Attention, je vais spoiler, que ce soit sur cette série ou sur la série prequel qui doit être vue entre les saisons 1 et 2
L'Antiquité est ma période historique préférée et j'ai été dès mon plus jeune âge fasciné par cette révolte des esclaves qui a fait trembler le surpuissant Empire romain (pour lequel j'ai également toujours eu beaucoup d'admiration), à l'image d'un Hannibal lors de la deuxième guerre punique. Je suis d'ailleurs de manière générale un grand fan des histoires de rébellion et résistance (et pourtant Dieu sait que je ne suis pas un révolutionnaire dans la vie de tous les jours ^^). J'ai vu et adoré le film de Kubrick et vais donc être obligé de comparer un minimum les deux œuvres mais comparaison ne saurait être raison entre une série de plus de 25 heures et un film de 3 heures, a fortiori vu il y a deux ans. La série se divise clairement en deux parties, le ludus (saison 1 et série prequel) et la rébellion (saisons 2 et 3). Je vais donc parler d'abord de la première puis de la deuxième (jusqu'ici tout va bien) avant de revenir en détail sur les personnages (et d'en profiter pour évoquer certains éléments que j'aurai volontairement occultés auparavant) et de placer quelques autres remarques.
Première partie donc. On y suit l'entraînement des gladiateurs dans le ludus de Batiatus, où ils sont confrontés à la privation de leurs libertés, situation souvent nouvelle comme elle l'est pour notre héros. On a droit à des combats de toute beauté, que ce soit à l'entraînement ou dans l'arène. Mais il se trame de nombreux drames autour de ce ludus, que ce soit au niveau des relations entre les esclaves ou de celles entre les maîtres (et parfois entre maîtres et esclaves). On a en effet une peinture très sévère de la haute société romaine, entre femmes prêtes à tout pour assouvir leurs désirs et leurs ambitions et hommes pervers et cupides (tout étant en plus fait pour qu'on les déteste, je suis désolé pour l'acteur mais la gueule de Cossutius franchement...). La série prequel s'avère indispensable parce qu'elle décrit comment les différents personnages en sont arrivés là, quels terribles coups le destin leur a infligés (ou quels terribles coups ils ont eux-mêmes infligés...), montrant certains éléments qui avaient été évoqués dans la saison 1, et permet d'expliquer certaines choses des saisons suivantes. Je dirais que cette partie "ludus" est supérieure à celle du film parce que beaucoup plus développée (mais encore une fois le nombre d'heures disponibles explique cela).
La deuxième partie suit donc la révolte des esclaves, la poignée de gladiateurs évadés de chez Batiatus rassemblant de plus en plus de monde pour finalement devenir une véritable armée. Elle partait avec un petit problème : le changement d'acteur principal, Andy Whitfield étant malheureusement décédé. Je garde une préférence pour lui mais Liam McIntyre assure et ça ne s'avère donc pas être un véritable défaut. J'ai plus de réserves concernant le changement pour Naevia mais là c'est très subjectif puisque d'ordre purement physique, je trouve la première actrice plus jolie. Sa remplaçante s'embellit cependant à mes yeux en adoptant son look guerrier et je reconnais avoir du mal à imaginer la première Naevia dans ce style. Bref revenons à l'histoire, là on attaque le cœur même de l'histoire, le soulèvement. On a donc évidemment l'occasion de voir de belles scènes de bataille mais aussi les habituelles dissensions entre leaders. D'ailleurs je sais pas vraiment comment expliquer mais j'ai beaucoup aimé l'organisation de l'armée avec le chef suprême entouré de ses trois fidèles et charismatiques lieutenants (sur lesquels je reviendrai plus tard), ça me rappelle fortement César entouré de Rocket, Maurice et Luca dans La Planète des Singes : Suprématie ou encore Mathô, Spendius, Autharite et Zarxas en chefs des mercenaires dans Salammbô (deux œuvres qui figurent parmi mes préférées, à l'instar de Braveheart, The Patriot ou encore Le Schtroumpfissime, je l'avais dit que j'aimais les histoires de rébellion...). Cette partie pose également de nombreux dilemmes. Où est la frontière entre justice et vengeance ? Tous les Romains doivent-ils mourir ? Leur faire ce qu'ils nous ont fait, est-ce s'abaisser à leur niveau ? Vaut-il mieux fuir et vivre libre ou terrifier Rome jusqu'à la mort ? Questions difficiles à trancher si on essaie de se mettre à la fois à la place des Romains, pour qui l'esclavage est quelque chose de tout à fait naturel et qui ne sont qui plus est pas tous durs envers leurs esclaves, et de ces derniers, qui ont une guerre à mener et peuvent difficilement se permettre, par exemple, de nourrir des prisonniers. Tout cela entraîne de nombreux désaccords et querelles qui font de cette partie plus qu'un simple affrontement entre deux armées. De plus, comme dans le film, l'accent est aussi mis sur la façon dont Rome organise sa défense et c'est évidemment un bon point.
