Peaky Blinders
7.9
Peaky Blinders

Série BBC One, BBC Two (2013)

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Les lames de rasoir ne sont pas dans les sourcils de Tommy, mais dans ses répliques tranchantes

Peaky Blinders, c’est ce genre de série qui te fait penser que, peut-être, enfiler un costume trois pièces pour aller casser des gueules est une option de carrière légitime. Loin d’être un simple drame de gangsters, c’est une fresque historique où la classe, la violence, et les manigances politiques se mélangent dans un cocktail aussi explosif qu’un verre de whisky servi dans les bas-fonds de Birmingham. Et là, au milieu des fumées de cigarettes, des regards menaçants, et des néons industriels déprimants, trône l’indétrônable Tommy Shelby, prêt à faire tourner tout le monde en bourrique avec une cigarette à moitié consumée et un regard qui te glace le sang.


Tommy Shelby, joué par Cillian Murphy, est ce genre de personnage qui pourrait te vendre un cheval mort tout en te convaincant que c’est une Ferrari. Le gars est une énigme : aussi charismatique que terrifiant, aussi calculateur qu'imprévisible. On n’a pas juste affaire à un chef de gang qui veut gravir les échelons du crime, non. Tommy, c’est un stratège, un manipulateur hors pair, qui pourrait probablement prendre la place de Churchill juste en levant un sourcil (et en l’intimidant avec une tirade bien placée). Il ne parle pas beaucoup, mais chaque mot qui sort de sa bouche est aussi affûté que les lames cachées dans ses casquettes.


L’histoire des Shelby, c’est avant tout celle d’une famille qui tente de grimper au sommet, de passer de petits malfrats des rues de Birmingham à des acteurs majeurs du pouvoir britannique. La série se déroule juste après la Première Guerre mondiale, et tout le monde porte encore les cicatrices (physiques et mentales) de ce conflit. Et ça, Peaky Blinders le montre brillamment. Ce n’est pas juste une histoire de gangsters qui se battent pour le contrôle des quartiers. Non, ici, on parle de guerre intérieure, de blessures non cicatrisées, de démons qui hantent chaque personnage. Tommy est littéralement hanté par ses souvenirs de guerre, et cela se ressent dans chaque décision qu'il prend.


Visuellement, Peaky Blinders est un régal. Les décors industriels de Birmingham, avec ses usines crachant de la fumée, ses rues boueuses, et ses bâtiments délabrés, créent une atmosphère aussi lourde que les choix moraux des personnages. Mais ce qui distingue vraiment la série, c'est son esthétique anachronique. La bande-son, avec des morceaux modernes de Nick Cave, Arctic Monkeys et Radiohead, s'intègre étonnamment bien à cette époque des années 1920, donnant à chaque scène une énergie viscérale. Les ralentis dramatiques où Tommy et ses frères marchent avec leurs manteaux flottants au vent sont tellement stylés qu’on se demande si ces gars-là ne passent pas plus de temps à soigner leurs entrées qu’à diriger leur empire criminel.


Et puis, il y a les autres Shelby. Arthur, le frère au bord de l’explosion permanente, une bombe à retardement qui ne sait jamais quand il va péter un câble ; Polly, la matriarche de la famille, qui gère les affaires d’une main de fer, avec des instincts qui font pâlir même Tommy ; et John, toujours en mode "Je vais taper d’abord et réfléchir après." C’est une famille dysfonctionnelle où l’amour se manifeste généralement par des échanges de coups de poing ou des plans machiavéliques, mais malgré tout, ils sont indéfectiblement liés. Les Shelby, c’est un peu une version hardcore des Corleone, avec plus de casquettes à lames et moins de fettuccine.


L’intrigue politique de la série monte d’un cran à chaque saison. Ce qui commence comme une simple lutte pour contrôler Birmingham se transforme en une guerre d'influence qui touche les sphères les plus hautes de l'État britannique. À un moment donné, tu te dis : "Attends, Tommy Shelby est censé être un gangster, comment est-ce qu’il se retrouve à discuter avec des politiciens ?" Mais c’est là tout le génie de Peaky Blinders. La série te montre que le crime, la politique, et l’aristocratie sont parfois beaucoup plus proches qu’on ne le pense, et que Tommy Shelby n’est peut-être pas qu’un simple voyou des rues.


Côté bémol, Peaky Blinders peut parfois se perdre dans ses propres machinations. Les intrigues deviennent de plus en plus complexes, les alliances et trahisons s’enchaînent à un rythme qui te laisse un peu essoufflé. Parfois, tu te demandes si les scénaristes ne se sont pas amusés à rendre la série volontairement labyrinthique juste pour voir qui tiendra le coup. Et puis, il y a ces moments où la série peut sembler un peu trop stylisée, avec des ralentis et des plans artistiques qui flirtent avec le maniérisme.


En résumé, Peaky Blinders est une série qui mélange la classe et la brutalité, l’élégance des costumes et la violence des coups de poing, le tout porté par un Cillian Murphy au sommet de son art. C’est une saga épique où la frontière entre criminel et homme d’affaires s’efface, où chaque mot est une arme, et où le whisky coule à flots entre deux guerres de territoire. Une série qui te fait comprendre que, parfois, la vraie force n’est pas dans les poings, mais dans la capacité à manipuler tout le monde en restant impeccablement coiffé.

CinephageAiguise
8

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Créée

le 8 oct. 2024

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