Etouffe-chrétien
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Depuis le Bureau des légendes et Lost, j'attendais LA série qui allait me transporter, je l'ai trouvée dans Sermons de minuit.
Et j'ai envie de la défendre car les critiques négatives lues me semblent très injustes au regard de sa qualité.
En quelques années, la qualité des séries Netflix s'est considérablement améliorée.
Le soin pris à la contextualisation est remarquable. Nous suivons le quotidien d'une petite île vivant de la seule pêche, appauvrie par une marée noire quelques années auparavant. Les maisons en bois, les marais, les bateaux de pêche, les dimanches à l'église... l'atmosphère est rude, les paysages désolés et l'homme se débat pour survivre. On ne trouve pas l'habituelle idéalisation des séries américaines et ça fait du bien.
Les personnages sont très attachants, par leurs défauts autant que par leurs qualités : une jeune femme revenue sur l'île enceinte mais acceptée par la communauté qui ne peut se permettre de vivre dans le conflit, une jeune médecin s'occupant de sa mère âgée, un jeune homme hanté par la culpabilité qui s'est voulu émancipé et a été emprisonné pour avoir été le responsable de la mort d'une jeune fille, son père dépassé, sa mère débordante d'amour, son jeune frère avide d'émancipation lui aussi, une jeune fille handicapée après un accident de chasse dont le responsable est devenu asocial, ayant pour seule compagnie son chien, un shérif musulman et son fils...Cette société reproduit en microcosme les joies, les peines, les peurs, les drames de toute société humaine.
Alors bien sûr, il faut être patient . Le rythme s'adapte à la vie pesante des habitants, accompagné par une bande-son très travaillée, souvent des chœurs religieux de toute beauté. Mais dans cette atmosphère si bien installée va se produire un événement qui va tout changer : l'arrivée d'un jeune prêtre venant remplacer le prêtre de l'île resté sur le continent pour raisons de santé. Et soudain, dans ce monde très prosaïque, surgit le surnaturel. D'abord très discret, distillé par très fines allusions, il va prendre de l'importance jusqu'à secouer la petite communauté par ce qui pourrait apparaître comme des miracles. Le personnage de l'assistante du prêtre, sorte de fanatique à l'apparence trompeuse, amplifie et guide alors la foi authentique des croyants sur des chemins dangereux.
Cette série nous parle du mal à l'oeuvre, le plus dangereux : celui qui prend les apparences du Bien. On croit adorer Dieu, et on se laisse séduire par le diable, en l'occurrence une sorte de démon vampire qu'a importé le prêtre dans ses bagages. Parce qu'on refuse la vieillesse, parce que la mort fait peur, parce que l'amour est impossible, on laisse grandir le Mal si bien qu'il contamine vite toute la société. Une fois qu'il est installé et soutenu par le fanatisme religieux de quelques-uns et la passivité du plus grand nombre, il mène à sa perte l'être humain aussi sûrement qu'une épidémie.
On peut voir beaucoup d'allégories dans cette sorte de parabole moderne qui parle à notre époque passée maîtresse dans le renversement des valeurs. Ce qui est sûr, c'est que le vrai Bien n'est pas séduisant ni spectaculaire, quand il l'est, il n'est peut-être qu'une des apparences du Mal.
Rendre sensibles certains aspects de la spiritualité, voilà qui donne ses lettres de noblesse à la forme série.
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Créée
le 25 avr. 2024
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