Six pieds sous terre
8.1
Six pieds sous terre

Série HBO (2001)

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[ATTENTION CRITIQUE PLEINE DE SPOILERS]

[ON VOUS AURA PREVENUS]

J'allais mettre un gros 9♥ à Six Feet Under. C'est du HBO grand niveau, une excellente série pour laquelle je ne reviendrais que brièvement sur les innombrables qualités qui ont déjà été dites et redites dans bien d'autres critiques. Pour les citer à la pelle: une BO de DINGUE, une réalisation soignée, des acteurs supers qui campent des personnages de folie, des scènes d'intros géniales où l'on se demande toujours si la mort qui arrive va être celle attendue, des réflexions sur la vie la mort la société la spiritualité la drogue la famille, des scènes rêvées/hallucinées où les morts viennent parler aux vivants, le superbe Nathaniel Fisher Senior en tête...

Mais il y a quelques (tout) petits défauts qui apparaissent à partir de la saison 3 et qui m'ont fait me dire que je n'allais peut-être pas lui attribuer la plus haute note possible.

Déjà j'ai un poil de problème avec quelques persos secondaires, souvent parcequ'ils sont surexploités, à l'image d'Arthur, incarné par Dwight Schrute. Oui je dis bien Diwght et non pas Rainn Wilson, puisque les deux personnages sont vraiment trèèèès similaires, à tel point qu'on peut se dire que le personnage a été tellement traumatisé par son séjour chez les Fisher qu'il en est devenu le malade de The Office. Donc très drôle le temps de deux ou trois épisodes, mais qui devient vite un poil too-much, trop comic-relief en complet décalage avec le reste du décor. Et surtout la mère Chenowith qui est VRAIMENT too-much. Dès sa première apparition elle m'a donné envie de renier mes principes et lui mettre des tatanes dans la bouche suite à son "She's just jealous that we WERE hippies. Briefly!". Alors même si je veux bien que beaucoup de choses dans cette série reposent sur l'exagération, la caricature, la licence cinématographique qui fait de beaucoup de scènes et personnages une métaphore - à l'image de ces funérailles qui mettent toujours les Fishers (& Diaz) face à leurs propres problèmes et questionnements - là c'est pas possible, elle est vraiment trop horrible, insupportable, un cliché sur pattes qui me fait hérisser tous les poils de mon corps.
J'ai aussi eu parfois du mal avec George après quelques épisodes, même si ça s'est arrangé à la suite de l'arrivée de Maggie et des révélations qui en découlent.

Ensuite - et surtout - les histoires de fond qui me passionnent moins. Les deux premières saisons juste parfaites avec des arcs narratifs excellents et une chiée de moments EPICissimes: Nate qui fait face à ce retour forcé, Kroener qui veut racheter l'entreprise familiale, Nate le Saint homme Spirituel, Claire sous drogues, David sous drogues, Nate sous drogues, Nate qui découvre la vie cachée de Nathaniel Senior, la relation entre Nate et Brenda, Billy en mode fou furieux, la maladie de Nate...

Oui je parle beaucoup de Nate, mais ce sont justement les parties qui touchent à ce personnage, le vrai héros de la série, qui m'ont embêté. Que ce soit David avec ses peurs, ses faiblesse et son grand coeur caché sous ses costards sombres; Claire, sa découverte de la vie et des ses mystères, et sa grande sensibilité artistique; Ruth qui découvre la vie de veuve, son amour pour ses enfants et pour le camping, sa soeur Sarah... Tout est absolument génial y'a rien à dire, c'est du grand art. Mais j'ai été tellement malmené par ce qui arrive à Nate... Cette descente aux enfers qui assombrit cet homme pourtant si lumineux, ça m'attriste profondément.

C'est voulu et réfléchi, mais ça m'a fait mal de voir mon perso préféré sombrer comme ça. D'abord subtilement lors de son mariage avec Lisa où l'on sent qu'il se force à être heureux, puis toute la période sur la disparition de sa femme (dont la conclusion commence quand même sur cette scène splendide où Claire se balade dans le cimetière avec le fantôme du Grand Nathaniel Fisher Senior) et qui s'enchaine sur le deuil de Nate, le tout pour un ensemble un poil trop long de quelques épisodes. Sur la fin je ressentais ça un peu comme une excuse pour le faire se remettre avec Brenda - tout comme l'était la relation plutôt sympa de cette dernière avec Adam Kesher, euh excusez moi Joe - et vu que je savais pertinemment que c'était une mauvaise idée, ça m'a un peu énervé. Ca fait un peu redite, ça donne l'impression que toute la saison qui vient de se passer ne servait qu'à les remettre ensemble. En plus de l'enfoncer encore un peu plus dans sa tristesse et sa colère cachés sous son faux bonheur au fur et à mesure. Et ça m'attriste de voir ce rayon de soleil qu'est Nate disparaitre petit à petit sous ces couches de malheur... D'un point de vue scénaristique c'est bien fichu, surtout avec sa prise de conscience juste avant de mourir (au passage: j'ai bouffé assez de HBO pour savoir que les personnages qu'ont aime ont une fâcheuse tendance à mourir, MAIS BORDEL ON TUE PAS DEUX FOIS LE MÊME GARS, MERDE!!!), c'est super intéressant, je le reconnais. Mais bon sang ça m'a frustré, mais frustrééééé!

