
Je m'abstiens de noter une série lorsque, encore une fois, je n'ai vu qu'un épisode. Les mauvaises surprises peuvent survenir à tout moment, comme nous l'ont enseigné les tristes séries-soufflé, se dégonflant après leur épisode d'accroche, ou ne dépassant pas leur propre postulat de départ.
Et pourtant, là, je craque, j'entrave mes propres règles, en osant un 8 prudent (là où l'épisode en question était tout bonnement excellent de justesse, tant en terme d'ambiance, de rythme, qu'en terme d'adaptation).
J'ose, de façon un peu tiède, certes, mais j'ose tout de même, car les adaptations de comics hors Marvel (car n'oublions pas la force des séries Netflix avec le Millerien Daredevil et le sombre et angoissant Jessica Jones), disons, ont subi nombre d'outrages jusqu'à présent.
La meilleure série d'épouvante british, passage obligé des plus grands scénaristes de la génération passée, Hellblazer, donc, s'est retrouvée piétinée par une adaptation plate et poseuse, dépassant à peine le niveau d'un film qui n'avait d'Hellblazer que le nom (même pas, en fait, puisque le film s'appelle Constantine!).
Le sombre personnage échappé des pages de Neil Gaiman pour être magnifié par Mike Carey, l'un des génies injustement méconnu de la génération d'or à laquelle nous avons eu droit en terme de scénario, trônant sans fausse pudeur aux cotés d'un Alan Moore, d'un Grant Morrison, d'un Gaiman, représentant même peut-être le chaînon manquant qui lie cette Sainte Trinité et la relie au plus jeunes et plus punks Warren Ellis, Garth Ennis, Mark Millar, pour ne citer que quelques noms, bref, le Lucifer de Carey est devenu un guignol simple d'esprit tourné en ridicule à chaque épisode, un simple gimmick sur pattes.
Mais ici, Outcast fait un sans faute, trouve immédiatement son rythme, et décide de tout montrer, dans un respect qui n'est pas sans évoquer l'abord burné qu'avait eu HBO pour la première saison de Game of Thrones. Sauf que là, pas de contrées imaginaires, Outcast s'ancre dans la noirceur du quotidien, et cet épisode d'ouverture ne nous épargnera rien, respectera le texte, l'ambiance, le propos du comics tout en, je le répète, trouvant immédiatement le rythme idéal, sautant du comics à la série télé avec une élégance dont peu peuvent se targuer.
J'avais reproché à Christophe Gans de ne pas saisir la différence entre le medium BD et celui du film pour son Crying Freeman, adaptation à peine médiocre d'un manga singulier mais loin d'être inoubliable, en transposant certaines scènes à la case près, révélant leur maladresse, leur impossibilité plastique, leur faiblesse, là où le passage d'un support à un autre est sensé magnifier, dynamiser, utiliser les nouveaux outils pour offrir de nouvelles perspectives.
Gans réussira autrement mieux son adaptation de Silent Hill, certes imparfaite mais tellement imprégnée de l'amour sincère du matériau d'origine. Mais je m'égare...
Tout ça pour dire que d'un medium à un autre, la transition est parfois houleuse et même les meilleures intentions ne sont pas nécessairement couronnées d'un succès.
D'où mon admiration face à la performance de cet unique épisode d'Outcast.
(Mais comme on nous annonce les créateurs de Walking Dead aux commandes, la surprise face à cette prouesse devrait être moindre, en même temps).
Bref, vivement le 2eme épisode, comme on dit!