Abordons maintenant les (rares et légers) défauts et les petites remarques (oui je sais aucune logique dans la construction de cette critique). La série est réputée pour nous présenter du sexe et du sang en abondance, elle en fait sans doute un peu trop là-dessus mais ça me dérange pas spécialement (et puis on va pas se mentir les corps féminins dénudés j'ai rien contre ^^). Un truc qui me gêne beaucoup plus c'est la vulgarité. Je sais pas s'il existait l'équivalent des "gros mots" à l'époque et si oui s'ils étaient utilisés aussi fréquemment mais ça me fait toujours bizarre d'en entendre dans des œuvres se déroulant il y a aussi longtemps ou dans des univers de fiction, surtout que là c'est vraiment tout le temps, "fuck", "shit" et "cock" étant limite les mots les plus prononcés de la série... Je trouve aussi que les gladiateurs sont un peu trop surpuissants par rapport aux soldats romains. Il est possible que ç'ait en effet été le cas mais en revanche j'ai de gros doutes sur la crédibilité de la rapidité avec laquelle Nasir et Naevia notamment deviennent des combattants hors pair. J'ajoute qu'il en faut vraiment beaucoup pour tuer les personnages, quels qu'ils soient, on se demande souvent comment ils ont fait pour survivre à certaines blessures. Pour le coup c'est un détail mais j'ai été étonné de voir que certains pirates ciliciens étaient noirs alors que la Cilicie correspond à une partie de la Turquie actuelle mais il y a peut-être une explication, je me suis pas renseigné. Notons d'ailleurs que Castus (le Cilicien qui rejoint les rangs de Spartacus) était en réalité gaulois, tout comme Gannicus et Œnomaüs (originaire de Numidie mais né en Gaule).
Petit aparté pour évoquer le casting. On avait là l'un des gros points forts du film (Kirk Douglas, Laurence Olivier, Jean Simmons, Tony Curtis, Peter Ustinov, John Ireland, Woody Strode ou encore Herbert Lom, rien que ça) et, comme souvent dans les séries, on a ici moins de stars. Je ne connaissais en fait que John Hannah (La Momie) dans le rôle de Batiatus, Temuera Morrison (Les Guerriers de la nuit, Jango Fett dans Star Wars, le père d'Aquaman) dans celui du Doctore du début de la saison prequel et Jai Courtney (Varro), lui seulement de nom. Il est amusant de signaler que les acteurs de Crixus, Glaber et Dagan ont tous trois joué dans l'univers du Seigneur des Anneaux, le premier incarnant même Azog. Je n'ai cependant rien à reprocher à ces acteurs moins célèbres, c'est juste qu'on a pas le plaisir de retrouver des visages connus et appréciés.
Après le casting viennent logiquement les personnages. Je n'ai pas grand-chose à dire sur Spartacus qui est un peu l'archétype du héros sans peur et sans reproches, prêt à tout par amour pour sa femme, redresseur de torts, stratège de génie, guerrier légendaire qui refuse de prendre plus de vies que nécessaire. Un super personnage évidemment, pas de surprise. Batiatus s'avère être un vrai salaud (je me suis dit à un moment qu'il était très clivant et intéressant, croyant qu'il allait honorer sa parole et rendre Sura à Spartacus) mais au fond il ne l'est pas plus que ses adversaires et j'ai eu tendance à prendre son parti dans les conflits avec ces derniers, notamment dans la série prequel. J'ai quand même une nette préférence pour le Batiatus de Peter Ustinov qui m'avait plutôt marqué. Œnomaüs a un charisme fou, énorme coup de cœur pour ce personnage déchiré entre son serment envers la maison qui a fait de lui l'un des plus grands gladiateurs et les nombreux crimes dont elle s'est rendue coupable envers ses camarades. J'ai quand même un regret, j'étais très content de le voir jouer les prolongations mais après coup je pense qu'il aurait été symboliquement mieux qu'il meure dans la fosse, là où tout a commencé, ou dans l'arène, d'autant plus que sa mort passe assez inaperçue, on n'a ni la réaction des personnages (à part Gannicus) en l'apprenant ni un hommage. Crixus apparaît dans un premier temps comme très antipathique mais la série prequel contribue à améliorer son image et, surtout, la deuxième partie fait de lui un fidèle et charismatique lieutenant de Spartacus, certes souvent en désaccord avec son chef et trop porté sur l'offensive mais finalement loyal jusqu'au bout à celui qui est devenu son ami (ce qui était loin d'être gagné). Son amour pour Naevia le rend très humain et j'adore son look chevelu et barbu de la saison 3. Il bénéficie en plus d'un magnifique hommage à sa mort. Gannicus est, avec Crixus donc, le personnage à l'évolution la plus intéressante. Il apparaît d'abord comme un gladiateur très porté