La saison rouge

Les séries allemandes commencent à se faire un nom sur la scène internationale : après "Generation War", et plus récemment le gros succès de "Dark", c'est au tour de "Pagan Peak" d'apparaître sur les plateformes de vidéos en streaming.

Il s'agit en fait d'une production germano-autrichienne, reprenant de manière indirecte le concept inauguré par "Bron | Broen" alias "The bridge", à savoir la découverte d'un cadavre pile sur la frontière commune à deux pays.
Au-delà de ce point de départ identique, "Der Passer" (le titre en VO) développe son propre scénario, en s'appuyant sur la culture locale montagnarde, entre folklore bavarois et légendes tyroliennes.

Ainsi, le serial killer traqué par notre binôme de flics mal assortis prend l'apparence du Krampus, une figure mythologique locale (qui pourrait s'apparenter à notre Père Fouettard). Ce personnage masqué effrayant renvoie au paganisme antique des peuplades locales, le tueur revendiquant un retour à la nature et aux valeurs écologiques.
Un thème bien dans l'air du temps, qui offre une (légère) dimension politique voire existentielle à la série, dans laquelle il sera également question du sort des immigrés clandestins.

Si le scénario ne parvient que rarement à captiver, "Pagan Peak" peut s'appuyer sur une réalisation élégante, à la fois lente et ample, dont la dimension parfois contemplative fait honneur à ses décors naturels superbes et inquiétants. L'ambiance hivernale ouatée de la série - entrecoupée de soudains accès de violence - évoque par moment la mise en scène atmosphérique de sa consœur "Dark" (dans une version plus automnale).

La série diffusée sur Netflix bénéficie en outre d'une distribution convaincante, à commencer par l'autrichien Nicolas Ofczarek, qui parvient à transcender son rôle cliché de flic borderline. Les seconds rôles se montrent à la hauteur, à l'image de Franz Hartwig, Hanno Koffler ou Lukas Miko.
En revanche, la blonde Julia Jentsch s'avère parfois agaçante, souffrant en outre d'un visage assez disgracieux.
Dommage également que l'écriture des personnages ne soit pas toujours à la hauteur de l'interprétation.

Finalement, la série écrite par Cyrill Boss et Philipp Stennert dispose de multiples atouts, et pourtant le charme n'opère pas complètement.
Malgré une volonté de se démarquer des séries grand public (avec par exemple un dénouement très sombre), "Pagan Peak" arrive sans doute un peu tard - de trop nombreux cop shows plus ou moins similaires ayant déjà creusé le sillon du buddy movie et de la chasse au serial killer.
La série allemande se laisse suivre sans déplaisir, mais sans grande passion, ayant sans doute le tort par ailleurs de dévoiler trop rapidement l'identité du tueur.