Thèmes : Système scolaire coréen / Famille / Suspense / Concurrence
Romance : 0 % / Bromance : 0 % / Féminisme : 60% / Paternalisme : 0% *
Séoul, dans un quartier huppé et prisé, vivent quatre familles issues de l'élite. Les enfants sont tous adolescents, fréquentant collèges et lycées privées, les pères sont soit médecins soit avocats et les mères sont au foyer. Ces dernières passent l'essentiel de leur temps à se préoccuper de l'avenir scolaire et social de leurs rejetons et sont prêtes à recruter les plus impitoyables des professeurs particuliers pour leur assurer une place au soleil. Justement, notre histoire commence lorsque Han Seo-jin organise un dîner de félicitations pour l'acceptation en fac de médecine du fils unique de ses chers voisins. Elle espère bien que sa fille aînée, Ye-seo suivra les pas du jeune homme et engage pour ce faire la même coach scolaire : Kim Joo-young. Mais les choses vont prendre petit à petit un tournant inattendu...
Sky Castle nous présente en réalité non pas quatre mais cinq familles sud-coréennes, toutes (très) aisées, perchées sur leur piédestal, obsédées par le futur métier de leurs enfants et leur statut social. Quatre familles sont coulées dans le même moule. La cinquième, qui arrive au cours de l'épisode 2, détonne par son discours à contre-courant : chez eux, pas de cours particulier, pas de coach scolaire et pas d'acharnement au travail. Et étonnement, le fils de la famille est l'un des meilleurs élèves de sa classe, arrachant souvent les premières places des contrôles... Bien sûr, cela va (très) vite se friter, plongeant chacun de nos personnages dans l'incompréhension la plus totale (et dans le mépris).
Les personnages principaux de Sky Castle, ce sont les mères de famille. Ce sont elles qui gèrent la maison, le foyer et les enfants dans une société très patriarcale. Ce sont sur elles que reposent l'éducation et le futur des enfants. Les pères, toujours au travail, se déchargent totalement de tout ça sur leurs épouses qui n'ont qu'à assumer. Ce sera de toute façon leur faute entière si les gosses se plantent. Elles n'avaient qu'à mieux faire : les femmes comme responsables de la tenue du foyer et des enfants. D'ailleurs, par deux fois au cours de la série (peut être davantage, mais j'en ai au moins retenu deux), on entend des mâles s'emporter auprès de leurs épouses et leur reprocher : "c'est comme ça que tu les a élevés !?". Comme si ces messieurs n'avaient pas à s'impliquer autrement qu'au moment de la conception...
La série comprend 20 épisodes. C'est une durée qui peut paraître un peu longue mais on ne les voit pas passer. Elle commence fort avec un excellent premier épisode. Les débuts m'ont beaucoup rappelé Desperate housewives
(Il y a même le suicide de l'une des mères qui y fait penser).
Les acteurs (et surtout les actrices !) sont formidables. La série oscille entre drame et comédie (certains personnages sont assez comiques).
La série ne m'a pas véritablement surprise dans sa thématique parce que je savais déjà ce qui entoure l'éducation et ses enjeux en Corée du Sud (le travail acharné, la compétition etc.) mais elle fait réfléchir et effraie. Tout parent se retrouve dans les parents de Sky Castle, dans ses angoisses comme dans ses injonctions... Et la pression sur les enfants est telle que le suicide reste la première cause de mortalité chez les jeunes de 9 à 24 ans.
Les personnages de SC présentent chacun des personnalités différentes : de la mère absolument prête à tout pour que sa fille réussisse au père rigide et intraitable, en passant par la maman bienveillante mais écrasée par son mari ou encore par la fille bourreau de travail si bien dressée qu'elle croit que c'est elle qui désire plus que tout faire médecine...
Ils sont tous intéressants (certains plus que d'autres bien sûr), ils sont complexes. La cinquième famille contraste totalement avec les quatre autres de part son côté calme et plus proche d'un couple "classique" pour notre regard d'occidental (le mari et la femme sont égaux dans leur façon d'élever leur fils, ils se partagent les tâches du foyer, ils se parlent d'égal à égal, ils ont des conversations saines qui dépassent de bien loin la scolarité et l'université). Cette famille, assez symbole d'innocence et de pureté,
va être la victime finalement de cet environnement et d'un personnage qui est un peu l'incarnation du mal (le coach Kim).
Après, c'est même l'ensemble de la communauté qui va se retrouver prise dans un engrenage... Et être impacté.
Bien sûr, chaque famille a son propre art narratif avec ses particularités. Si la famille de Ye-seo est au centre de l'histoire, celle du professeur Cha a une évolution intéressante, notamment via trois de ses membres : le père (c'est lui le rigide totalement obsédé à l'idée de dresser ses deux garçons), la mère (d'une douceur et d'une finesse remarquables) et la fille aînée, Se-ri (qui fait la fierté de son père
car étudiante à Harvard, mais dont on apprendra qu'elle a menti et qu'elle n'y a pas été acceptée)
Le personnage de Se-ri est vraiment très significatif :
elle a toujours tellement voulu plaire à ce père ultra strict qu'elle lui ment depuis un an, terrorisée à l'idée de dire la vérité. Finalement, c'est elle qui lui assénera les plus pertinentes remarques... A l'opposé, le personnage Ye-seo, la fille soumise, est également bouleversant...
Il y a beaucoup de choses encore à dire sur SC comme la dénonciation du paternalisme (incarné ici par deux des pères de famille). Cela pourrait prendre des pages et des pages. C'est vraiment une série très riche et complexe.
Il y a un reproche principal que je ferais :
la fin qui est très positive pour tous ses personnages principaux. Même si la toute dernière scène vient nous rappeler que si tout s'est bien terminé pour nos familles, les Coréens restent les prisonniers de ce système. Si j'ai beaucoup aimé le dilemme de Ye-seo et Seo-jin (doivent-elles sauver U-ju et tout perdre ou bien accepter de le voir condamner et permettre ainsi à Ye-seo d'accéder à leur rêve commun d'accéder à la fac de médecine ?) et leur choix final, la suite est vraiment trop optimiste. Deux scènes particulièrement m'ont semblé trop énormes : l'arrivée d'une nouvelle voisine et les trois housewives qui prêchent désormais pour le non travail des enfants et surtout la scène où Su-im va voir la coach en prison, alors qu'elle a cherché à faire condamner son fils. Non, là, trop c'est trop ! Au vu du sujet et de ce qu'on a regardé jusque là, une fin plus sombre aurait été plus adaptée et plus forte.
Voilà, sinon, une excellente série qui donne à réfléchir... Pas un absolu coup de cœur à cause des remarques précédentes mais un drama très addictif, bien écrit et qui frappe le spectateur.
*Voir page d'accueil de ma liste pour plus d'explications : https://www.senscritique.com/liste/Kdramas_vus/2850094