Ping Pong
8.3
Ping Pong

Anime (mangas) Fuji TV (2014)

Dans la famille des maîtres du manga, je demande Taiyou Matsumoto. Auteur de nombres d’œuvres alternatives mais acclamées (Amer Béton, Le Samouraï Bambou ou encore Printemps Bleu), le mangaka a su se forger un propre univers à la fois visuel et narratif, usant d'un trait assez unique dans le paysage de la bande-dessinée nippone. Si son oeuvre avait déjà été adaptée en long-métrages (Amer Béton, et même Ping Pong dans un film live sorti en 2002), elle n'avait toujours pas été transposée en série animée. Il faut dire que les seinen animés ne courent pas les rues (on attends toujours l'adaptation d'un autre manga de Urasawa), et la fameuse case noitaminA de Fuji TV a été l'occasion de voir ce genre d'animés un peu différent fleurir chaque saison - cette fois-ci c'était le tour de "Ping Pong", adaptation donc de Matsumoto qui agit ici en tant que scénariste à travers une collaboration avec Masaaki Yuasa chargé, lui, de la réalisation. Yuasa, rendu célèbre pour avoir réalisé "Mind Game" en 2004 (produit par ailleurs pas le studio 4°C, lui même à l'origine de l'adaptation de Amer Béton) et qui a ensuite fait ses armes sur plusieurs animés remarqués (Kemonozume, The Tatami Galaxy et Kaiba).

Sur le papier, "Ping Pong" fait donc rêver : rencontre ultime entre un mangaka de génie et l'un des réalisateurs les plus doués et original de sa génération, on sentait la bombe apparaître. Et elle est arrivée : dès le premier épisode, "Ping Pong" fait l'effet d'un vent d'air frais après une saison hivernale pauvre en animés réussis, mais aussi d'une véritable claque. Visuellement, c'est magnifique. Étrange, voir dérangeant, mais magnifique. Les parti-pris graphiques sont risqués, potentiellement casse-gueules, mais la folie de l'ensemble, l'énergie et le dynamisme des dessins qui se calquent parfaitement sur celui du scénario, tous les ingrédients sont là pour souligner la réussite de l'animation. Réussite encore plus accentuée par la qualité du montage, déstabilisant sur le papier (avec son écran scindé) mais qui parvient à capter l'action, le voyage de la balle de chaque côté de la table.
Mais ce serait bien mentir que de réduire "Ping Pong" à sa seule beauté plastique : à l'image du manga, le scénario est passionnant. Une seule ligne directrice, pas de personnages secondaires inutiles, seul point central : celui d'une amitié. Une amitié sans cesse mise à mal, certes, sans cesse chahutée et bousculée, mais qui sert de diégèse mais aussi d'enjeu scénaristique. Voir s'achever "Ping Pong" au bout de seulement onze épisodes était donc prévisible. Triste, mais prévisible : ils ont raconté ce qu'ils avaient à raconter. Certains auraient voulu en savoir plus ou rester davantage en compagnie de Smile et Peko, mais c'est pourtant l'une des forces de la série : s'arrêter quand il fallait s'arrêter. En beauté, sans grande frustration, proposant une morale et une explication logique aux virages délirants des précédents épisodes. "Ping Pong" a toujours été une série intelligente - très intelligente - parlant à la fois de la vie, de sa futilité ou de sa finalité, du destin et de l'amitié, de la rivalité et, aussi, du sport.

Pas besoin d'être un expert en tennis de table pour apprécier la série comme il se doit. Plus qu'une belle perle égarée, "Ping Pong" est un petit chef d'oeuvre dont on se souviendra encore longtemps. Référence instantanée, rendez-vous hebdomadaire indispensable devenu expérience marquante et inoubliable. À voir, à déguster, à revoir et à savourer - pas loin de la perfection, loin de ce qu'on pourrait en attendre, spectacle jubilatoire, produit unique, animé de sport ultime et réflexion sur la vie des plus pertinentes - le Héros est bel et bien apparu.

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le 23 juin 2014

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Vivienn

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