sur les femmes et l'alcool et je ne m'attendais vraiment pas à le revoir après la série prequel. Son retour surprend et ne le rend pas davantage sympathique puisqu'il vient exécuter Œnomaüs, Crixus et Rhaskos dans l'arène. Il se retrouve finalement chez les rebelles mais refuse de se joindre à eux, préférant vivre que d'aller à la rencontre d'une mort certaine (ce en quoi on peut le comprendre). La mort de son grand ami Œnomaüs, qui avait lui-même rejoint la cause de Spartacus alors qu'il n'y était à l'origine pas disposé, le convainc de rester et il devient lui aussi l'un des fidèles lieutenants du Thrace, le plus intelligent qui plus est, freinant souvent les ardeurs belliqueuses de ses deux égaux. Sa réputation de légende de l'arène, sa capacité à sortir vivant de situations qui semblaient perdues d'avance et donc cette intelligence lui octroient à mes yeux un charisme impressionnant (et en plus il a les mêmes cheveux que SCH). J'ai moins à dire sur Agron mais c'est aussi un personnage que j'apprécie, j'aurais pas du tout misé sur le fait qu'il prendrait une telle importance lors de sa première apparition. Ashur est lui parfaitement détestable, je pense que tout le monde sera d'accord là-dessus. Le seul argument en sa faveur c'est qu'on peut comprendre qu'il ressasse cette carrière ratée de gladiateur, d'autant plus qu'il avait eu la marque sans passer l'épreuve et n'a donc jamais pu faire ses preuves aux yeux des autres. Cela ne suffit néanmoins bien évidemment pas à excuser ses actes et on est bien content de voir sa tête s'envoler à la fin de la saison 2. Crassus s'avère être un excellent stratège, le pendant de Spartacus qu'il arrive à cerner et comprendre et donc à ne pas sous-estimer. Cet aspect, également présent dans le film me semble-t-il, nous rappelle que l'homme le plus riche de l'histoire de Rome n'était pas seulement un être cupide mais aussi un grand tacticien. La sous-intrigue le concernant est vraiment pas mal, la relation père-fils est assez classique mais intéressante tout comme l'est l'histoire de la pauvre Kore (qui rappelle Antoninus fuyant Crassus pour rejoindre Spartacus dans le film). Sa crucifixion est un peu le symbole de la victoire du devoir sur les sentiments, conclusion terrible mais sans doute nécessaire pour écraser définitivement toute velléité de révolte. Quant à Jules César... Vraiment pas fan de son traitement. Peut-être qu'il était réellement comme ça mais ça me dérange un peu de voir son image écornée de la sorte. Alors bien sûr je dis pas que c'était un saint, loin de là, mais malgré tout le prisme du temps fait que c'est quelqu'un pour qui j'ai de l'admiration ou presque et j'aurais aimé un peu plus de respect (le mec se fait carrément violer quoi mdr). En plus cette histoire d'infiltration est bien évidemment complètement inventée (mais pourquoi pas après tout, je réclame pas une exacte vérité historique, faut juste avoir conscience que c'est jamais arrivé) et de manière plus générale je n'ai trouvé aucune trace d'un quelconque rôle du futur consul, qui venait tout juste d'être nommé tribun militaire, dans la lutte contre Spartacus. À noter qu'il apparaissait aussi dans le film, je me rappelle plus bien de son rôle mais il me semble que c'était surtout pour le clin d'œil, en tout cas il n'allait pas sur le terrain ça c'est certain. J'ai en revanche apprécié de voir les prémices du triumvirat à la fin de la série.
Parlons à présent de mes épisodes préférés. Je serai assez bref puisque je rejoins la majorité (au vu des notes moyennes) : les plus marquants sont pour moi ceux du combat contre Théokolès, de la révolte (impressionnant 8,7/10), du combat aboutissant à l'affranchissement de Gannicus et de la destruction de l'arène de Capoue (pas Étienne) ainsi que le final de la saison 2, avec la fin définitive des Batiatus et des Glaber mais aussi celle de Ashur, Mira et Œnomaüs, et bien sûr celui de la saison 3, la défaite, la mort de Spartacus, les crucifixions... Je mets la saison 3 au-dessus des autres parce que comme je l'ai déjà dit c'est là que l'histoire me passionne le plus, qu'on arrive vraiment dans une phase de guerre, mais l'ensemble est vraiment de très haut niveau.
Bref vous l'aurez compris j'ai adoré cette série où se mêlent divers thèmes qui me sont chers dans les fictions : lutte pour la liberté, rébellion, vengeance, personnages charismatiques, combats sublimes, honneur, fraternité... Elle a en plus permis et permettra encore de faire découvrir à beaucoup cette histoire folle et épique qui continue de déchaîner les passions, plus de deux mille ans après.