Six pieds sous terre
8.1
Six pieds sous terre

Série HBO (2001)

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C'est vingt ans après la fin de la série, que je me lance enfin dans la découverte de Six Feet Under, une série qui fait incontestablement partie des monuments des années 90/2000. Et c'est encore HBO qui s'y colle avec une série qui s'inscrit dans la droite lignées des grands succès de la firme, juste après Oz (1998) et Les Soprano (1999) et juste avant Band of Brothers (2001) et The Wire (2002). Nous sommes donc en 2001 lorsque Six Feet Under sort sur les petits écrans, dans l'âge d'Or des production made in HBO. Et c'est à Alan Ball qu'on doit la création de la série, le scénariste du fameux American Beauty de Sam Mendès et pour lequel il reçu l’Oscar du meilleur scénario en 1999. Avec Six Feet Under, il poursuit donc une mécanique déjà mise à l’œuvre dans American Beauty et qui consiste à étudier les atermoiements existentiels des membres d’une famille dysfonctionnelle, mais ici en les poussant à son paroxysme.


Alors, Six Feet Under ça parle de quoi ? Eh bien, ça parle d'une famille les Fisher, qui sont à la tête d’une entreprise de pompes funèbres et dont le père fondateur Nathaniel Fisher Sr. (Richard Jenkins) vient de mourir. La mère Ruth (Frances Conroy) la fille (Lauren Ambrose) et les deux fils David (Michael C. Hall) et Nate (Peter Krause) vivent tous dans une demeure située juste au-dessus de la chambre funéraire. Alan Ball profite parfaitement de chacun des cinq membres de la famille Fisher pour explorer des thèmes tout à la fois universels et spécifiques de la société américaine contemporaine qui met en avant la réussite individuelle et la richesse matérielle (ou le rêve américain). Comment se caractérise cette famille contemporaine ? Comment et pourquoi est-elle devenue ce qu’elle est aujourd’hui ? Quelles sont les tensions qui la traversent ? Ce sont toutes les questions auxquelles Alan Ball et son équipe de scénaristes tentent de répondre à travers chaque épisode de la série et à travers chaque personnage de cette jolie famille de croque-morts.


Parlons justement des personnage et commençons par Ruth, la matriarche. Ruth est une femme plutôt rigide et campée sur ses principes, mais qui va voir tout son univers mental basculer à la suite du décès de son époux. Elle va alors se remettre en question, pour vivre des expériences de toute nature et à mille lieux de ses certitudes initiales. Ensuite, vous avez Nate, le fils aîné. Installé depuis plusieurs années à Seattle, Nate revient à Los Angeles pour l’enterrement de son père et se voit contraint, avec son frère et sa mère, de reprendre l’entreprise familiale. D’une personnalité plutôt instable, il tentera en vain de se trouver une ligne de conduite directrice que sa faiblesse de caractère viendra en permanence contrarier. La relation tumultueuse qu'il entretient avec Brenda (Rachel Griffiths), qui est au moins aussi dysfonctionnelle que lui, n’arrangera pas les choses, tout comme la grave lésion cérébrale qui planera au-dessus de sa tête comme une épée de Damoclès. Passons maintenant à David, le fils cadet. David est l’élément stabilisateur de la famille, mais son homosexualité (tout d’abord refoulée, puis assumée) et le couple tumultueux qu’il forme avec Keith (Matthew St Patrick) viendront perturber un équilibre plus précaire qu’il n’y paraissait. Enfin, vous avez Claire, la jeune sœur. Claire se rêve artiste engagée, sans jamais réellement se rendre compte de son statut lui permettant de vivre toutes ses expériences artistiques, sexuelles et lysergiques et de pouvoir continuer à contempler son nombril sans trop se soucier du lendemain.


Dans Six Feet Under, chaque épisode commence par un gimmick, un sorte de préambule qui voit la mort, bien souvent étrange et surprenante, de l'un des futurs clients de la famille Fisher. Les préparatifs de la cérémonie funéraire, ainsi que la procédure d’embaumement, vont rythmer l’intrigue de chaque épisode. Ce sera alors l'occasion d'étudier le caractère des personnages qui sont tous à la recherche de leur identité, passant bien souvent par des montagnes russes émotionnelles. On est dans l'ambiance dés les premiers épisodes, notamment grâce à un ton très original et un humour noir savoureux. La série développe son univers et on devient très vitre accroc aux déboires de cette famille d'iconoclastes. Mais au fil des saisons, l'intérêt s'étiole un peu et la série s'éloigne peu à peu de se qui faisait son charme. L'expérience "pompes funèbre" disparaît progressivement pour laisser place aux expériences sexuels des personnages, à leurs interrogations de bobos trentenaires et au sujet éprouvant des longues maladies, histoire d'apporter un peu d'émotions facile.


Omniprésente, la sexualité est montrée avec une crudité que l’on n’avait sans doute jamais vue au sein d’une série télévisée, est au centre des préoccupations de chacun des personnages, qui interagissent le plus souvent en fonction de leurs pulsions assumées ou refoulées. Les thématiques sociales ou politiques, notamment anti-républicaines (nous sommes en pleine ère Bush), sont certes présentes mais tout de même marginales. La mécanique semble donc parfaitement huilée et fonctionne à plein sur les deux ou trois premières saisons. Mais Alan Ball s’est pris au piège de la facilité, n’ayant pas anticipé qu’au-delà de la sympathie initiale qui se dégage de ses personnages, leurs comportements répétitifs finiraient par les rendre agaçants, renvoyant sans doute un peu trop à la figure du spectateur sa propre incapacité à s’extraire de ses névroses. Sans parler de l’ennui qui gagne à force d’une prévisibilité comportementale exaspérante. Le constat final assez navrant nous rappelle que changer s’avère le plus souvent une tâche insurmontable pour chacun d’entre nous.


On passe par presque tous les sentiments : joie, tristesse, ennui, dégoût... Et on côtoie le meilleur comme le pire. Tous les personnages sans exception sont à la fois attachants et détestables. Il y a cette espèce d'ambivalence qui suit la série du début jusqu'à la fin et ça laisse un sentiment vraiment mitigé. Si l'on passe au dessus de tout ça, on se retrouve avec une série à l'humour grinçant et mettant en valeur des personnages bien approfondis, mais qui laisse apparaître de trop nombreuses longueurs et quelques épisodes pas forcément utiles. Alors ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, Six Feet Under reste une très bonne série, mais qui se révèle un peu surévaluée quand on la visionne pour la première fois vingt ans après sa sortie. La dernière saison, avec sa conclusion tant vantée mais un peu surfaite, tourne presque au supplice chinois, ce qui est un comble si l’on repense au plaisir procuré par les deux premières saisons. Mon conseil, regardez les trois premières saisons, mais arrêtez vous là ... les deux dernières ne feront que déprécier la série à vos yeux. (7.5/10)

Créée

le 30 nov. 2024

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lessthantod

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