Je me méfie toujours des buzz Netflix : les séries les plus populaires de la plateforme sont rarement les meilleures. Ce qui explique pourquoi j'ai tant tergiversé pour jeter un oeil à Ozark, malgré les nombreuses critiques dithyrambiques.
Et hélas, la règle se vérifie à nouveau.
Mettons les choses au clair d'emblée : Ozark n'est pas une mauvaise série en elle-même. Mais j'ai du mal à comprendre les éloges qu'elle récupère. Enfin non, je peux comprendre : la série est bien produite, et elle cherche de façon assez habile à faire illusion (et il faut croire qu'elle réussi). Elle part également d'un point de départ assez populaire dans l'imaginaire US : le pauvre quidam qui se retrouve embrigadé dans un trafic qui le dépasse. Et si l'ensemble est lié de façon directe ou indirecte au trafic de drogue, c'est encore plus facile. On pense évidemment à des classiques du genre comme Weeds ou Breaking Bad. On a d'ailleurs beaucoup comparé la série avec les pérégrinations de Walter White, ce qui est injuste et pas très flatteur pour la série Netflix : Ozark est loin d'avoir la qualité d'écriture de Vince Gilligan, encore moins son art de manier drame et comédie.
D'ailleurs, de comédie , il y en a peu dans Ozark, la série reste uber serious, avec filtre bleu ajouté sur l'image pour conférer à l'ensemble un ton froid. Si on ajoute à ça un côté très bavard et une thématique de base par super fun à voir à l'écran (le blanchiment d'argent, ça sonne bien et ça a l'air cool dans l'imaginaire des gens mais en fait, c'est beaucoup moins glamour à représenter) et vous obtenez une série qui m'a un peu rappellée "Margin Call", c'est à dire un truc qui voudrait se donner des grands airs mais qui n'a en réalité pas grand chose à raconter dans le fond.
Ainsi, passé un premier épisode sympathique mais pas follement original, où il faut déjà fermer les yeux et accepter certains événements peu crédible, la série brasse du vide pendant une bonne moitié de saison, temporisant beaucoup trop, sans pouvoir se reposer sur autre chose tels que ses personnages.
Il faut déjà accepter que Marty Byrd, ce mec fade et effacé, puisse convaincre un gros baron de la drogue, qu'il peut blanchir son argent dans le trou du cul du monde. Mais soit, tout ça aurait pu être justifié par une étude de caractère du personnage principal, on aurait pu justement en faire un type inintéressant, qui se fait chier dans sa vie de famille banale et qui se découvre des couilles au moment où il lui arrive une mésaventure, le type qui se transcende devant la perspective de la mort et qui d'une façon un peu perverse prend du plaisir dans cette situation. Mais non, Marty Byrd, et par extension l'intégralité des personnages, sont écrits un peu n'importe comment, parfois à la limite de l'incohérence, souvent creux. Difficile de s'intéresser à leur sort tant ils manquent de complexité et même tout simplement d'intérêt.
Gravitent autour de cette famille d'autres protagonistes à l'intérêt très limité (le jeune agent immobilier et ses mommy issue, la gérante du bar, le proprio de la maison), voir un peu nawak sur les bords (l'agent du FBI et son histoire d'amour avec le redneck, probablement le truc le plus improbable de la série dont je questionne encore l'utilité, le prêtre) et des antagonistes tout aussi peu convainquant : tous ces personnages n'ont qu'une fonction, être des obstacles artificielssur le chemin des Byrd et les empêcher de blanchir trop rapidement les 8 millions, le temps d'arriver à la fin de saison. Il faudra attendre l'épisode 7 pour avoir quelques chose d'un peu consistant à se mettre sous la dent et un début de propos plus global (sur la façon dont le traffic de drogue constitue une sorte d'économie souterraine) mais ce sous-texte ne sera qu'à peine esquissé, plus vraiment développé par la suite.
La série avance donc sur un rythme un peu ronflant, ne réussissant jamais à faire disparaitre cette impression qu'elle aimerait être un grand programme dramatique mais que les limites de l'écriture l'empêche de décoller. On attend vainement qu'il se passe quelque chose d'excitant dans la vie des Byrd, qu'on ne sent jamais vraiment en danger, et la série essaie bien de bousculer tout ça, mais tout sonne faux, jusqu'à un final qui accumule les rebondissements du même acabit, toujours avec ce sentiment de superficialité, toujours avec cette impression qu'il manque une vision à long terme et que la série est écrite au jour le jour, sans trop savoir vers quel horizon elle se dirige.
Mais tout ça est suffisamment bien produit pour que le grand public ait l'impression d'être face à une grande série, un programme noble et intellectuel. Moi, je reste avec cette fâcheuse impression qu'on a essayé de me vendre de la camelote emballé dans un joli écrin.