Avant de commencer, je crois qu’il convient de préciser que je ne possède aucun attachement particulier envers les séries originales de She-Ra et Musclor/He-Man. Je connais leurs génériques respectifs, certaines de leurs chansons, et évidemment le design des personnages principaux, mais je n’ai pas souvenir d’avoir vu le moindre épisode dans les années 80/90. Il ne s’agit pas de séries de mon enfance. Je n’ai vu que le premier épisode d’He-Man il y a quelques années dans le cadre de mes activités de club, et celui de She-Ra récemment à l’annonce de cette nouvelle version. Dans un cas comme dans l’autre, je ne suis pas allé plus loin.
Lorsque She-Ra: Princesses of Power fût annoncée, j’ai immédiatement accroché à son univers graphique ; et comme elle serait proposée sur Netflix, je savais déjà que j’y jetterais un coup d’œil. Ce qui m’a réellement rendu impatient, c’est le nom de la responsable de cette série : Noelle Stevenson.
Noelle Stevenson est une scénariste et dessinatrice de comics, à qui nous devons notamment Nimona, ainsi que la création de Lumberjanes. Deux excellents titres se situant dans la veine de ceux qui me parlent le plus à l’heure actuelle. Elle a aussi écrit la mini-série du crossover Battleworld consacrée aux Runaways, un titre avec du potentiel mais limité et finalement peu mémorable (malgré la présence de Jubilee parmi les personnages principaux). Il est d’ailleurs intéressant de mentionner que ce Runaways: Battleword partage plusieurs points communs avec She-Ra: Princesses of Power, ce qui ne serait qu’un pur hasard si l’autrice n’était pas la même. Heureusement, personne n’a lu Runaways: Battleword. Ceci étant dit passons au vif du sujet.
Adora a été élevée depuis sa plus tendre enfance au sein de la Horde, afin de devenir soldat d’élite chargée de combattre la menace représentée par les Princesses et la Forêt des Murmures. Mais elle commence à faire un rêve étrange, dans lequel une entité vient l’enjoindre à sauver Etheria. Inexorablement attirée par la Forêt des Murmures, elle y découvre une épée devant faire d’elle She-Ra, la Princesse au Pouvoir.
Pour faire court : j’ai beaucoup aimé. Sans doute pas autant que je l’espérais, il faut dire qu’avoir Noelle Stevenson à l’écriture m’avait donné beaucoup d’espoir. Or, la série souffre de quelques menus défauts, sur lesquels je vais rapidement revenir.
Cette première saison ne dure que 13 épisodes, ce qui ne suffit évidemment pas à boucler tous les enjeux, comme à l’accoutumée avec Netflix. La fin de saison offre toutefois une conclusion satisfaisante pour une partie des enjeux, ceux de la saison suivante ayant été introduits précédemment. Mais j’en aurais voulu plus, une saison de 26 épisodes n’aurait pas été de refus. D’autant que le format oblige à précipiter certains passages – je pense à l’épisode consacré à Perfuma, reposant certes sur un schéma très classique, mais cela ne justifie pas pour autant une écriture aussi brusque. La fin semble mener vers un affrontement binaire entre deux catégories de personnages, ce que je trouve peu judicieux en l’état puisque ce sont bien les décisions de chacun qui les ont amenés là.
Ça c’est fait, nous pouvons passer aux points forts de She-Ra: Princesses of Power. Déjà, il s’agit d’une véritable série d’aventure, avec des enjeux forts et un scénario loin d’être prévisible, qui n’hésite pas à aborder des sujets graves – comme la disparition des proches – tout en demeurant destinée en premier lieu à un jeune public. Et cela fait plaisir de ne pas voir ce public considéré comme des andouilles, par opposition à de trop nombreux titres. Il s’agit d’un dessin-animé traité au premier degré, loin de tout cynisme, avec quelques très rares pointes d’autodérision, ce qui fait encore plus plaisir.
Avec Noelle Stevenson aux commandes, je m’attendais à voir des personnages féminins forts, des rôles positifs, le tout loin du physique de poupées Barbie des héroïnes de la série d’origine. Vous pouvez comparer n’importe quel protagoniste de la série des années 80 avec son équivalent moderne, le changement est saisissant, et se fait au profit de morphologies diversifiées loin des canons de beauté habituels. Un choix graphique que j’approuve totalement, trouvant la première She-Ra limite inhumaine (ce qui vaut aussi pour He-Man) car pensée avant tout comme une figurine articulée.
Les personnages ont des profils eux-aussi très divers, avec des personnalités parfois très standards, et d’autres bien plus atypiques. Comme Mermista, qui semble sans arrêt agacée par le monde qui l’entoure (voire complètement bourrée). Il y a aussi un pyromane, et aussi étonnant que cela puisse paraitre, c’est traité comme un gag. Et cela fonctionne. Adora possède quant à elle une progression forte durant la série, ce n’est clairement pas un personnage monolithique et immuable (comme aucun de ses compagnons d’arme), ce qui en fait une héroïne à laquelle il est possible de s’attacher.
Globalement, la série est très agréable à l’œil, avec ses couleurs associées à chaque environnement, des plus vives aux plus sombres lorsqu’il s’agit de revenir au monde dirigé par Hordak. Elle repose en grande partie sur une palette similaire à celle de Steven Universe, ce qui n’est probablement pas un hasard. Par contre, cela signifie qu’il s’agit d’un choix artistique clivant, auquel une partie du public (adulte) n’accrochera pas.
She-Ra: Princesses of Power ne repose pas uniquement sur son aventure mais aussi sur son humour, beaucoup, parfois trop mais elle sait se montrer sérieuse lorsque la situation l’exige. Il repose essentiellement sur du comique visuel et des personnages souvent très hauts en couleur. Il y a aussi des jeux de mot de temps à autre. Et un personnage à qui il ne faut pas confier une torche enflammée.
Je ne manquerai pas la seconde saison, même si j’ignore si elle a d’ores et déjà été annoncée. She-Ra: Princesses of Power n’est pas parfaite, en particulier en raison de son écriture, mais dispose d’une identité forte à la fois dans son histoire, son univers visuel, ses thématiques, et la façon dont elle les aborde.