Bref, cette très légère baisse de perfection m'ont fait me dire que j'allais un peu pénaliser la série par principe.

Puis il y a eu cet épisode final.

J'étais sûr que la meilleure fin de série était celle de Breaking Bad, suivie de près par celle de The Wire, elle-même talonnée par les Sopranos.

Mais non, la meilleure fin de série de tous les temps c'est celle de Six Feet Under.

Point barre.

Après 5 saisons de plus en plus sombres et plus en plus tristes, alors que tout part en couilles pour tout le monde, il ne pouvait y avoir de meilleur choix que cet happy-end en apothéose, cet épisode de 1h10 complètement dantesque où toutes les histoires, toutes les relations arrivent à leur terme pour le plus grand bonheur de chacun.
[Attention, les paragraphes qui vont suivre vont dégouliner de synonymes et répétitions sur le champs lexical du bonheur]

Quel pure joie de voir ce bébé prématuré bien portant; de voir Ruth enfin se lancer tête première pour profiter de la vie tandis que cette scène dans les escaliers avec Brenda nous fait comprendre qu'elle sera la seule VRAIE grand-mère des filles de son premier né; David qui se libère de ses démons et se voit enfin être une véritable famille avec Keith et leurs deux enfants; ce con d'Olivier qui offre son tremplin vers l'avenir à Claire et la grande famille réunie Fisher qui permet à la famille Diaz de poursuivre sa propre recherche du bonheur...

Et surtout, quelle émotion de voir toute l'obscurité qui a gagné Nate et qui imprègnait même son fantôme réduite à néant, tandis qu'il tient son bébé dans les bras, heureux comme il l'a toujours mérité. Scène de pure plénitude amplifié par cette phrase qui est peut-être la plus forte de la série: "Hi. We never met, I'm Nathaniel." La cerise sur le gâteau des scènes de fantômes, qui efface à jamais le doute quant à la réalité de ces contacts avec l'au-delà.
Nate est donc enfin en paix, il est redevenu cet ange qui éclairait le monde dans les premiers épisodes, libéré de la peur qui l'a toujours habité et qui, comme il le dit à sa petite soeur, ne l'a mené qu'à la tombe. Sa souffrance de ces dernières années est justifiée par ce message que délivre Nate fraichement rené de ses cendre, les message délivré par toute la série: soyez heureux, c'est pour cela qu'on vit.

Et tous sont heureux, tous sont en paix, comme ne témoigne cet ultime diner où tous se remémorent les moments passés avec lui tout en riant, en profitant de la vie qui même si elle est parsemée de drames vaut le coup d'être vécue.

A Nate.

Après ce toast qui aurait fait une très belle conclusion, j'ai failli croire qu'ils allaient finir avec cette scène mythique où il chante et danse comme un possédé durant laquelle j'ai bien failli m'étouffer de rire. Ca aurait été une manière bien décalée et plutôt géniale de terminer, un espèce de rappel de cette introduction en fausse publicité qui a ouvert le pilote.

Mais non, il a fallu qu'ils fassent cette dernière séquence.

Et quelle séquence...

Le ventre commence à se nouer alors que Claire est prête à quitter le domicile natal et mettre fin à cette saga familiale dans laquelle on aura été happé le temps d'une soixantaine d'épisodes. Les adieux se font, mais contrairement à la plupart de ceux auxquels on a pu assister, ils ne sont que temporaires. Ils sont le début d'une nouvelle vie pour elle, pour eux tous. Et elle monte dans sa voiture.

Et la musique commence.

Et après avoir jeté un dernier regard à son grand frère qui l'a suivie dans son élan pour prendre son envol, nous accompagnons Claire dans son voyage comme nous accompagne ce fabuleux morceau, qu'il nous amène jusqu'aux derniers instants de tous les membres de la grande famille Fisher. Pour une fois HBO ne tue pas nos personnages fétiches, elle les fait vivre. Elle les fait vivre jusqu'au bout, et même si la mort, le destin tragique par définition est au rendez-vous, il ne s'agit en fait que d'une étape inévitable dans une vie heureuse que l'on comprend heureuse pour tous. Heureuse même si ponctuée de morts parfois violente, mais qui font de la vie ce qu'elle est.

La vie où tout n'est pas parfait, où le bonheur éternel en lequel on croit au début est entaché par les disparitions, les déceptions, les compromis, mais ne disparait jamais vraiment. La vie qui est belle si on apprend à voir au-delà de ses défauts, même si on ne s'en rend compte que lorsqu'on arrive à sa fin.

La vie qui, comme cette route, comme cette explosion d'instruments à vous arracher les tripes et qui déclenche des torrents de larmes, n'en finit pas.

Qui n'en finit pas jusqu'à ce que tout disparaisse dans une grande lumière blanche.

Créée

le 4 juin 2014

Modifiée

le 4 juin 2014

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Tychus

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